– MONTHECLIVES –
Tête renversée en arrière, Thélia laissait le jet d'eau délicieusement frais ruisseler sur ses cheveux couverts de shampoing. La mousse s'écoulait avec paresse dans le drain. Quand tout le produit parfumé eut été rincé, elle savoura la cascade revigorante pendant quelques secondes supplémentaire avant de fermer le robinet.
La voix furieuse de son père lui parvint alors au travers des murs. Elle rassembla ses lourds cheveux par-dessus son épaule, les essora sur toute la longueur, puis enjamba le rebord de céramique. Tandis qu'elle se passait une serviette sur le corps, Thélia se mit à chantonner afin de couvrir les vitupérations intempestives que Joris adressait à son interlocuteur téléphonique.
Elle boutonna sa blouse ajustée sous la poitrine, et la rentra dans la jupe corolle bleue marine qui lui descendait aux genoux. Un ensemble composé d'affaires ayant appartenu à sa grand-mère, et de mode de seconde main. Devant le miroir, elle sourit à son reflet, et pivota des hanches pour faire tourner sa jupe autour de ses jambes, avant d'être rattrapée par la préoccupation et de s'immobiliser.
Apprêtée, vivifiée, les cheveux encore humides, Thélia quitta finalement la salle de bain. Dans le salon, son père venait tout juste de raccrocher.
— Mais quel connard, écuma-t-il. QUEL CONNARD !
Ses rugissements firent exploser de désagréables éclairs rouge sombre dans l'esprit de sa fille. Elle ignorait qui de son banquier, de son bailleur, ou de l'agent fiscal faisait l'objet de sa colère, mais n'avait aucune envie de le lui demander. Il ne la vit pas se glisser dans sa chambre.
Un sac bouffi par le trop plein de vêtements l'attendait sur son lit. Thélia trouva le moyen d'y enfoncer sa trousse de toilette. Elle promena ensuite un regard de regret sur son bureau. Son père ignorait qu'elle s'était trouvée un emploi et un logement. Par crainte de sa réaction, elle prévoyait de le mettre devant le fait accompli, et de déserter furtivement le foyer. Ses tenues d'hiver, le contenu de ses commodes, et la plus grande partie de son matériel de dessin demeuraient donc en place. Elle reviendrait les chercher au fur et à mesure.
Sac sur le dos, elle traversa le séjour en rasant les murs.
— Où est-ce qu'elle va celle-là ? l'interpella Joris au passage.
L'usage de la troisième personne pour la désigner annonçait une humeur des plus exécrable. Irascible. Belliqueux. Agressif.
— Je vais passer la fin des vacances chez une amie, répondit-elle en attrapant une paire de sandales à talons plats.
— Ben y en a au moins une qui s'amuse ici, hein ? cracha-t-il. Pendant ce temps là, moi j'ai un découvert qui diminue pas, mais que ça t'empêche pas de continuer à aller t'éclater dehors, surtout !
Thélia boucla sans broncher sa première sandale, les reins en appui contre le mur.
— T'es même plus fichue de diminuer ta charge financière comme une jeune fille responsable. Tu crois que j'ai pas remarqué que tu te gardais tes revenus, dernièrement ?
Les mots chargés de hargne lui nouèrent la gorge. Il n'avait pas idée de ce à quoi elle avait dû recourir pour obtenir cet argent.
— Oh, tu m'écoutes ? s'énerva Joris devant son absence de réaction.
Il la rejoignit à pas pesants. Les relents de ses organes intestinaux imbibés d'alcool transpiraient par les ports de sa peau. Elle eut beau masquer son visage derrière un rideau de cheveux, ceux-ci tournèrent au vert kaki. Or son père connaissait la signification de chacune des nuances par lesquelles elle pouvait bien passer.
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𝐀𝐒𝐓𝐄𝐑𝐒 | Tome 1 | LES DAMNÉS DE BRYVAS
FantasiaÀ Bryvas, les miracles sont trempés de sang. Ils sont appelés Asters : ceux capables de puiser dans l'Éther du monde. Dont le pouvoir irradie les ténèbres. Rassemblés en Constellations, ils se divisent la métropole en quatre territoires. Kaya est...