Chapitre 32: Mains destructrices

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Sabrina

Je tente de garder mon calme face à lui, mais dès que j'ouvre les yeux, la réalité me frappe de nouveau. J'ai envie d'hurler de toutes mes forces jusqu'à ne plus pouvoir le faire et si je le pouvais, je me noierais dans mes propres larmes. Rien ne change jamais. Chaque fois que je regagne ma liberté, je finis toujours par la reperdre. Lorenzo, Angelo, Enzo, James... Tant d'hommes pourtant avec toutes les mêmes intentions et tous le même effet.

Ils m'ont détruit. Quelques-uns m'ont comblé de bonheur pendant un temps, mais après, ils ont simplement fini par me faire encore plus de mal. Lorsque James m'a trahie, j'ai eu l'impression que le monde s'effondrait autour de moi et lorsque Lorenzo est mort, le monde s'est réellement effondré autour de moi, mon monde s'est effondré. Je voulais mourir.

En ce moment, je le veux encore plus. James sourit stupidement tout en buvant avec une lenteur provocante sa coupe de champagne et moi, comme une conne, je joue son jeu à la perfection. Je reste assise en silence sur ma belle chaise blanche même si rien ne me retient de partir. Il ne m'a pas attaché cette fois-ci, car il savait qu'il n'avait pas besoin de le faire.

J'ai quelque chose à perdre maintenant. Avant, tout ce que je voulais c'était être libre. Je voulais pouvoir faire ce que je voulais quand je le voulais et avec qui je le voulais. Aujourd'hui, je veux être en paix. Je désire vivre au lieu de survivre. Chaque matin, je me visualise, assise sur une de ses vieilles balançoires avec mon bébé dans les bras, l'aube se levant à peine. C'est mon plus grand rêve.

Un long soupir m'échappe alors que les minutes défilent toujours. Long et bruyant, je ne désire qu'une chose: le voir craquer. James a toujours détesté que je sois impatiente. Autrefois, ça le rendait fou. Je compte bien user de cet atout, de ce petit détail que j'ai appris au fil du temps.

J'attrape ma fourchette entre mes doigts et je la cogne avec insistance et répétition contre la table parfaitement dressée. Il ne réagit pas tout de suite, ni même ne réagit jamais. Il préfère jouer l'innocent encore quelque temps comme s'il ne s'en rendait pas compte.

J'agrippe avec fermeté la nappe blanche qui a été disposée sur cette belle table ronde et je la secoue dans tous les sens. Je n'y mets pas toute ma force, préférant opter pour une approche plus discrète, mais j'y mets tout de même assez de puissance pour secouer toute l'argenterie et la décoration qui recouvre la table. Justement, le grand vase de cristal qui sert de centre de table manque de tomber à plusieurs reprises, faisant un vacarme immanquable, mais il ne réagit pas. J'en viens presque à me demander s'il n'est pas devenu sourd et aveugle entre-temps.

Il est là, devant moi et identique à l'homme que j'ai un jour aimer, mais il n'est plus pareil. Quand je plonge dans ses yeux, je ne vois plus l'étincelle ludique et sadique qu'ils renfermaient autrefois. Je ne vois plus rien. Ses sombres pupilles sont vides, l'exact reflet de celles de son frère.

C'est en cet instant que je comprend enfin la puissance que de simples mots peuvent renfermer. Les actes blessent, éphémère et extrêmement douloureux, mais les paroles restent, hante l'esprit et se faufile jusqu'au cœur pour y laisser sa trace à jamais.

James m'a détruit avec ses actes, mais je l'ai amené avec moi dans ma chute avec mes mots.

Il a mal. Je l'ai blessé, car il m'a blessé et ce n'est pas le seul avec qui j'ai fait cela. Je porte le sang de plusieurs sur mes mains, mais j'ai sur la conscience bien plus que des meurtres. Alors que je souffrais terriblement à cause de ce qui m'arrivait, je le partageais aux autres sans m'en rendre compte, innocent ou non. J'ai emporté le monde entier dans ma chute. Chaque personne que je croisais devenait un ennemi de plus, une option, un pion. Je me suis joué de tous. Je les ai utilisés à mon bien puis je les ai jetés une fois qu'ils m'étaient inutiles, car c'était tout ce que je connaissais. La seule différence c'est qu'eux ont assumé ce qu'ils faisaient, moi, j'ai préféré blâmer mes actions sur les autres. Alors qu'en fait, j'étais bien pire qu'eux.

Captive du terrifiant Lorenzo liziri (Tome 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant