LE SECRET D'EREBOR

chapitre 3: Erebor

Au coeur même de la montagne solitaire, Balin faisait les cent pas dans son logis. Cela faisait plusieurs semaines que son frère et sa fille avaient quittés le domicile et qu'il était sans nouvelles. D'habitude ils ne partaient pas aussi longtemps. Mais que faisaient-ils donc? Et où étaient-ils?

A la seule lumière du feu qui crépitait dans l'âtre, il pestait contre sa fille qui ne faisait aucun effort pour se comporter comme une Naine respectable, il maudissait son frère qui se montrait trop permissif envers sa nièce, et pour parfaire le tout, il se maudissait lui-même de ne pas être assez sévère envers son unique enfant qui, décidément, ne lui causait que soucis et angoisses.

C'est sur ses réflexions que Dwalin et Inwë arrivèrent au logis, aussi crasseux et puant que pouvait l'être deux Nains qui étaient partis à l'aventure pendant des jours et des jours sans prendre le temps de chercher un étang pour se baigner.

-" Mais où étiez-vous passés? dit-il avec une voix dont l'intonation trahissait l'anxiété. Et toi ma fille regarde-toi! Dans quel état es-tu? C'est indigne pour une Naine de haut rang comme toi! Parfaitement indigne! Un de ces jours tu me feras mourir d'inquiétude!"

Inwë vit bien qu'elle avait fait peur à son père, mais l'heure n'était ni aux excuses ni aux sermons selon elle. Malgré tout, comme elle l'aimait, elle le prit dans ses bras, l'embrassa et, avec toute la douceur dont elle était capable, ce qui était peu de chose, lui parla:

-" Notre absence était nécessaire père. Nous devons absolument voir le roi, et en urgence. Nous avons des nouvelles inquiétantes à lui transmettre!"

Balin soupira. Comme à son habitude, elle n'exprimait ni excuses ni regrets.

-" Va d'abord te laver!" Maugréa t-il. -" Tu pues autant qu'un tanneur de peau! Hors de question pour moi de te présenter au roi dans cet état, j'y perdrais la face. Et avant de décider quoi que ce soit, laisse-moi parler avec ton oncle Dwalin. On ne dérange pas le roi impunément, et c'est à moi de juger si les nouvelles que vous donnez méritent une audience."

Inwë allait répliquer mais elle vit vite que lutter contre l'autorité paternelle lui ferait perdre du temps. Elle préféra donc se taire, obéïr et passa dans la pièce à côté.

Une écuelle d'eau claire l'attendait sur le buffet. Elle se déshabilla et se décrassa du mieux qu'elle put avec le petit savon qui glissait dés qu'elle tentait de s'en emparer. Balin les fabriquait lui-même avec de la cendre et des herbes odorantes. Celui-ci sentait bon le chèvrefeuille, mais Inwë trouvait même le moyen de pester contre cette odeur délicate. Elle préférait l'odeur des champignons dans la forêt en automne, ou celle de la mousse après la pluie.

Dans un élan d'orgueil digne d'elle, elle remis sa tenue de guerrière crasseuse et ses bottes en peau de Wargs. Après tout, que lui importait d'être présentable aux yeux du roi et de sa cour, ainsi qu'aux jeunes damoiselles de la noblesse Naine, si ces dernières étaient présentes en scéances de doléance. Elle venait de tuer quatre Orcs, elle estimait qu'elle n'avait rien à prouver à ce lot de paresseuses qui passaient leurs journées à tresser leurs barbes et à lancer des regards énamourés en direction du jeune prince Thorin qui, à présent, était en âge de se marier.

-" Tu aurais au moins pu te coiffer!" lui dit son père une fois qu'elle fût dans la pièce principale du logis. Elle allait répliquer vertement quand elle vit le visage de son père.

Les révélations de Dwalin l'avaient plongé dans un profond désarroi. Ses yeux étaient maintenant fixés sur la tête décomposée de l'Orc et sur la hache en fer noir rapporté de la Moria.

Dwalin s'éclipsa à son tour pour aller se décrasser. Père et fille restèrent ainsi silencieux.

-" C'est fâcheux!" finit par murmurer Balin.

-" Les Orcs et les Wargs sont nombreux, mais nous les surpassons encore." dit Inwë. -"Si nous attaquons rapidement, ils nous faudra à peine une journée pour faire place nette."

-"Je te trouve bien sûr de toi ma fille." dit Balin avec un maigre sourire. -" La Moria a été abandonnée il y a bien des lunes de cela, quel intérêt à vouloir y faire place nette à présent? C'est une cité perdue."

-" C'est une cité de Nains, bâti par eux, pour eux!" dit Inwë, déterminée. -" Cela me rend malade qu'une vermine Orcs en foulent son sol avec leurs pieds puants."

-" S'il n'y avait que les Orcs dans cette cité, ma fille. Mais tu oublies l'ombre et la flamme qui y dort dans son coeur."

L'évocation du Balrog qui avait, il y a longtemps déjà, chassés les nains de leur demeure fît frémir un instant Inwë.

-" Père." dit-elle doucement. -" Grâce à toi, j'ai grandi en connaissant tous les contes de Khazad-dum. Tu m'as raconté toute sa grandeur, toute sa beauté, ses vastes et magnifiques salles qui jouxtaient les mines, son Mithril coulant presque de sa roche. Tu aurais dû en être le seigneur, de par ta lignée. Le fléau de Durin t'en a privé, cela est injuste. Je te promets qu'un jour tu en seras enfin le maître."

-"Méfie-toi de ce genre de promesse." Dit Balin, pessimiste. -" Et puis qui te dit que j'en ai envie? Je préfère rester conseiller royal et en sécurité à Erebor que roi craignant pour ma vie dans la Moria."

Dwalin sortit enfin de la pièce. Lui aussi avait meilleur mine, mais comme sa nièce, il avait remis sa tenue de guerrier crasseuse. Balin soupira longuement à la vue de son indécrottable famille.

-"Allez suivez-moi tous les deux." finit-il par dire. -" Bien que je doute qu'il faille absolument envoyer une armée sur le champs, il faut néanmoins avertir le roi de ce qui se trame dans les monts brumeux. A lui de décider ce qu'il convient de faire."

Il quittèrent le logis en direction de la salle du trône.

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N.D.A:

Khazad-Dum est le nom en khuzdul ( langue des Nains) de la Moria.