XXI. DECODE

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La nouvelle que la deuxième jumelle était aussi plongée dans le coma eut l'effet d'une bombe dévastatrice sur les parents et les amis de Kylliane et Nolwenn.

A son arrivée à l'hôpital, Kylliane n'avait pas reprit connaissance mais ses fonctions vitales étaient toujours en bon état de fonctionnement.
Après avoir écarté la prise de substances et les causes physiques habituelles, les médecins se penchèrent sur les possibles causes psychiques.

Il n'y avait aucune raison médicale pour que Kylliane soit dans le coma, son cerveau fonctionnait même à plein régime. Elle dût passer un nombre démesuré d'examens qui ne se montrèrent pas concluants.

- Il faut faire venir le docteur Chang, elle pourrait peut être nous éclairer sur ce qui cause son coma, suggéra le professeur qui s'occupait des deux adolescentes.

- Non, ça fait des mois que Kylliane ne l'a pas vue.  Ça ne servirait à rien du tout. Faites tous les examens qu'il faudra mais réveillez la !

Le professeur évoqua les multiples examens, jugés inutiles, qui avaient déjà été pratiqués. Ils ne pouvaient rien faire de plus, au stade où ils en étaient. Il fallait l'avis de sa psychiatre.

Dévastés, comme pris au piège, M et Mme Sweet durent se faire une raison. Ils acceptèrent que le docteur Chang aide l'équipe médicale à comprendre ce qui causait ce coma inexplicable.
On plaça les deux adolescentes dans la même chambre et leurs parents prièrent de tout leur cœur de sortir de ce cauchemar qui semblait n'en pas finir.

***

Lorsque le docteur Chang, psychiatre de renom et médecin de Kylliane depuis des années arriva à l'hôpital, elle prit part à une longue réunion sur le cas de sa patiente avec les parents et médecins qui s'occupaient d'elle.

Ce fut interminable et particulièrement douloureux pour les parents. Mais absolument nécessaire pour comprendre de quoi il en retournait exactement.

- Il est tout à fait possible qu'un choc émotionnel ait provoqué son coma. Son cerveau n'a peut-être pas supporté la pression de ce choc.

- Vous pensez... qu'elle se souvient ? osa demander Mme Sweet. Que ses souvenirs refoulés ont refait surface et que c'est ça qui la maintient dans le coma ?

- C'est une possibilité. Et à mon avis son cerveau s'est mis en "auto défense" pour ne pas avoir à affronter la réalité de ses actes, ainsi que les conséquences qui en résultent.

M et Mme Sweet avaient énormément de mal à encaisser la nouvelle. Comment faire face ? Ils commencèrent à douter de l'efficacité de la ruse qu'ils avaient mis en place depuis le début des événements.

***

Après la réunion, où toutes les causes à effets eurent été étudiées, le docteur Chang entreprit d'aller voir sa patiente afin d'étayer sa théorie. Il fallait aussi qu'elle discute avec toutes les personnes qui avaient pu être en contact avec elle ces derniers mois.

Aussi intéressant que soit le cas de Kylliane, jamais elle n'aurait pensé, après plus de cinq ans de psychanalyse, que les troubles psychiques de sa patiente auraient pu être à ce point dangereux.
Ce qui passait autrefois pour un trouble de la personnalité limite, ressemblait de plus en plus à une personnalité dissociative. C'est bien ce qui inquiétait le docteur Chang. Comment avait-elle pu passer à côté de ça ?

Ses parents avaient beau être dans le déni et vouloir protéger chacune de leurs filles, il fallait se rendre à l'évidence ; la maladie de Kylliane était devenue, depuis bien longtemps, un danger pour les autres et pour elle-même.
Même si elle se réveillait, elle ne pourrait plus vivre comme les adolescents de son âge. À moins d'un traitement réellement adapté à sa condition, elle devrait vivre en institut. Pour sa sécurité. Pour celle des autres.

Elle ne comprenait pas pourquoi ces parents si dévoués à leurs enfants l'avait tenue à l'écart tout ce temps. Pourquoi ils avaient jugé bon de faire les choses à leur manière plutôt que d'aider leur fille à faire face au choc de l'accident de sa sœur.

***

M et Mme Sweet se mirent à parler, pour la première fois, de ce qu'il s'était réellement passé le jour où Nolwenn avait été retrouvée inanimée dans ce vieux manoir.

Ils ne discutèrent que de ce qu'ils savaient, de ce qu'ils avaient déduit. Bien sûr, il y avait encore plusieurs zones d'ombre, mais ils étaient déjà bien trop informés pour continuer à jouer à la politique de l'autruche.
Ils ne pouvaient plus faire semblant. Ils ne pouvaient qu'espérer que tout aille pour le mieux pour chacune de leurs filles et qu'elles n'aient plus aucun souvenir de cet épisode traumatisant.

Pendant ce temps, dans une salle isolée de l'hôpital, de nombreux médecins se penchaient sur les cas des jumelles Sweet. Outre le caractère intéressant de ces comas, il en valait surtout de leur carrière et leur réputation de faire le nécessaire pour résoudre cette énigme médicale.

Tout le monde savait à quel point M Sweet était un excellent avocat, féroce, et il avait déjà sauvé l'hôpital à de nombreuses reprises. S'il engageait des poursuites contre eux, même seulement sous le coup de l'émotion, cela impacterai très négativement l'hôpital.

***

L'officier Pilguez fut informé du nouveau drame qui frappait la famille Sweet lorsqu'il reçu une convocation de l'hôpital pour rencontrer la psychiatre de sa protégée.
Il commençait à se demander dans quelle histoire il avait bien pu mettre les pieds.

COMATOSEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant