Camélia

Chapitre 26

- Au retour de mes grands-parents, mon oncle a enfin eu la bonté de sortir de sa chambre pour saluer mon père, histoire de faire bonne impression devant ses beaux-parents qui l'hébergent depuis des mois. Cette fois, mon père ne lui a pas dit bonjour, ce qui est totalement compréhensible en soit. Il se sentait pris pour un imbécile, lui rendant simplement la monnaie de sa pièce. Lui et son bras tendu dans le vide, à l'entrée.

- Ok, j'avoue, c'est humiliant, commençais-je. Mais c'est mérité.

Elle m'a un peu mal regardé avant d'écouter la suite de ma phrase. J'aurais pu être morte aujourd'hui. Il faut que j'apprenne à me la fermer.

- Il s'appelle Salvatore. Il n'a pas accepté cette "humiliation" comme tu dis. Je crois que mon père a touché son égo avec ce simple geste, qu'il n'a pas fait d'ailleurs. Il a commencé à s'énerver, reprochant à mon père de ne pas l'avoir respecté. Mon père lui a répondu qu'il ne le respectait pas depuis des semaines, et lui a aussi reproché qu'il ne respectait pas non plus sa sœur, qu'il ne la méritait pas, et voulait lui faire avouer qu'il jouait la comédie devant ses parents pour pouvoir rester chez-eux plus longtemps.

Elle fait une petite pause avant de reprendre :

- Salvatore était vraiment dans l'optique de squatter. Mon père n'avait pas tort. Il ne cherchait pas d'appartement, ne travaillait pas et jouait aux jeux vidéos toute la journée, enfermé dans "sa" chambre. Même un gamin avait plus de responsabilités que lui. En tout cas, il n'a quand même pas accepté la véracité des propos de mon père et haussait le ton. J'avais peur. Je tenais ma petite cousine dans mes bras, sa fille.

Les deux hurlaient. Tout le monde était tétanisé, ma mère, ma tante, ma grand-mère, ma cousine et moi, mes cousins, mon frère, mon grand-père. C'était impressionnant. Ils faisaient de grands gestes et se rapprochaient. À un moment, ils allaient en venir aux mains. Mon père a proposé à mon oncle de faire ça dehors, pour éviter de saccager la maison. Mon oncle a refusé.

Ses yeux sont fixés sur le mur mais son esprit est ailleurs, perdu dans ses souvenirs. Ses sourcils froncés, elle continue :

- Il ne voulait pas se battre alors qu'il mesure un mètre quatre-vingt dix, et mon père un mètre soixante-dix. Salvatore était musclé et mon père, un peu grassouillet on va pas se mentir. Tout le monde était choqué, mais au moins ils ont tous vu à quel point il était lâche. Lui, il s'est enfuit dans sa chambre. Ma mère est retournée en cuisine avec ma tante. Mon grand-père s'est assis. Cinq minutes plus tard, Salvatore a appelé mon père. Pour qu'il vienne dans la chambre. Mon père et ma tante y sont allés. Moi, je suis restée assise avec ma cousine que je berçais à cause de ses pleurs et ma grand-mère s'était assise à mes côtés, priant qu'il ne se passe rien de grave. Puis tout le monde a suivi. J'ai entendu des bruits, comme des hoquets de stupeur simultanés. J'étais curieuse. Je me suis levée, tenant toujours ma cousine dans les bras. Ma grand-mère était devant moi, apparemment plus rapide. Je l'ai entendue crier, puis je l'ai vue courir. Je ne sais pas d'où elle a trouvé cette force, mais elle l'a fait.

J'ai vu mon oncle, ses yeux reflétant cette nuance de folie, tenant une arme entre les mains, pointée sur mon père. Ma grand-mère s'est placée devant mon père, qui était resté à l'entrée de la chambre. J'ai caché les yeux de ma cousine, ne voulant pas qu'elle voit son père dans cet état. Salvatore pointait son arme sur tout le monde, s'arrêtant sur moi. J'ai fermé les yeux, n'ayant jamais vu une arme autre part que dans les films d'action que je regardais avec mon père. Enfin bref, tout le monde lui demandait de poser son arme mais il n'écoutait personne. Puis j'ai entendu une détonation, et j'ai directement couru pour enfermer ma cousine dans une chambre. Puis je suis revenue,  complètement paniquée, tout était calme, trop calme.