Chapitre 31

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La vie loin de tout commença à s'établir dans une tranquille nonchalance. Les rôles furent rapidement distribués.
J'avais envoyé Éric et Éva en chasse. Le gibier était facile à débusquer pour des fauves tels qu'eux.
Comme ils pouvaient faire voler les matériaux grâce à leurs pouvoirs, Cindy et Aurélien nous fabriquèrent une sorte de cabane. J'étais curieuse d'en voir le résultat final. Max les aidait en amenant les matériaux sur place.
Karim devait aller chercher de l'eau avec Caroline.

Alice, à qui je n'avais confié aucune tâche, se sentit démunie.
- Mino, tu n'as rien à me donner ? me demanda-t-elle.
Je fis mine de réfléchir, puis je lui répondis :
- Tu pourrais nous accompagner, moi et Arkos...
Son visage s'illumina :
- C'est vrai ?
- Bien sûr !
- Mais... On va où ? demanda-t-elle.
- Ah ça... Mystère... marmonna Arkos.
- Mais qu'est-ce que t'as à râler, toi ? m'exclamai-je.
- Rien, rien... répondit-il. C'est juste qu'on a aucune piste.

Devant la tête d'incompréhension d'Alice, je lui expliquai :
- On va chercher le lieu dont nous ont parlé les loups.
- Ah, d'accord ! s'exclama-t-elle. Mais ça va faire loin, non ?
- On en aura peut-être pour plusieurs jours, mais si au bout d'une semaine, on n'a rien trouvé, on revient ! la rassurai-je.
- Et les autres, ils sont au courant ? demanda-t-elle.
- Tout le monde est prévenu, répondit Arkos. Pour les vivres, on chassera en route.
- On part maintenant, déclarai-je.
- Tout de suite ?! s'affola Alice.
- Oui, répliquai-je. Allez, en route !
- Tu veux toujours venir, Alice ? demanda Arkos, malicieux.

Celle-ci sembla hésiter.

- Heu... Je pourrais pas aider à la chasse, plutôt ?
- Si tu veux, oui, répondis-je en riant. On ira tous seuls !

Après avoir dit au revoir à tout le monde, nous prîmes la route. Je fis confiance à Arkos pour retrouver la piste.

- Putain... Ton odeur est tellement forte que je n'arrive pas à voir s'il y en a des plus faibles !
- Mets-toi en Loup, ça ira mieux...
- D'accord... soupira-t-il. Mais tu viens sur moi alors.
- Pas sûr que ça t'aide, mais si tu veux...

Il se transforma et attendit que je monte sur son dos, ce que je fis sans plus tarder. Il huma l'air, puis, dans un jappement joyeux, il s'élança à la poursuite d'une odeur imperceptible pour moi. Quel bout-en-train...

Pendant une heure environ, il courut ainsi à travers les arbres. Puis il s'arrêta brusquement, et faillit en passant me faire passer par dessus-bord.

- Arkos ! râlai-je. Fais un peu attention !

Il me fit signe de descendre. J'obéis, puis il reprit sa forme humaine.

- Qu'y-a-t-il ? demandai-je. Tu as perdu la piste ?
- Non, au contraire, elle est de plus en plus forte. On n'est pas près de se paumer. Même toi tu devrais sentir quelque chose !
- Pourquoi tu t'es arrêté, alors ?!
- J'avais envie d'une pause... T'es lourde.

Je ne répondis rien, faisant mine d'être vexée. Il s'assit à côté de moi.

- On repart ? demandai-je au bout d'un long silence.
- Si tu veux... soupira-t-il.

Il se retransforma en Loup, et l'heure qui suivit fut alourdie d'un silence de plomb. Il me faisait la tête, ou quoi ?

- Tu boudes ? lui demandai-je.
Il grogna.
- Pourtant c'est moi qui devrais bouder. Tu m'as dit que j'étais lourde, continuai-je avec un sourire.

J'eus la vague impression qu'il riait, mais on n'est jamais sûr de rien avec un loup.

- Hey, mais... Tu serais pas en train de te moquer de moi, là ?
Il secoua la tête, mais ses yeux parlaient pour lui. Et dire que j'avais cru qu'il était mécontent...

Il s'arrêta de nouveau brusquement, mais cette fois, ça ne loupa pas, je bascula au-dessus de lui dans un cri de surprise et ne dus qu'à mon sens de l'équilibre aiguisé d'atterrir accroupie.

- Arkos ! hurlai-je alors qu'il se transformait.
- Chuuut... me répondit celui-ci en réprimant son envie de rire. Tu vas faire fuir le gibier.
- La prochaine fois que tu me fais un truc de ce genre, ce sera toi, le gibier...

Il redevint sérieux.

- Sans rire, reprit-il, on n'est pas loin, maintenant. Tu devrais ressentir quelque chose, non ?

Je ferai les yeux. En effet, je sentis à nquelques centaines de mètres une énergie à la fois familière et inconnue.

- Tu as raison, répondis-je en ouvrant les yeux. On est tout près.
- Du coup, je pensais qu'on pourrait faire le reste à pied, histoire de reposer mon dos de ton poids écrasant.
- Toi aussi tu es lourd, tu sais... Mais dans un autre sens.
- Ça veut dire oui ?
- J'ai pas vraiment le choix, c'est toi ma monture.

Il sourit et s'élança vers le lieu tant recherché en courant. Je le suivis sans trop de mal, bien que je ne vois pas trop son intérêt là-dedans s'il voulait se reposer.

La sensation familière était de plus en plus forte. J'avais l'impression qu'un lien invisible me tirait en avant, comme si j'étais reliée depuis toujours à cet endroit et que j'étais destinée à y mettre les pieds. Je finis par dépasser Arkos, n'ayant plus besoin de me référer à lui pour trouver la piste. Il resta cependant à côté de moi, et me regarda avec un drôle d'air.

- Quoi ? lui demandai-je. J'ai trois yeux ?
- Non... fit-il. Tu brilles !
- Très drôle...
- C'est pas une blague ! Tu brilles vraiment !

Je regardai mes mains, dubitative, avant de m'apercevoir qu'il avait raison. Une sorte de lumière blanche m'entourait. Elle était très belle, très pure. Ce lieu avait décidément beaucoup de mystères à nous dévoiler.

J'entendis au fond de moi une toute petite voix. Elle gémissait de douleur. Zwei ?
Apparemment, l'endroit ne réussissait pas à tout le monde...

Le feuillage touffu disparut soudain et nous révéla enfin l'objet de nos recherches.

Lumière de nuitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant