Chapitre 29 ( partie 2)

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Rowland expira sa fumée, fusillant Naïa du regard qui se dressait devant moi comme un bouclier.

— Une vieille histoire se transmet depuis des générations à Newquay, lâcha t-il d'un ton venimeux. Celle d'une douce vierge innocente à l'apparence d'une femme fatale qui mange les hommes tout cru, les séduisant avec son charme irrésistible, avec une facilité déconcertante. On dit de cette femme qu'elle a une très belle voix, presque enchanteresse. Une femme attirante et libre comme l'Océan, mais très dangereuse. L'Océan les retiendraient prisonnières, Elle ne les libère que lorsque la lune est haut dans le ciel, afin qu'elles se rassasient. Les hommes sont leurs seuls victimes, incapable de résister à leur beauté et à leur corps.

Je vis les muscles des épaules de Naïa tandis qu'il continuait son récit d'une voix douce mais tranchante. Il n'avait pas choisi cette histoire au hasard, l'enfoiré.

— Cependant, l'une de ces femmes a fini par tomber amoureuse d'un marin, poursuivit-il. Mais pour le sauver, elle décida de se sacrifier pour l'homme qu'elle aime, pleurant toutes les larmes de son corps. Elle décida de se laisser sécher au soleil, délaissant et trahissant l'Océan pour devenir poussière.

Il prit une pause dramatique, en fumant doucement sa clope. Naïa était tendue qu'elle semblait prête à bondir pour lui arracher la gorge.

— Selon cette légende, ce serait les restes de ces femmes qui recouvreraient les plages, le sable ne serait que leurs cendres. Cette histoire explique pourquoi la mer est salée, ce ne serait que leurs larmes, versées pour leurs amants.

Il fit un rond avec sa fumée, en baissant la tête en arrière.

— C'est une histoire très intéressante, je trouve, dit-il.

Je m'avançai et prit la main tremblante de Naïa, qui bouillonnait sous la surface calme et lisse de son visage.

Elle sembla se détendre un peu lorsque je fus à ses côtés et serra ma main. Rowland reporta son attention sur nous, et s'avança vers nous à travers le nuage de fumée. Bientôt il fut face à nous. Il esquissa un sourire détendu et calculateur.

— Je me demande, où s'arrête la fiction et où commence la réalité, ronronna t-il, ses yeux lançant des éclairs d'excitation.

Soudain il se saisit du bras libre de Naïa, le tendit vers elle et écrasa sa cigarette sur sa peau blanche. Je la sentis tressaillir lorsque la braise entra en contact avec sa peau, et elle gémit de douleur. Je poussai un grognement de colère et le repoussa violemment. Il percuta le lit en trébuchant, un sourire satisfait sur les lèvres. Une odeur de poisson grillé et de mer embauma la chambre, recouvrant l'odeur de la cigarette.

Je ne pris pas le temps de réfléchir et me jetai sur l'inspecteur avec rage. Je lui donnai un coup de poing à la mâchoire, sentant ses os craquer sous mes doigts. Naïa s'interposa entre nous et se posta devant moi, le regard suppliant. Mais je tremblais de colère.

— Arrête Illian, c'est bon, murmura t-elle en me serrant contre elle.

Son corps glacé apaisa le feu qui m'animait. Du moins pour un temps. Rowland essuya le sang qui lui maculait le visage avec sa manche, se relevant tant bien que mal. Je lui jetai un regard noir. J'espérai lui avoir fait mal autant qu'il avait fait souffrir la Sirène. Naïa se tourna vers lui, le visage déformé par la colère.

— Vous n'avez plus rien à faire ici, lança t-elle. Il n'y a pas de preuves sans corps de toute manière. Déguerpissez avant que je ne m'en charge moi même.

Il eut un rictus malsain.

— Votre peau sera mienne, quoi qu'il advienne.

— Et vous savez que les représailles seront à la hauteur de vos espérances, répondit-elle d'un ton menaçant qui aurait fait frémir même le plus aguerri des soldats.

Le secret de NaïaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant