Quelques jours plus tard, Laslo m'attendait à la sortie des cours. Je me suis surprise à lui sauter au cou comme une gamine. Alors qu'on marchait, il m'a proposé de visiter l'herboristerie où il travaillait. J'ai accepté ; je trouvais ça sympa de découvrir son univers. Mais au moment où il a posé sa main sur la clinche, je me suis soudainement rappelé que c'était le magasin de ses parents. Ce qui signifiait peut-être qu'il voulait me présenter à sa famille. Je n'ai pas eu le temps de l'en dissuader que nous étions déjà à l'intérieur, propulsés dans un monde de plantes séchées, de tisanes, d'huiles essentielles et de macérâts. Les présentoirs étaient en forme de spirales comme des coquilles d'escargot. Tout était très épuré, dans des teintes naturelles évoquant la verdure ou le bois. Il régnait une odeur vivifiante de citron et d'eucalyptus. C'était un endroit apaisant. J'avais l'impression d'être en meilleure santé rien qu'en regardant les présentoirs.
– Vous voulez un conseil ?
Une femme s'est dirigée vers moi, un sourire bienveillant aux lèvres. Les traits harmonieux de son visage et sa chevelure noire de jais ne laissaient aucun doute sur la personne que j'avais en face de moi.
– Je te présente Elsa, une amie, a déclaré Laslo. Je venais juste lui montrer le magasin.
Une amie, ai-je enregistré sans savoir si j'étais offensée ou soulagée qu'il ait utilisé ces mots. Je n'avais pas envie qu'il me présente officiellement, mais c'était tout aussi délicat de me tenir devant sa mère et de devoir faire semblant que je n'avais jamais eu de rapports plus qu'amicaux avec son fils. J'avais du mal à la regarder dans les yeux.
– Elle a peut-être besoin de quelque chose ? Ici, on agit surtout de façon préventive. On soigne les petits maux pour éviter qu'ils dégénèrent en maladie. On a des remèdes pour à peu près tout, sauf pour les maladies graves ou les peines de cœur.
– Oh, tout va bien de ce côté-là, ai-je bafouillé, gênée. Peut-être... Auriez-vous quelque chose contre les crises d'angoisse ?
Laslo m'a regardée d'un air interloqué comme s'il cherchait à savoir si la situation me rendait nerveuse.
– Bien sûr, nous avons plein de plantes qui agissent sur le système nerveux. Je peux vous proposer un mélange pour tisanes à base de passiflore et de mélisse. Avec ça, vous devriez vous sentir relaxée.
– C'est pour ma mère, ai-je précisé. Elle est dépressive.
– Je peux aussi vous conseiller le macérât de figuier. Il équilibre le système nerveux et lutte contre les états dépressifs.
– Oui, très bien. Ça lui changera un peu de ses médicaments.
– Oh, elle prend des médicaments ? Vous savez, j'ai un diplôme en pharmacie. Mais j'ai préféré ouvrir une herboristerie. On a trop délaissé les plantes au profit de la chimie, si vous voulez mon avis. Je ne dis pas que la chimie est inutile, mais c'est bien dommage qu'elle soit toujours le premier remède préconisé. Alors que la nature nous offre tellement de ressources. Si je puis donner un conseil à votre mère, ce serait d'aller marcher. Ça a énormément d'effets bénéfiques sur les angoisses et la dépression.
– Elle ne sort jamais de chez elle. Hormis pour faire ses courses.
– Oh, je vois. J'organise des balades guidées. Si jamais ça la tente, Laslo vous donnera tous les renseignements.
– Merci.
– Vous voulez un emballage cadeau ?
– Non merci, ça ira.
Elle m'a remis une petite boite en carton contenant la tisane et le macérât.
– Au plaisir de te revoir, Elsa.
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La théorie des cœurs bunkers - Sous contrat d'édition Hachette Romans
RomanceQuand la douleur est trop brutale, on s'invente un cœur de métal. Elsa ne croit plus en l'Amour. Pour elle, l'amour est une construction sociale, un mirage inventé par notre société. Elle enchaîne les ruptures avec brio, fuyant dès que le garçon com...