( Nils )
La journée a été enrichissante. Fabien et Lise me font profiter de leurs expériences. Ils m’ont confié des documents précieux que je vais éplucher ce week-end d’autant qu’Hugo ne sera pas là. Le temps, plutôt doux, va me permettre de rentrer tranquillement à pied. Cela ne sera pas toujours le cas au cours de l’année. Pas trop fan à l'idée de m’ enfermer dans un bus mais je n’aurai guère d’autre choix. Au pied de l’immeuble, Yaël, un des jeunes frères de Hugo.
—Ton frère est très pénible, soupiré-je.
— Cela le rassurait que je passe !! Même s'il est heureux d’avoir obtenu ce poste quasi complet à l’hôpital de jour, il va continuer de te materner ou nous charger, Simon et moi, du job.
—Je suis désolé pour vous.
— Nous allons survivre à cette charge, t’inquiète ! Ton sourire montre que la journée n’a pas été gâchée par les propos d'un quelconque idiot. Je peux envisager de continuer ma vie ?
— File, va vivre ! Et un conseil d’ami, sois sérieux !
— L’idée d'un sermon d’Hugo ôte toutes envies d’actes délictueux !
Il part en rigolant. Les deux petits frères vivent le côté protecteur de leur grand frère depuis leur naissance. Ils se sont sûrement rebellés parfois mais sans que cela change grand chose. Je présume qu'ils ont dû mettre au point des moyens pour contrer la surveillance de leur aîné. Depuis quinze jours, celui-ci a officiellement un poste fixe à l’hôpital de jour. Après des années de postes à mi-temps aux horaires plus qu’anarchiques, obtenir cette place est une belle récompense. Cela doit malgré tout le frustrer de ne pas pouvoir être en mode protection. La présence de Yaël en est la démonstration. Aussitôt arrivé dans mon appartement, je lui envoie un petit message pour le remercier.
—Merci. C’est très gentil de ta part d'y avoir pensé. Yaël a pu vaquer à ses occupations. Fabien et Lise m’ont donné de quoi occuper la soirée et une partie de la journée de demain. Bonne fin de journée.
( Hugo)
Une journée harassante qui se termine. La petite Angelina a été très difficile à canaliser cet après-midi. Ces crises de colère, violentes, surgissent sans réelles raisons. Enfin, apparentes tout du moins. Je l’ai déjà croisée, elle et quelques autres, dans d’autres services. Le fait que je sois un homme, grand et large d'épaules, bloquait certains qui m’auraient plutôt guidé vers du travail de brancardier. Je ne compte plus le nombre de fois où j’ai dû expliquer, argumenter. Depuis mon adolescence, ma décision est prise. Je veux travailler avec des enfants. Différents stages et formations m'ont permis d’affiner mon choix. Après bien des refus, quelqu'un m’a enfin offert la possibilité de dévoiler mes capacités.
— Hugo ? Demain matin, passe me voir à mon bureau, je dois te parler de deux arrivées.
—Je peux ce soir si tu veux ? Dès qu’ Angelina est partie, je suis libre comme l’air…
— Et curieux. Je considère moi aussi que l’urgent est fait. Connaître ta réaction m’aidera à faire mon choix.
Vingt minutes après, je frappe à la porte de François.
—Entre, Hugo. Pour commencer, même si personnellement, je n’en doutais pas, je tiens à te dire que tous les intervenants sont satisfaits de ton boulot.
—J’essaye de faire de mon mieux. Les premiers jours ont été un peu compliqués. Je n’avais travaillé que dans le milieu scolaire sous l’autorité d'un enseignant. C’est un peu déstabilisant de se trouver seul avec le ou la jeune. Enfin, de croire que l’on est seul justement, rectifié-je. L’effet d’équipe se ressent très vite et s'y retrouver englobé est top.
— Nous ne sommes que trois établissements à expérimenter cette méthode pluriprofessionnelle. Autant dire que la pression est forte ! D’ici les prochaines vacances, deux enfants dans des situations plus ou moins lourdes vont s’ajouter aux enfants actuels.
—Deux des plus âgés se dirigent vers des périodes plus longues en IME, non ?
— Oui et c’est bien pour cela que nous avons été choisis. Aucune nouvelle embauche nécessaire. Lorsque j’ai lu le dossier de la plus jeune, j’ai pensé à toi. Aucune agressivité à ce jour dans le dossier. Aucune séquelle physique trouvée. Le blocage psychique semble être la seule raison qui musèle sa capacité à parler.
—A-t-elle subi quelque chose ? Je n’ai jamais été confronté à ce genre de situation et si c’est le cas, mon inexpérience pourrait être un obstacle….
— Le rapport du médecin traitant indique la perte brutale du papa, d'une relation très fusionnelle. Je pense que cela ne devrait pas te poser de problèmes. Tu seras mis à contribution mais avec le soutien de l’équipe en plus. La façon de faire est différente qu'en milieu scolaire mais elle est plutôt efficace. Cela peut, je crois, être une expérience enrichissante pour toi. Tu as le temps d'y réfléchir, nous en reparlerons avec l’équipe pour préparer son arrivée.
( Gaëtan)
Mon week-end auprès de Sophie ou pour être plus précis, les quelques heures que j'ai pu arracher au directeur m'ont fait plus de peine qu'autre chose. J 'en arrive même à douter de leur impact sur Sophie.
Enfin, c' était mon état d'esprit lorsque j'ai rejoint ma voiture pour rentrer. La route m'a semblé très longue. Arrivé à l'appartement la déprime n'est pas loin. Aussi quand mon portable sonne, j'hésite sérieusement à y répondre.
Afin d’éviter une extinction du système auditif de mon interlocuteur, je n'ai pas hurlé ma joie. Mais mes voisins n’y ont pas échappé ! Tout est en ordre. Dans dix jours, je reviendrai avec Sophie. La première quinzaine, afin de ne pas aller trop vite, elle ne se rendra qu'à l'hôpital de jour. L'assistante maternelle, secondée par des baby - sitter passera du temps avec elle afin qu'elles apprennent à se connaissent. L’entrée à l’IME se fera dès que possible. J’ai l’impression qu’au contact d’enfants et d’adultes bienveillants, sa voix résonnera à nouveau. Durant toute la semaine, j'ai des rendez vous avec différentes nounous". À part leur professionnalisme, je n'ai aucun critère précis. Et puis au final, celle qui décidera, ce sera Sophie. Et même sans parler, elle sait très bien se faire comprendre
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Percuté par le soleil
RomanceAprès un long arrêt maladie, Gaetan revient au travail. Son poste de directeur adjoint à l'IME l'attend. Costume sombre, chemise blanche, cravate, rien dans son apparence n'inspire la joie de vivre. Suite à un entretien avec la direction, Nils a dé...