Chapitre 16

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CHAPITRE XVI

Clara

Allongée sur mon lit, je ne cesse de repenser à la merveilleuse journée que je viens de passer. Elle avait très mal commencé, mais me retrouver dans l'appartement de Jessy était finalement la meilleure chose qui puisse m'arriver. Alors que n'importe qui aurait probablement abusé de mon état d'ébriété plus qu'avancé, elle a eu le respect de ne pas me toucher, et encore mieux, de me laisser dormir dans son propre lit et de s'exiler sur le canapé. L'échange que nous avons eu sur la plage était des plus intéressants et j'avoue mieux comprendre pourquoi Jessy répond toujours au doigt et à l'œil à Jensen. C'est son père, tout simplement. Elle parlait de son histoire avec tellement de sincérité que la culpabilité m'a envahie lorsque je lui ai menti sur mon parcours et mes études, même si je ne me suis pas tant éloignée de la réalité.

Je passe en revue les photos que j'ai prises de Jessy à la plage. Mon plan a fonctionné à merveille, il a même trop bien fonctionné pour ainsi dire. À trop vouloir me rapprocher d'elle, j'ai totalement craqué pour cette fille. Et pour ne rien arranger, elle est photogénique. Je continue de faire défiler les images jusqu'à ce que je tombe sur celle de nous deux et je suis incapable de bouger. Elle est sublime et le vent qui s'engouffrait dans ses cheveux faisait parvenir son parfum jusqu'à mes narines. Alors que je devais sentir la transpiration à plein nez après ma folle course pour retrouver Jack, elle sentait merveilleusement bon. C'est peut-être pour cette raison qu'elle est partie sans m'embrasser, ce soir. J'étais pourtant persuadée qu'elle allait le faire, je n'attendais que ça, même si je ne devrais pas. J'ai beau sans cesse me répéter que cet emploi est temporaire et que je retournerai bientôt travailler pour un grand journal national, auprès d'elle, mes objectifs s'envolent. Travailler au casino est ma seule façon d'être proche de Jessy et plus les jours passent, plus j'ai l'impression que j'ai besoin de sa présence à mes côtés. Merde, j'ai vraiment craqué pour elle, c'est certain.

Je me redresse d'un bond, remerciant le vacarme qui provient du salon de me sortir de mes pensées. La porte de ma chambre grince et je tousse dès que je passe la tête. Zack et ses invités sont encore en train de faire une soirée et un nuage de fumée plane dans l'appartement. J'ouvre la fenêtre pour aérer en invectivant la loque avachie dans le canapé :

— Zack, putain, ouvre la fenêtre quand vous fumez vos joints !

— Eh doucement, ma mignonne, me répond une voix que je ne connais pas.

Je me tourne vers lui et lui adresse mon regard le plus sévère.

— Toi, tu la fermes, on est chez moi, ici.

Il se lève et s'avance vers moi. Ses yeux sont rouges et ses pupilles totalement dilatées. Je doute même qu'il soit capable de me voir de façon nette et précise. Je me rapproche de lui, bien décidée à lui faire fermer son clapet irrespectueux. Il va voir si je suis mignonne. Je n'ai pas le temps de réagir que Zack se redresse et lui ordonne :

— Fous-lui la paix, Lorenzo. C'est bon, elle veut ouvrir la fenêtre, on ouvre la fenêtre.

La conversation que j'ai eue avec Jessy au bord de la plage me revient en mémoire en un éclair. Si elle a dû retourner au casino ce matin, c'est parce qu'elle a découvert que Lorenzo, le copain de Maddy y vient blanchir l'argent de son trafic de drogues.

— Tu es le petit copain de Maddy ? lui demandé-je.

— Qu'est-ce que ça peut te foutre ?

Je prends ça pour un oui. Je reste immobile, des centaines de questions se bousculant à toute allure dans ma tête. Qu'est-ce que je fais ? Je n'ai pas le temps de réfléchir davantage lorsque je le sens poser ses mains fermes autour de mes épaules et me secouer. Je me débats, tente de le repousser, mais il est bien plus fort que moi. À ma grande surprise, Zack prend ma défense et agrippe le col de sa veste avant de le projeter contre la porte d'entrée. Un échange de coups de poing éclate et je pianote rapidement sur mon téléphone pour trouver le numéro du casino. Si Jessy a eu mon numéro de cette manière, je devrais pouvoir en faire de même. Je relève la tête avant de valider l'appel et j'aperçois l'un des invités de Zack se joindre à la bataille. Je ne saurai même pas dire contre qui il se bat vu l'approximation de ses coups. Les trois corps se confrontent dans un combat sans merci et je vois la porte en bois s'affaisser, à chaque impact un peu plus. Je supplie Zack d'arrêter lorsque je le vois armer son poing, mais il ne m'écoute pas et sa main termine dans la porte qui cède. Les trois hommes tombent à la renverse et mon corps se raidit d'un coup, surpris d'entendre une femme hurler dans le couloir. Je me précipite vers la cage d'escalier, mais n'aperçois qu'un paquet écrasé au sol. Me demandant un instant si je n'avais pas rêvé, j'aide Zack à se relever. Du sang s'écoule de son nez et je le gratifie d'une claque sur la joue avant de le remercier d'avoir pris ma défense. C'est peut-être une loque, mais il me protégera toujours, il vient de me le prouver. Je détourne le regard lorsque j'entends des cris provenir des escaliers. J'avance d'un pas et réalise que Lorenzo a atterri à l'étage inférieur. J'enjambe le corps de l'ami de Zack qui peine à se redresser et descends les marches trois par trois. Dans la pénombre, je n'arrive pas à dissocier les acteurs de cette bagarre, mais il est clair que l'un des deux a le dessus.

L'infiltrée (FxF)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant