– Il faut trouver un thème pour la fête du nouvel an, a annoncé Marine en début de réunion.
Pour une fois, tous les membres du comité étaient réunis. Nous étions une quinzaine ; quelques têtes m'étaient inconnues.
– Je vous laisse une semaine pour y réfléchir. Soyez original et créatif.
– Pourquoi il faut un thème ? a demandé un garçon que je n'avais jamais vu ; sans doute une nouvelle recrue. (Il avait un joli visage et un air très sûr de lui.) Pourquoi on ne se contente pas de louer une salle et de mettre de la musique ? La seule raison pour laquelle les gens vont à ce genre de fête, c'est pour boire et se taper des meufs, non ?
L'expression de Marine s'est figée comme si on venait de l'informer qu'elle était la seule personne sur cette Terre à accorder de l'importance aux jolis décors et aux idées profondes.
– Rappelle-moi ton nom, a-t-elle demandé avec un brin de mépris.
– Trevor.
– Hum, Trevor, a-t-elle répété comme si elle broyait chacune de ces syllabes sous sa mâchoire. Le but d'une fête thématique, c'est que les gens s'en souviennent encore dans vingt ans. C'est pourquoi je veux du jamais-vu !
Mon téléphone a vibré dans ma poche. Je l'ai consulté discrètement. C'était un message d'Irlanda.
Je crois que ton jardinier vient d'arriver. Un élève de madame Henkle vient de glisser ton numéro dans sa poche. Je n'ai pas vu la couleur de ses yeux, mais il a les cheveux noirs.
Il fallait que je m'échappe d'ici au plus vite. Malheureusement Marine n'avait pas terminé et j'étais à peu près certaine que si je claquais la porte maintenant, je n'étais pas prête de revenir dans cette pièce.
– J'ai été convoquée par le doyen, a-t-elle enchaîné avec un soupçon de gravité. Il y a encore eu des plaintes pour attouchements lors de la dernière soirée. Il faut qu'on réfléchisse à ce qu'on pourrait mettre en œuvre pour éviter que ça se reproduise.
Tout le monde est resté muet. Ça paraissait plus facile de trouver un thème dont tout le monde se souviendrait encore dans vingt ans qu'un moyen d'empêcher les mains aux fesses et les gestes déplacés.
– On pourrait supprimer l'alcool, a proposé Louisa, ce qui lui a valu un regard ulcéré de Trevor.
– Ça n'empêchera pas les gens de boire avant de venir, a rétorqué Marine. Et puis on ne peut pas empêcher les gens de faire la fête juste parce que certains ne savent pas se tenir.
J'ai jeté un œil à l'heure sur mon portable. J'avais l'impression que si je ne trouvais pas moi-même une solution, la réunion allait s'éterniser.
– On pourrait faire passer un message dans les haut-parleurs, ai-je suggéré. Pour rappeler les règles de bonne conduite. On pourrait aussi installer un stand où les gens viendraient signaler le moindre dérapage. Ça pourrait avoir un effet dissuasif.
Marine a eu l'air de trouver ma proposition intéressante. Dix minutes plus tard, je mettais enfin le pied dehors. J'étais un peu dépitée de ne pas avoir enfilé une tenue plus aguichante ce matin. J'espérais avoir encore le temps de me changer.
Quand je suis entrée dans l'immeuble, j'ai jeté un œil à la salle. Madame Henkle désignait des mots sur un panneau, attendant que ses élèves y associent le geste approprié. Je ne savais pas exactement combien de minutes il me restait avant la fin du cours, alors j'ai cavalé jusqu'à l'appartement, jeté mon manteau par terre et enfilé une jupe en un temps record comme si je bataillais la finale de Koh Lanta.
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La théorie des cœurs bunkers - Sous contrat d'édition Hachette Romans
RomanceQuand la douleur est trop brutale, on s'invente un cœur de métal. Elsa ne croit plus en l'Amour. Pour elle, l'amour est une construction sociale, un mirage inventé par notre société. Elle enchaîne les ruptures avec brio, fuyant dès que le garçon com...