Chapitre 37 : Interrogatoire

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- Anna -
  
  

Je remonte mes genoux contre ma poitrine, mes talons nus se calent sur la bord de la chaise. Mes bras resserrent mes jambes, dont les tremblements commencent tout juste à se calmer. Je ne sais toujours pas combien de temps je suis restée enfermée sous son emprise.

Je cale mon menton sur mon genou droit et pose mes yeux fatigués sur la femme qui se tient de l'autre côté de la vitre. Sharon est en interrogatoire avec Fury, pendant que je me trouve de l'autre côté de la pièce à l'observer. Je n'arrive même pas à qualifier mes sentiments à son égard, tant de choses se bousculent dans ma tête.

Ce doute ne semble pas habité les deux hommes se tenant dans la même pièce que moi. Sam et Bucky scrute Sharon avec haine et dégoût. Mes yeux passent régulièrement de la blonde paniquée au brun dont la mâchoire se contracte à chaque fois qu'il semble sentir mon regard sur lui.

J'essaye tant bien que mal de gérer une chose à la fois, par peur que mon cerveau disjoncte pour de bon. Mais je suis tiraillée, brisée par un tout autre sujet, autre que celui sur lequel je devrais me concentrer. C'est-à-dire comprendre le pourquoi du comment des actions de l'ancienne agente. Mais comment pourrais-je porter ma pleine attention sur cet interrogatoire, alors que je me trouve dans la même pièce que l'assassin de mes parents, dont j'ai découvert l'identité il y a à peine deux heures ?

J'aurai préféré m'étouffer, me noyer, me faire renverser par une voiture, j'aurai préféré mourir ou partir à l'autre bout du monde que d'entendre cette vérité, puis me retrouver enfermée avec lui, dans une pièce beaucoup trop petite pour contenir toutes mes émotions. Mais si j'ai appris une chose au cours de ces dernières années, c'est bien qu'on a rarement le choix.

C'est le protocole. Garder l'agresseur et la victime, pour pouvoir les interroger tous les deux. Mon interrogatoire s'est clôturé en moins de dix minutes. Qui a-t-il à dire quand on s'est fait enlevée puis séquestrée comme monnaie d'échange ? Sans en connaître la raison jusqu'à maintenant ? Sans avoir converser plus de cinq minutes au maximum avec son agresseur ? Pas grand chose.

Fury a donc accepté de me relâcher au bout de dix interminables minutes, malgré sa frustration et son agacement, durant lesquelles mes tremblements n'ont pas arrêté. J'espère au moins que le supplice de la situation fût partagé par l'homme de l'autre côté de la vitre.

Me voici donc terrée dans le coin de la pièce, recroquevillée sur moi-même, obligée à entendre les aveux de mon agresseur, aux côtés même de l'agresseur -ou plutôt meurtrier- de mes parents. J'ai maintenant compris que Fury a une aspiration particulière pour la vengeance et le supplice.

La voix dans ma tête s'arrête quand j'entends les murmures du faucon, qui a les bras croisés et une main jouant avec sa bouche.

Sam - Qu'est-ce qui a bien pu se passer pour qu'elle en arrive là ? 

Le soldat ne répond pas et reste impassible. Je remarque aux mouvements de ses tempes qu'il est aussi tiraillé que moi, essayant tant bien que mal de garder ses yeux fixés de l'autre côté du miroir sans tain.

Sam - Et tu as bien dis qu'elle a perdu un enfant ? Je crois qu'on est loin de s'imaginer ce qu'elle a traversé ces dernières années. Tu... tu penses que c'était l'enfant de...

Bucky - Ferme là !

Il soupire, passe ses mains sur son visage, puis recule jusqu'à se laisser tomber sur la chaise posée au pied du mur. C'est à ce moment là qu'il tourne son visage vers moi, pour plonger ses yeux rouges et humides dans les miens. A la vue du bleu de ses iris, dont la sombreur n'a jamais été aussi déstabilisante, mon rythme cardiaque s'emballe.

Please don't touch me / Bucky BarnesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant