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(Nils )

Impossible de m’occuper. L’IME est fermé quelques jours pendant les petites vacances. Afin de m’avancer sur différents projets à mettre au point, j’ai prévu d'y faire un tour cet après-midi. Miriam y sera, pas le directeur a-t-elle précisé en passant comme si cela pouvait m’inquiéter. Est-ce le cas ? J’en sais rien à vrai dire. Depuis la rentrée et sa remarque déplaisante, rien ne s’est passé. Pourtant, les quelques fois où nous trouvons seuls, semblent tendues. Enfin c’était le cas avant cette discussion concernant Simon et Yael où il était intéressé, à l'écoute. Presque blagueur. D’après Hugo, le rendez-vous s’est bien passé. J’ai laissé quelques messages à Simon mais aucun retour. Hugo pourrait à coup sûr me renseigner mais l’hôpital de jour ne ferme pas pendant les petites vacances. Si je m'écoutais, j’irai traîner chez leur mère, lui passer le bonjour… et je serais immédiatement repéré. Alors je tourne en rond comme un idiot, incapable de travailler à quoique ce soit.

C’est la sonnette qui me sort d'un assoupissement. Je rejoins la porte en mode zombie pour y trouver Hugo tout sourire.

— Et bien, je te réveille ?

— Presque, oui. Un gros manque d’énergie, je crois. Cela n’a pas l’air d’être du tout ton cas par contre.

— C’est vrai. Cette semaine m’a semblé moins épuisante. Le rythme est différent, je cours moins partout. Tu me payes un café ?

Dois-je m’inquiéter ? Hugo semble préoccupé. J’espère que cela n’a aucun rapport avec Simon.

—Va t’installer, je reviens avec les cafés.

(Hugo )

Simon m’a fait part des nombreux messages de Nils. Et de son inquiétude concernant la façon de gérer ses réponses. Les effets de l’éducation des parents de notre ami se font régulièrement sentir. Penser à Simon pour un petit boulot dans ses cordes est une action digne de Nils. S'inquiéter sur ce qui en a résulté représente ce manque de confiance insufflé depuis son plus jeune âge. Simon sous des apparences hyper décontractées est très mature. C’est moi qui l’ai aiguillé vers les gardes d’enfants. Il le fait déjà depuis quelques années pour notre famille sans se faire payer et jamais je n’ai entendu de remarques. Mes deux frères se cherchent : Yael en restant dans le milieu universitaire tant il a soif de savoirs. Simon, lui,  écume les secteurs professionnels. À 21 ans, il possède un CV long comme le bras. J’espère qu'il réalisera qu'il n’a plus besoin de chercher.

Le plateau tremble un peu, mais arrive sans accident jusqu'à la table.

— Ce n’est que moi, mon pote. Tu pouvais juste amener nos tasses. Depuis le temps, tu connais mes goûts par coeur. Quelque chose te tracasse ?

—Bien entendu que je suis tracassé, Hugo.

—Mais à propos de quoi ? J’ai l’impression qu’une info me manque.

—J’ai dû laisser une bonne dizaine de messages à Simon.

—Vingt-cinq, il m’a dit mais c'est peut-être une  exagération !

—Tu sais comment je m’affole vite…

—Oui et Simon aussi. La quantité de messages l’a juste effrayé.

—Je comprends. Je n’aurais jamais dû donner ses références. Il a été déplaisant ?

—Vernet ? Pas du tout, je te l’ai dit l’autre jour. L'entretien s’est bien passé. Très bien même. Simon allait t’en parler plus précisément quand tu as commencé l’envoi de tous tes messages. Et là, c’est lui qui a paniqué.

—Son silence m'a angoissé et ... je n'ai pas osé passer chez tes parents.

—Simon arrive, il va t'expliquer. Je voulais juste m'assurer que tu allais bien. Personne ne te reproche quoi que ce soit, Nils.

A peine dix minutes plus tard, Simon après une bise à chacun de nous, s'installe à nos côtés.

—Pardonne-moi la surcharge de messages sur ton téléphone. Même si tu ne voulais pas en discuter par ce biais, il te suffisait de me dire que tu passerais aujourd'hui…

— Sérieusement ? A qui tu veux faire croire que cela aurait suffit ? Nous te connaissons par coeur !

— Ce n’était pas un rendez-vous comme les autres, tente de s’ expliquer Nils.

—Parce que c’est ton patron ? riposte Simon.

Je suis au spectacle. Les deux protagonistes ont le même bagout. Ou presque et leur dialogue continue. Nils n’a toujours pas sa réponse même s'il doit à présent se douter du résultat. Un petit signe de tête et Simon comprend que cela a assez duré.

—Allez il est temps d’abréger tes souffrances. Il m’a contacté et demandé si je pouvais passer les voir.

— La petite est déjà chez lui ?

— Oui. Et elle est adorable. Un petit lutin silencieux avec un sourire de dingue.

— Je confirme. Elle va le croquer tout cru le Gaëtan !

Ma remarque provocatrice de façon tout à fait intentionnelle est d'une incroyable efficacité. Nils est là,  bouche ouverte.

—Toi aussi, tu les as vu ?

— Oui. L'image du petit lutin lui correspond parfaitement, Simon. Quant au prénom, c’est lui qui me l’a donné. Pour le moment, je n’ai pas osé l'utiliser. Sophie va être deux jours par semaine à l’hôpital de jour.

— le jeudi et le vendredi j’irai à leur domicile m’occuper d’elle en attendant que son entrée à l’IME soit validée, complète Simon tout fier.

—Sait-il que vous êtes frères ?

—Ni Simon ni moi l’avons signalé de manière explicite mais nous portons le même nom et nous avons pas mal de traits communs.

—Des traits communs ? Tu as 20 bons kilos de plus que moi et je n’ai pas tes frisottis sur la tête !

— Les vingt kilos excédentaires sont musculaires mon petit bonhomme ! Quant aux frisottis demande à Yaēl ce qu’en pensent nos relations amoureuses !

—T'inquiète ! Je m’en sors très bien sans les avoir.

— Stop, hurle Nils. En attendant qu’est- ce que je fais, moi ?

—A quel propos ? Tu n'as aucun frisottis, Nils.

— Stop Simon, s'il te plait. Qu’est-ce qui t’angoisse exactement Nils ? Tu lui as fourni les références de Simon. Vu qu'il l’embauche, il n’a rien à te reprocher. Le fait que nous soyons de la même famille ? Peut-il te reprocher cela ? Je crois que l'homme que nous avons croisé, Simon et moi, n’a pas grand chose à voir avec celui qui a été plus que déplaisant à la rentrée.





Percuté par le soleil Où les histoires vivent. Découvrez maintenant