Chapitre 27

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Juste là, accrochée à la poignée, pendouille une tête de Barbie. Elle a un carré brun et une frange, des traits d'eyeliner grossièrement dessinés avec un stylo bic et du marqueur rouge en guise de rouge à lèvre. Son minuscule cou est barbouillé de rouge, une substance liquide qui a goutté sur la vitre de la porte. Une imitation de sang, donc - et une tête décapitée à mon effigie.

– C'est peut-être juste une coïncidence, tenté-je en frôlant le jouet macabre du bout de mes doigts.

D'un geste brusque, Oliver décroche la poupée de la poignée en tirant sur la ficelle mince qui l'y reliait. Il secoue la tête.

– Appelle Elio et Gaby et demande leur de nous rejoindre à la porte.

– Oliver...

– Fais-le, Vinny.

Son ton est catégorique. Il ne me regarde pas. Les yeux fixés sur la tête de barbie entre ses mains, il a les mâchoires serrées et les yeux aussi noirs et secs que le bitume sous nos pieds. Après un dernier coup d'œil à la minuscule tête, je dégaine mon téléphone.

Gabriel et Elio sont devant mon immeuble une dizaine de minutes plus tard.

– Qu'est-ce que c'est que cette merde? s'exclame Gabriel en prenant la tête en plastique des mains d'Oliver.

Le visage d'Elio se tord en une grimace de dégoût.

– C'est dégueulasse.

Gabriel place le bout de poupée à hauteur d'yeux, les sourcils froncés.

– C'est toi?

Je hausse les épaules.

– Apparemment. Mais c'est peut-être juste une coïncidence.

Oliver a un petit rire froid et désabusé.

– Une tête de poupée décapitée avec ta coupe et ton maquillage, accrochée à la porte de ton immeuble?

Je m'humecte les lèvres, sans répondre.

– C'est vrai que ce serait un sacré hasard, commente Gaby.

– Ça va pas le faire, souffle Elio en fronçant les sourcils.

Oliver approuve d'un petit hochement de tête.

– Il va falloir commencer à discuter sérieusement de toutes les choses alarmantes qui t'arrivent en ce moment, affirme-t-il.

Gaby et Elio acquiescent simultanément.

– On peut monter cinq minutes pour en discuter? Mes couilles sont en train de geler.

– Elio! s'exclame Gaby en le bousculant d'un coup d'épaule.

– Les miennes aussi.

Il me fait les gros yeux.

– Vinny!

Je lui fais un grand sourire en sortant mes clefs de la poche arrière de mon jean.

– Venez, leur intimé-je en ouvrant la porte. Évitez simplement de faire trop de bruit, mes frères dorment.

Ils hochent tous les trois la tête et nous pénétrons à l'intérieur de mon immeuble. Nous nous retrouvons dans ma petite chambre. Eli et Gaby sont assis en tailleur sur mon lit, moi affalée sur ma chaise de bureau et Oliver adossé à mon armoire. J'attarde mon regard une minute de trop sur sa grande silhouette. Ça me fait bizarre, de le voir ici. J'ai l'impression qu'il est trop grand pour la pièce. Je ne pensais pas qu'il remettrait les pieds chez moi un jour. Pourtant, il donne cette impression étrange d'avoir toujours fait partie du décor.

Les touches noiresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant