Chapitre 16 (partie2)

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J'avais vraiment une sale tête. Je me passai de l'eau sur le visage, espérant que le liquide glacé me donnerait à nouveau l'air vivant. Je jetai un œil au miroir. J'étais méconnaissable. Mes cheveux ternes tombaient tristement sur mon visage cernés aux traits, me donnait l'air maussade et livide. Mes yeux injectés de sang dû à des nuits sans sommeil, soulignés par le noir de mes cernes, paraissaient froids et livides. Mon cœur meurtri s'accordait parfaitement à mon apparence, brisé et en mille morceaux.

Une semaine s'était passé depuis l'incident du bureau. Noah ne m'avait pas adressé un mot depuis ce jour et mettait un point d'honneur à m'éviter. Je l'avais blessé, physiquement et dans son amour propre et il me le faisait chèrement payer. Jamais nous n'étions restés aussi longtemps en froid et ça me rongeait.

Le lendemain, j'avais tenté une approche, en lui préparant son petit déjeuner préféré, des gaufres au sucre mais j'avais essuyé un sérieux refus. Il n'avait même daigné toucher à son assiette, était sorti rapidement, sans même m'accorder un seul regard.

Depuis je ne l'avais aperçu que de brefs instants, s'enfuyant dès que j'avais l'audace de tenter de présenter mes excuses. Mon comportement était impardonnable et ma grand-mère s'était bien gardée de me le rappeler.

— Ce ne sont que de vieux livres poussiéreux, de vieilles babioles que ton père gardait pour ses recherches inutiles qui l'ont conduit à la mort. Ça ne remplacera jamais ce qu'il t'a laissé de plus précieux, à savoir une famille et des gens qui t'aiment. Ta mère se retournerait dans sa tombe si elle voyait ses deux fils se déchirer ainsi pour de telles sottises, m'avait-elle dit avec un soupir entendu.

Je m'étais avachi sur la table d'un air malheureux tout en frottant mes yeux fatigués par le manque de sommeil. Elle avait raison bien entendu. Ma mère avait toujours fait un point d'honneur à ce que ses enfants soient unis, que l'on forme un semblant de famille parfaite malgré les difficultés. Que dirait-elle si elle nous voyait ainsi, elle qui avait toujours été aimante et protectrice envers nous ? Elle serait sûrement déçue et triste. Cette idée me mina encore plus le moral.

— Je n'ai pas réfléchi à mon geste, avouai-je d'une voix pâteuse à travers mes doigts. Je voulais juste le protéger, voilà tout.

Ma grand-mère afficha une moue dédaigneuse.

— Si Noah a ressenti le besoin de se tourner vers cette fille, c'est qu'il sentait que tu n'étais pas assez présent pour lui. Laisse la boutique, laisse les choses se tasser toutes seules et concentre toi sur ce qui vaut vraiment la peine d'être sauvé. Les choses finiront bien par revenir à la normale.

Malgré ses paroles pleines de sagesse, je n'en étais toujours pas convaincu, même une semaine plus tard. Le silence de la maison m'oppressait, à force de tourner en rond et de laisser mon esprit divaguer à des pensées bien moroses.

Même le son relaxant des vagues s'écrasant sur la plage, sur le patio où j'avais l'habitude de me réfugier, ne parvenait pas à me détendre. Ce bruit, d'ordinaire si agréable, m'angoissait plus qu'autre chose à présent que j'avais une idée de ce qu'il s'y passait.

Naïa n'avait pas daigné réapparaître depuis plusieurs jours, même si je soupçonnais Noah de la rejoindre en secret. Son absence me soulageait autant qu'elle me torturait, me laissant un trou béant dans la poitrine.

Jamais je en l'avais vu aussi en colère contre moi, à ce souvenir, mon corps tressaillit. La lueur rouge qui passait dans ses yeux, ses traits durcis en une expression vorace et furibonde m'avait retourné l'estomac, je n'avais eu là qu'un bref aperçu de sa véritable nature. Pourtant mon désir envers elle ne s'était pas assagi pour autant , et cela m'effrayait. Sa présence m'hypnotisait, m'envoûtait à en perdre la raison. Ce comportement n'était pas normal, et j'étais persuadé que sa nature de Naïade n'y était pas pour rien.

Le secret de NaïaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant