Pdv Blue :
La lumière du jour qui s'invite au travers des rideaux me force à ouvrir les yeux. Je n'ai pas la moindre idée de l'heure qu'il est. J'examine les environs, comme si je ne connaissais pas déjà cette chambre. Je souris en voyant sur le bureau un cadre avec une photo d'Isalys, que je n'avais pas remarqué la dernière fois. Je tourne la tête vers le grand brun endormi à côté de moi. Hier soir, une fois de plus, nous étions deux personnes, en train de s'enlacer au beau milieu d'un champs. Mais cette fois ci, les larmes coulaient sur mes joues. Je le serrais contre moi, comme si ma vie en dépendait. Je ne le dirai probablement pas à voix haute, mais cette nuit, un poids a quitté mes épaules. J'ai toujours cru que me taire était la meilleure solution pour moi et pour tout le monde, je croyais que c'était la meilleure façon d'avancer. Mais voilà, Aaron a débarqué. Je pensais que le silence était mon plus grand allié. Peut-être pas tant que ça. C'était surtout un moyen pour moi de m'enfermer dans ma réalité. Une réalité déformée. Il y a un autre point sur lequel je me suis trompée : Aaron n'est pas devenu mon silence, bien au contraire. Il est la sonnerie stridente du réveil qui nous sort d'un rêve pour nous ramener dans la réalité. Il me rappelle à quel point j'aimais vivre avant et à quel point je ne suis plus moi-même depuis deux ans. Et ça me file le vertige. Rien qu'à m'imaginer lâcher prise, ça me retourne l'estomac.
Je me redresse, passe doucement au-dessus d'Aaron pour ne pas le réveiller, puis je m'extirpe du lit, le corps alourdi par la fatigue. Je ne suis pas en train de prendre la fuite, enfin, pas complètement. Je ne peux plus me le permettre. Je ne veux plus. Alors que j'allais m'éloigner, je sens une main saisir mon poignet d'un geste doux.
- Qu'est-ce que tu fais ?
- Euh...
- Je croyais qu'après ça, tu ne t'enfuirais plus. Murmure Aaron, sans ouvrir les yeux, la voix encore endormie. Ne me laisses pas, toi aussi.
Je me rassois sur le lit sans un mot. Je prévoyais bien de ramasser mes affaires et de m'enfuir jusque chez moi pour m'enfermer dans une bulle et réfléchir pendant des heures au sujet de cette nuit. Mais les derniers mots de sa phrase me poussent à rester. Toi aussi. Je ne sais pas quoi faire de ça. Est-ce qu'il fait référence à son père ? Je croyais pourtant qu'il était satisfait de la vie qu'il a construit avec celui d'Isalys.
- Restes.
- Tu sais, je ne comptais pas m'enfuir pour toujours. Juste, pour quelques heures.
Il rit légèrement.
- Quelques heures pour faire quoi ?
- Réfléchir.
Il tire sur mon bras, me faisant basculer. Je me retrouve allongée près de lui, en cuillère, mon dos contre son torse. Malgré moi, un sourire étire mes lèvres.
- Tu peux réfléchir ici. Je me tais, si tu veux.
Ses mots sont si naïfs. J'ai l'impression de me tenir à côté d'un enfant, alors que normalement, c'est lui l'adulte, dans l'histoire. C'est lui qui a une petite sœur, lui qui trouve les bons mots pour me rassurer. C'est assez déroutant, de le voir agir comme un gosse qui a peur de perdre son doudou. Je me retourne, pour planter mes yeux dans les siens. Pendant une seconde, le doute s'empare de moi mais je le repousse, parce qu'hier, allongée dans ce même lit, lorsqu'Aaron était endormi depuis déjà quelques minutes, j'ai pris une décision.
- Je ne veux plus de silence. Aaron reste silencieux, attendant que je poursuive, mais durant un instant, les mots me manquent. Je rassemble le peu de courage que j'ai pour continuer. Je n'ai plus envie de me taire. Je n'ai plus envie d'être loin de toi. J'en ai marre, d'être coincée en permanence entre deux sentiments.
Il laisse un silence planer pendant ce qui me paraît être une éternité, ses yeux verts encrés dans les miens. Doucement, il lève la main, pour faire glisser ses doigts de ma tempe, jusqu'à ma joue, pour finalement passer une mèche de cheveux derrière mon oreille laissant un frisson se frayer un chemin le long de ma nuque vers colonne vertébrale, hérissant chacun de mes poils. Un sourire se plante sur ses lèvres. Pas son sourire en coin habituel, un sourire tendre. Je crois que je pourrais l'embrasser, là, maintenant, parce que ses yeux, animés d'une lueur dorée, et son sourire me font littéralement fondre. Je pose les yeux sur ses lèvres, mais je ne bouge pas. Je reste là, immobile, maintenant cette distance entre nous, aussi petite soit-elle. Je ne suis pas prête. J'ignore mon cœur qui martèle ma poitrine. Je me redresse.
- Il faut que j'aille à la salle de bain. Je reviens.
- Bien, madame.
Pdv Aaron :
Blue quitte le lit pour se diriger vers la porte. Je souris. La voir porter mon t-shirt qui lui arrive à mi-cuisse, me fait un certain effet. Je ne peux empêcher mon regard de glisser le long de ses jambes. J'ai chaud, mon dieu. L'image reste imprimée sur ma rétine un moment, avant que je ne réalise qu'elle a quitté la pièce.
Je m'appuie sur les coudes, la tête tournée vers la fenêtre, qui donne sur le champs. Les évènements d'hier soir se mélangent dans ma tête. J'ai encore du mal à percuter. Mike est mort. J'étais tellement à côté de la plaque. Comme un con, je le détestais. Je détestais un mec mort. Je n'ose même pas imaginer ce que Blue a pu ressentir. J'ai senti mon cœur se briser quand elle s'est agrippé si fermement à moi, en sanglot. C'était comme si tous les morceaux de son cœur venaient heurter le mien. Je crois que quelque part, je suis heureux qu'elle ai parlé. Elle m'a tout déballé, maintenant j'ai l'impression qu'elle va mieux, et que nous avons fait un pas, ensemble.
Pdv Blue :
J'inspire profondément avant de me passer de l'eau sur le visage. Il faut vraiment que je me débarrasse de cette mine affreuse. En m'arrêtant sur mon reflet dans le miroir, je me rends compte que mes cheveux ont bien poussés, depuis cet été. Avant, je ne supportais pas qu'ils touchent mes épaules. Maintenant, ils m'arrivent quasiment en dessous de la poitrine. Etonnamment, je crois que j'aime bien. Je souris légèrement, réalisant soudain que c'est le t-shirt d'Aaron que je porte. Je laisse un rire s'échapper en me souvenant de comment nous en sommes arrivés là. Aaron m'a prise par surprise en me portant pour se mettre à courir jusque chez lui. Nos rires ont remplacés mes sanglots, qui brisaient le silence planant au-dessus du champs. Au début, je voulais chez moi, mais j'ai fini par accepter de dormir ici après qu'Aaron m'ai dit ne pas vouloir me laisser toute seule après cette soirée beaucoup trop riche en émotion. Quand il allait sortir de sa chambre pour rejoindre celle d'Isalys, je l'ai retenu. Parce qu'après tout, c'était sa chambre, son lit, et qu'être encore un peu auprès de lui avait un coté rassurant. J'ai plongé à pieds joints dans ce que je redoutais le plus. Parler de Mike, avouer mes sentiments à un autre. J'ai l'impression de m'être jetée dans le vide.
VOUS LISEZ
Blue
RomanceEt si il avait été mon dernier amour ? Et si après lui, je n'étais plus jamais capable d'aimer ? J'avais construit tout mon univers à partir de nous. Il faisait partie de chacun de mes rêves, chacun de mes projets. Je ne devais jamais passer une seu...