Chapitre 9

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Au début, je n'y ai pas prêté attention. Des gouttes d'eau qui tombent du ciel, qui donc y aurait prêté attention ? Surtout dans une région où la pluie est monnaie courante.

Il est vrai cependant que le ciel avait la larme facile en ce mois de juillet qui était censé être celui des glaces et des heures paresseuses où les peaux s'étourdissent de soleil. La pluie ne m'empêchait pas de manger des glaces ; en revanche il est vrai que mon teint était nettement plus pâle que les étés précédents. Ça ne paraissait pas dramatique. L'été finirait par s'installer d'un jour à l'autre, j'en étais certaine.

Malgré ce ciel maussade, je n'avais pas le temps de m'ennuyer. Je passais tous mes après-midis avec Tristan, parfois même mes nuits. La pluie me paraissait presque romantique lorsqu'elle rythmait le bruit de nos respirations et de nos cœurs qui semblaient battre à l'unisson. Tous les jours, nous allions nous promener dans le parc près de chez lui, quelle que soit l'humeur du ciel. Et lorsque, par miracle, un rayon de soleil faisait irruption, on se vautrait sur l'herbe, souvent encore humide de l'averse précédente, et on discutait pendant des heures, ma tête posée contre son torse, sa main jouant avec mes cheveux. Parfois on ne disait rien et c'était tout aussi bien. Il paraît qu'on peut mesurer la complicité entre deux personnes à la qualité du silence qui s'installe lorsqu'elles se taisent. Si le silence crée un poids oppressant, c'est que ces deux personnes n'ont aucune affinité. Le silence avec Tristan était aussi léger et doux qu'un baiser.

La pluie m'était invisible sauf dans les moments où je souhaitais qu'elle fasse partie de la bande audiovisuelle de ma vie. Comme ce jour où le ciel s'était liquéfié subitement alors que je portais une robe d'été et que j'avais vu Tristan avancer vers moi sous ce rideau de pluie et qu'il m'avait dit : « Tu es jolie, comme ça, sous la pluie. » Alors j'avais entendu la mélodie du bitume qui s'éveillait sous ces milliers de perles d'eau et j'avais béni la pluie. Douce, innocente pluie qui semblait n'être là que pour m'embellir.

Je ne savais pas que la pluie pouvait choisir le moment où elle s'impose à vous. Qu'elle pouvait tout envahir, jusqu'aux moindres recoins de votre vie, au point qu'il n'était plus possible de la chasser de votre esprit.

Je ne savais pas que la pluie pouvait séparer deux personnes.

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Bonjour,

J'ai envie de connaître vos hypothèses, car certains d'entre vous ont lu une version plus étoffée du chapitre 5 (whatelse et nathaliejyl) tandis que les autres ont lu une version plus courte.

Et du coup ça m'intéresserait beaucoup de voir comment vous interprétez ce chapitre en fonction de ce que vous avez lu précédemment.

ça m'aiderait à choisir si je mets des indices ou pas.

Si ce chapitre ne vous inspire aucune hypothèse, que vous êtes complètement dans le flou, n'hésitez pas à le dire aussi.

Merci !

La théorie des cœurs bunkers - Sous contrat d'édition Hachette RomansOù les histoires vivent. Découvrez maintenant