Chapitre 5

80 11 2
                                    

Alice courait déjà vers Arkos. Quelle poisse j'avais... Bon. Autant l'accompagner, pour éviter qu'Arkos fasse une bêtise... Mais le connaissant, ça risquait fort d'arriver.

Je rejoignis Alice en croisant les doigts et suivit leur conversation.

- Salut ! fit Alice.

- ...Salut.

Bien. Au moins, il ne l'encourageait pas.

- T'es pas bavard, toi, hein... Sinon, ça va ? Tu t'adaptes ?

- Ben oui.

- T'as une copine ?

Et voilà. Je n'arrivais pas à comprendre comment elle pouvait être aussi directe sans en être gênée. Cette fille n'était pas possible.

Je fixai Arkos d'un regard qui signifiait : "Fais attention à ce que tu vas répondre..."

- Ça ne te regarde pas, répliqua-t-il.

Il jouait sur la prudence. Pas bête.

- Alleeeeez ! Tu peux tout me dire !

- Je ne te connais pas...

- Mais ça peut s'arranger !

- Non, ça ira, merci...

- Ouh... Toi tu aimes une fille, mais tu ne sais pas si elle t'aime, hein ?

Elle jouait les psychologues. Elle adorait faire ça. Et le pire, dans tout ça, c'était que la plupart du temps, elle avait raison.

Il était temps pour moi d'agir. Pas de la façon la plus discrète, mais bon...

- Regarde, Alice ! Max a enlevé son T-shirt ! m'écriai-je.

Max était un garçon de ma classe. Le genre de mec que les filles apprécient, sympa et joli garçon. Dommage qu'il drague toutes les filles qu'il rencontrait...

Alice se retourna aussitôt.

- Quoi ?! Où ça ?!

Tandis qu'elle cherchait Max du regard, je fis signe à Arkos de s'éloigner. Il obéit à la seconde et courut se fondre dans la foule.

- Ah ah ah... fit Alice. Très drôle.

- Désolée, je me suis trompée, c'était Lucas, pas Max...

- Mais comment t'as pu les confondre, sérieux ? C'est malin, grâce à toi il est parti maintenant...

Ce que j'aimais par-dessus tout chez elle, c'était qu'elle pouvait pardonner n'importe quoi. Une vraie sainte, sur ce point.

Il était vraiment temps d'aller en cours, et nous continuâmes à parler tout en marchant.

Je changeai de sujet.

- Et sinon, Mélanie ? Elle t'en veut toujours ?

Elle se rembrunit.

- Ouais... Mais comment je pouvais savoir que c'était son mec, moi ?

- C'est vrai qu'ils ne sont pas très démonstratifs... Ça t'apprendra à flirter tout le temps !

- Toi aussi, tu t'y mets ? Dis que j'ai un coeur d'artichaut, tant que tu y es !

- Heu... Comment te dire...

- Ça va, j'ai compris ! J'arrête de draguer un mec par jour !

Quoi ? Incroyable. Mais arriverait-elle vraiment à suivre cette résolution ?

- J'en draguerai un par semaine ! s'exclama-t-elle.

... Ah. Je savais bien qu'il y avait un piège...

- C'est déjà pas mal pour un début, affirmai-je.

Nous allâmes en cours et la matinée se déroula sans autre incident.

À l'heure du déjeuner, je mangeai en tête à tête avec Alice, c'était vraiment très pratique pour se parler de petits secrets. Il semblait bien que j'étais sa confidente attitrée, et ça n'était pas pour me déplaire. Avec elle, je me sentais normale. À ma place. Et c'était agréable, comme sensation.

Du coin de l'œil, j'observai Arkos manger. Il s'était trouvé un compagnon de table, Karim, un garçon de ma classe. Ce dernier était très petit pour son âge, cela le complexait beaucoup, mais il était d'une gentillesse absolue et son visage traduisait clairement sa personnalité : Des cheveux noirs, le teint hâlé, et des yeux d'un brun qui semblait noir, pourvus de longs cils qui lui donnaient un air doux unique. En fait, la plupart des filles le voyaient comme leur meilleur ami ou bien leur petit frère, parce qu'il était littéralement mignon, c'est-à-dire que quand on le voyait, on avait envie de lui faire un câlin.

Je détournai mon regard de leur table pour écouter Alice raconter ses bagarres avec son grand frère.

- Il est trop jaloux, je te jure ! Il me pompe l'air !

- Oui, enfin, c'est un grand frère, quoi...

- Je drague et lui, hop, direct, il envoie balader un mec que j'avais mis une heure à intéresser !

- Peut-être qu'il en a marre que tu ramène un garçon différent à chaque fois chez vous...

- Même ! C'est pas ses affaires !

Je soupirai et laissai tomber. De toute façon, elle ne m'écoutait jamais quand elle était énervée. Il suffisait de lui laisser le temps de se calmer pour lui faire entendre raison.

Elle continua à maudire son frère pendant tout le reste du repas jusqu'à ce qu'un surveillant nous demande de sortir.

Une fois dehors, nous nous assîmes sur un banc pour attendre tranquillement l'heure d'aller en cours.

Malheureusement, rien de tel ne se passa. La cour retentit soudain des cris des élèves qui coururent se réfugier sous le préau. Je vis Alice ouvrir de grands yeux apeurés tandis que le groupe de 4D atterrissait à quelques dizaines de mètres de l'endroit où nous nous trouvions.

Comment avais-je pu ne pas les sentir arriver ? Arkos avait raison, j'étais bel et bien rouillée. Ils étaient nombreux. Vingt-deux, pour être exact.

Qu'était-ce qu'un 4D ?

C'était simple, c'était un monstre mesurant entre 1m20 et 1m40. Si son nom vous paraît bizarre, c'est parce que l'on se refusait à nommer une telle créature. La lettre indiquait la puissance de la bête, et le nombre son agressivité. Plus la lettre était proche de A, plus le monstre était faible. Plus le nombre se rapprochait de 100, plus le monstre tenterait de vous tuer. Il existait énormément de monstres différents : ils se déclinaient du 0A au 100Z.

Chaque sorte de créature avait une apparence différente. Un 4D était une espèce de gros reptile avec des pattes plutôt longues et des dents pointues.

Seul, il n'était pas difficile à tuer mais il avait un fort esprit d'équipe, ce qui faisait que quand on en affrontait un, il était toujours accompagné de deux ou trois partenaires. Mais vingt-deux... C'était la première fois que je voyais ça.

Mais j'allais devoir faire avec, car sinon ce groupe aurait tôt fait de massacrer toutes les individus présents. Donc, je devais laisser tomber ma couverture et protéger plus de trois cent personnes. Moi qui commençais juste à m'habituer à cette vie...

Mais tant pis. J'attrapai Alice, l'emmenai loin du groupe et lui ordonnait de ne pas bouger. Ce fut inutile, car elle semblait sur le point de s'évanouir et ferma les yeux en tremblant dès que je m'éloignai.

Il était temps de retirer le sceau qui retenait mes capacités et mon apparence. Je remontai la manche gauche de mon gilet, laissant apparaître un tatouage en forme de chaîne entourant mon poignet et prononçai la formule.

- Libération du sceau !

J'avais dit ces mots en lamien, une langue servant aux invocations et aux conjurations du mauvais sort.

Aussitôt, je sentis mon énergie refoulée déferler en moi, telle une tempête.

Lumière de nuitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant