Epilogue (partie 5)

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8 mois plus tard

Les hurlements de la foule étaient tels que j'en ai eu un frisson de peur, mêlé d'excitation. Ils applaudissaient face à la performance incroyable de l'un de mes concurrents.

J'agrippai ma planche de mes mains moites, le cœur battant à tout rompre tant l'angoisse m'animait. La chaleur était étouffante, et humide ici en Australie, bien différent du temps frais et sec de l'Angleterre auquel j'étais habitué.

Les vagues aussi étaient plus hautes, plus rapides et plus puissantes. Des rochers tranchants et acérées jalonnaient la mer et les récifs, ce qui exigeait un certain niveau. C'était un challenge vivifiant que j'étais ravi de relever, afin de me pousser encore plus loin dans mes limites et me sortir de ma zone de confort. Enfin, je pouvais voir ce dont j'étais vraiment capable.

Je venais de passer une semaine merveilleuse ici, entre entraînement au surf et tourisme. J'avais fait la connaissance de personnes incroyables avec qui je m'entendais parfaitement, des passionnés de surf tout comme moi.

Je me sentais à ma place ici, dans mon élément, comme un poisson dans l'eau. M'éloigner des soucis quotidiens de la boutique me faisait un bien fou. Même si ma famille me manquait, elle me soutenait et croyait en moi, en mes capacités, en mon rêve.

— Concurrent numéro 139, Illian Carrell. Veuillez vous mettre en place s'il vous plaît.

Un tonnerre d'applaudissement retentit à la mention de mon nom. Je sentis l'adrénaline et la peur au creux de mon estomac qui se contracta. Je serrai ma planche de surf contre moi, inspirai profondément et m'élançai en courant sur la plage, serré dans ma combinaison, sous les encouragements de la foule.

Je croisai Rick, dégoulinant après sa superbe performance, que j'avais rencontré durant mes séances d'entraînement, qui venait tout droit d'Irlande, spécialement pour l'occasion. Un surfeur chevronné, habitué des compétitions et dont les conseils sont précieux.

Il tendit son bras lorsqu'il arriva à ma hauteur, un grand sourire aux lèvres, satisfait de son score. Je lui tapai dans la main d'un geste nerveux, soudain tendu.

— Détends-toi, fait comme tu en as l'habitude, dit-il en apercevant mon sourire crispé. Et le plus important, amuse toi ! Bonne chance Illian.

— Merci Rick. Tu étais incroyable.

Il leva le pouce en l'air en riant.

— Montre moi de quoi tu es capable !

Je hochai la tête, et continuai ma course jusqu'à atteindre l'eau qui s'écrasa contre mes jambes. Je ne me laissai pas intimider et avançai. Une fois à bonne distance, je m'allongeai sur ma planche et pagayai vers le large.

Je glissai sur les vagues qui était de plus en plus hautes au fur et à mesure que je m'éloignai du rivage. Les cris de la foule s'évanouirent peu à peu et je pus retrouver toute ma concentration. Lorsque je fus suffisamment loin, je m'assis sur ma planche une jambe de chaque côté, en attendant que la bonne vague se présente à moi.

L'océan profita de ce moment pour glisser ses doigts le long de mon dos, et je frissonnai. Curieusement, l'eau était bien plus fraîche ici qu'en Angleterre. Ce dont je ne me plaignais pas vu la chaleur suffocante.

Elle me serra dans Ses bras d'un geste affectueux et encourageant.

« Vu ce que tu as vécu par le passé, ce ne sont pas ces simples vaguelettes qui vont te faire peur », plaisanta t-elle.

J'émis un petit rire nerveux, cramponnés à ma planche qui se balançait au rythme houleux des vagues.

— Vous me rattraperez si je tombe ?

« Toujours ».

Une vague de chaleur me submergea et je me détendis quelque peu.

— Ne trichez pas en me facilitant la tâche, je veux être au même niveau que les autres.

Elle ricana contre ma peau d'un air enjoué.

« Ce ne serait pas juste et honnête de ma part, surtout pour les autres. Je risque même d'être un peu plus dure avec toi. En toute amitié bien sûr. »

Je sentis son sourire m'effleurer les sens. J'aimais la proximité que nous avions à présent.

Durant ces huit derniers mots, après mes journées de travail acharnées, je me rendais souvent près d'Elle, à me pelotonner contre dans Ses bras. Elle me parlait, me réconfortait, m'encourageait dans mes projets. Elle était ma précieuse amie.

Les vagues s'agitaient de plus en plus sous ma planche, impatientes. J'inspirai longuement, me remit à plat ventre et pagayai à nouveau. La forme du tube commençait à se former, bien plus grande que tout ce dont j'avais l'habitude à Newquay. Mais j'étais serein.

C'est alors que je l'aperçus. Au loin, à l'horizon, sa tête dépassant de la surface, ses longs cheveux noirs étalés tout autour d'elle comme une fleur en train d'éclore. Mon estomac se noua et ma respiration s'emballa. Naïa m'offrait l'un de ses plus beaux sourires, que j'étais le seul à profiter de cette vue magnifique.

Cachée parmi les vagues, elle ne se montrait qu'à moi. Malgré le temps passé loin d'elle, mes sentiments restaient intacts. Mon cœur battit si fort dans ma poitrine que je crus qu'il allait exploser. L'incendie me submergea à nouveau, tandis que l'amour et le désir enflammait ma peau.

Puis elle se mit à chanter. Un son doux et délicieux qui me liquéfia alors qu'elle fredonnait pour moi. Elle chantait dans une langue ancienne inconnue que je ne comprenais pas, pourtant elle me toucha. Ses mots parvenaient à m'atteindre, à m'émouvoir.

Je ne pouvais détacher mon regard d'elle, comme si j'étais perdu dans un espace où nous n'étions que tous les deux. Comme cette nuit dans sa grotte secrète, que je n'avais jamais réussi à retrouver malgré tous mes efforts.

Elle cessa alors de chanter, et tout reprit vie autour de moi. J'entendais à nouveau les hurlements de la foule qui attendait avec impatience que je me lance à mon tour.

« Je voulais te faire la surprise, mais je crois qu'elle n'a pas eu la patience d'attendre. »

La gorge serrée par l'émotion, je caressai l'Océan du bout des doigts, qu'Elle serra doucement, heureuse pour moi.

— Allez, c'est parti, lançai-je en levant le poing en l'air, un grand sourire aux lèvres.

Elle était revenue. Elle m'attendait, au loin et me rendit mon sourire qui fit faire un bond à mon cœur qui explosait de joie.

Je pagayai jusqu'à la naissance de la vague que j'avais choisi. Alors que j'allais de plus en plus vite, je me mis debout sur ma planche alors que je me retrouvai enfermé dans un cylindre soyeux turquoise.

Peu m'importait l'issue de cette journée. Que je gagne ou que je perde le Rip Curl Pro, n'avait pas d'importance.

Je l'avais retrouvé. Pour moi, c'était la plus grande victoire que je pouvais espérer. J'avais gagné. 


Fin 



Le secret de NaïaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant