Chapitre 30

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CHAPITRE XXX

Clara

Je suis allongée sur mon lit, incapable de fermer l'œil. Cela fait bientôt quarante heures que je n'ai pas eu de nouvelles de Jessy, et je ne sais plus quoi faire, j'ai épuisé toutes mes solutions. Quand j'ai emprunté l'ascenseur doré pour me rendre à l'étage qui m'est interdit, j'étais tellement sûre de moi que je pensais que rien ne pouvait m'arrêter, mais je me suis retrouvée nez à nez avec un homme qui devait mesurer au moins deux mètres et j'ai été pétrifiée. J'ai grommelé des excuses en prétextant que je venais d'être embauchée et heureusement, il m'a laissé m'en aller. Je n'avais jamais vu cet homme et, à la réflexion, je me demande bien pourquoi monsieur Jensen peut avoir besoin d'un garde du corps de cet acabit. Plus les jours passent, plus je réalise qu'il y a une énorme part d'ombre autour de ce casino. Quand j'y pense, des frissons parcourent mon corps.

Je suis allée chez Jessy, hier. J'entendais Jack aboyer à travers la porte, mais aucun autre son ne retentissait et, évidemment, je n'ai pas les clefs de l'appartement. J'ai bien été tentée de demander aux voisins, mais la connaissant, je doute qu'elle soit le genre de personne à laisser un trousseau à des inconnus. J'ai téléphoné à Maddy, mais l'appel est resté sans réponse. J'imagine qu'elle a dû trouver un homme avec qui partager sa nuit, comme elle l'avait prévu. J'espère vraiment qu'il ne s'agit pas de Matt, parce que le regard vicieux qu'il a posé sur moi était des plus déplaisants. En étant honnête, je dois admettre que la situation s'y prêtait, j'aurai probablement réagi de la même manière que lui en tombant sur un couple en train de se donner du plaisir dans un ascenseur supposé n'être utilisé par personne. Je lève les yeux au ciel, me voilà en train de lui trouver des excuses.

Je ne cesse de repenser au vieillard rusé que j'ai rencontré à la soirée dansante. Si seulement j'avais un moyen de trouver son adresse, il serait peut-être en mesure de m'aider. D'un bond, je me redresse, comme frappée par une illumination, et j'appelle Steven. S'il a une radio de la police, il doit bien avoir des amis qui y travaillent. Je pousse un soupire lorsqu'il répond. Il me raconte sa vie, mais je n'en ai que faire et je m'excuse de mon manque de politesse puis lui expose la raison de mon appel. Il rit comme un déluré et m'informe qu'il va se renseigner. Je le remercie une dizaine de fois, je pense, et raccroche.

Les minutes défilent, mais je n'ai toujours pas bougé. Mes jambes tressautent d'elles-mêmes, aussi impatientes que mon esprit. Lorsque j'entends la sonnerie retentir, je me jette sur mon téléphone. Je bondis hors du lit, attrapant le premier morceau de papier que je croise pour griffonner l'adresse que Steven me donne. Je lui promets de le remercier en l'invitant à déjeuner et il rit comme un enfant, m'obligeant à lui présenter Jessy de manière officielle. Je souris, en espérant de tout mon cœur qu'il existe toujours une Jessy à lui présenter. Sentant la panique m'envahir, je raccroche. Jensen n'aurait tout de même pas fait ça. Je me remémore les mots de Matt m'informant qu'il a besoin d'elle, mais ça ne me rassure pas autant que ça le devrait. Je traverse le salon en attrapant mon sac à main au passage et descends les escaliers pour me rendre le plus vite possible à l'arrêt de bus.

Je dois marcher de longues minutes après être descendue du car pour rejoindre la rue dans laquelle habite monsieur Davidson. Je ne sais pas où donner de la tête. Ce quartier est le plus chic de San Diego et les demeures sont plus belles les unes que les autres. J'en avais entendu parler, mais je n'étais jamais venue. Je ne suis pas issue d'un milieu aisé, ce monde m'est totalement inconnu. Mes parents n'étaient pas non plus dans le besoin, nous avions de quoi vivre et nous avons été heureux, mais nous étions bien loin de pouvoir habiter dans de pareilles bâtisses. Je m'arrête devant une propriété, incapable de détourner le regard des énormes baies vitrées qui doivent refléter la lumière comme le vitrail d'une église. L'un des parements est en bois gris et ajoute du charme à la devanture en crépis marron. Je continue ma route et croise une femme habillée avec raffinement. Son chignon est impeccablement coiffé et ses lunettes de soleil proviennent d'une grande marque. Je la regarde promener son chien, et admire la semelle rouge de ses talons, éprise d'un sentiment intense de jalousie, je l'admets.

L'infiltrée (FxF)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant