Chapitre 11 : Fahrenheit

339 66 526
                                    




VARMANTEUIL –



Un trio de Régulus se tenaient campés devant l'ouverture que Cineád empruntait toujours pour regagner sa piaule. Ils le regardèrent traverser le parking du coin de l'œil, en sirotant leurs cannettes. Depuis son arrivé, l'Aster n'avait jamais vu la Constellation poster de vigiles ailleurs qu'aux accès donnant sur les étages qu'elle se réservait. Les entrées principales du squat Alphecas avaient toujours été libres.

L'hostilité latente que dégageaient les trois Régulus, lui confirma que ce comité d'accueil lui était spécialement dédié. Il émit un souffle nasal amusé. Le mot avait dû passer qu'au bout d'une dizaine de jours d'occupation des lieux, il ne s'était toujours pas manifesté pour régler la contribution requise.

Peu inquiété par cette risible tentative d'intimidation, il les dépassa avec un hochement de de tête insolent pour franchir les doubles portes grandes ouvertes. Les Régulus ne le lâchèrent pas du regard, mais aucun ne fit mine de l'apostropher.

En ce début de soirée, les couloirs de l'édifice étaient animés par les tintements d'ustensiles de cuisine et la rumeur des stations de radio. Parvenu à son étage, Cineád ne se donna pas la peine de saluer les voisins qu'il croisa. Pour la plupart des non-Asters, jeunes couples cumulant les petits boulots, artistes sans renommée, et étudiants luttant contre la précarité, ils entretenaient entre eux un climat communautaire, sans paraître s'offenser qu'il ne fasse pas l'effort de s'y intégrer.

L'incendiaire marqua une vague halte en avisant les deux silhouettes qui se dressaient devant sa porte. Sac de congélation en main, l'un des deux jumeaux toqua au panneau de métal. C'était la quatrième fois qu'ils passaient depuis leur première visite, presque une semaine auparavant.

— T'as pas besoin de frapper à chaque fois, dit l'autre garçon. Il a dit qu'on pouvait tout laisser par terre.

— C'est mieux de dire bonjour, protesta son frère.

— Je suis là, s'annonça Cineád en arrivant dans leur dos.

Celui qui tenait le sac se retourna, la bouille radieuse. L'autre se renfrogna.

— On t'a apporté de la glace ! s'exclama triomphalement le premier.

— Mais j'ai pas de.., commença-t-il avant de renoncer à leur expliquer qu'il ne disposait pas de congélateur.

Il prit les achats que lui tendait le garçon, et découvrit la boîte de sorbets à l'intérieur. Un choix plus pertinent que les sachets de bonbons de la fois précédente. Le hargneux le dévisageait d'un œil scrutateur.

— Tu nous a pas dit comment tu t'appelais, fit-il remarquer.

Cineád trouvait sa méfiance et sa suspicion moins contrariante que l'attitude expansive de son jumeau. La façon dont il cherchait à l'évaluer était presque comique.

— Parce que j'ai pas à vous le dire, affirma-t-il.

— On t'appelle comme on veut, alors ?

À la façon dont il soutenait son regard, l'incendiaire comprit qu'il cherchait à le tester. Il haussa les épaules.

— Pour ce que ça change franchement...

Une lueur de provocation alluma les prunelles d'encre du garçon. Ses traits esquissèrent une infime moue de défi alors qu'il décidait :

𝐀𝐒𝐓𝐄𝐑𝐒 | Tome 1 | LES DAMNÉS DE BRYVASOù les histoires vivent. Découvrez maintenant