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( Nils)

Je rabats l'écran du pc portable. Je ne m'attendais pas à cela. Il me semblait logique que le père de Martin s'adresse à Gaëtan. Lui seul est à même de donner les autorisations nécessaires. Leur voiture va être immobilisée une quinzaine de jours. D'après les explications données, les différents frais non remboursés par leur mutuelle au cours des deux années d'hospitalisation de Martin ont fini de ronger leurs économies. Aucune possibilité de changer ou même de louer un véhicule de façon provisoire. Même situation concernant d'éventuels congés. Il est urgent de discuter pour tenter de trouver une solution. Gaëtan est là, sa voiture était sur le parking. J'ai un creux d'une heure à peu près puisque les élèves sont entre les mains de Fabien et Lise. Cela me semble suffisant pour discuter de la situation.

Devant la porte ouverte de Miriam, je fais un peu moins le malin.

-Bonjour Miriam. Je réalise bêtement que ma démarche est un peu expéditive. J'ai reçu le mail du père de Martin. Est-il possible que je vois Monsieur Vernet ?

- C'était prévisible que le père s'adresse plus à toi, il te connaît mieux. La ligne téléphonique est dispo, je tente le coup, dit-elle en appuyant sur un chiffre. Monsieur Vernet, monsieur Favre est devant moi. Il a reçu le mail des parents du jeune Martin dont nous parlions tout à l'heure.

Miriam écoute la réponse et raccroche l'appareil alors que le directeur apparaît à la porte.

- Nils, bonjour. Entrez. Miriam se doutait que monsieur Miron s'adresserait à vous. Vous êtes en lien avec son fils.

-Vu ainsi c'est en effet logique. Je suppose que certaines dispositions concernant la sécurité et les déplacements de Martin nécessitent des autorisations parentales et du directeur, non ?

-J'avoue que je n'ai jamais vécu ce cas de figure mais cela me semble indispensable qu'un papier signé de chacune des parties soit mis en place. L'autre soir, j'ai rempli un formulaire autorisant Simon à récupérer Sophie à l'hôpital de jour et à la déposer ici. Même si dans ce cas bien précis, c'était un peu excessif étant donné qu'ils sont frères.

-Vous le saviez ?

-A ce moment-là, non. Simon est venu m'expliquer pourquoi il n'avait pas trouvé facile de me le dire. J'ai obtenu la version d' Hugo tout à l'heure en déposant Sophie.

- Et je vais vous donner la mienne. Je pense que vous avez constaté par vous-même que ma confiance en moi est loin d'être énorme. Que même si vous vous en êtes excusé, notre premier contact n'a pas été une expérience agréable. Mais être ici, en tant qu' éducateur spécialisé a toujours été mon rêve et je crois que je mérite ce poste. J'ai régulièrement subi ce genre de remarques qui m'ont souvent mis à terre. Au fil des jours, nos contacts professionnels sont devenus plus cordiaux. Concernant Simon, je savais qu'il correspondrait au profil que vous recherchiez pour Sophie. Je n'avais aucune raison de vous parler de son frère qui venait de décrocher lui aussi le travail de ses rêves. Comment aurais-je pu deviner que le cadre de santé lui confierait Sophie ?

-Personne et je ne vous le reproche pas. Je ne vois aucun drame dans cette omission. La crainte d'une réaction vous a, plus ou moins consciemment, dicté ce silence. Votre vécu l'explique tout à fait. A mon tour de vous faire une confidence, Nils. Elle ne m'excuse en rien. Ma remarque sur votre tenue vestimentaire n'avait rien d'un jugement concernant votre sexualité. Celle-ci ne me concerne pas et je n'ai strictement aucun droit de la dénigrer. Je n'ai jamais réellement cherché à analyser ma façon de vivre ou d'assumer les choses. En dehors de quelques rencontres uniques, seul Arnaud, le père de Sophie savait que mes préférences étaient plus souvent masculines que féminines.

Je reste silencieux lorsqu'à son tour il se tait. Attend-il une réaction de ma part ? Un sourire, un franc serrage de mains ?

-Ceci étant dit, reprend-il. Si nous nous occupions de la situation de la famille Miron.

-Martin est ici deux jours par semaine, le lundi et le mardi. Le vendredi, il est au centre hospitalier. Le mercredi et le jeudi, ses parents se chargeaient à l'aide de voisins et amis de l'occuper.

- Sophie est à l'hôpital de jour le lundi et le mardi. Le mercredi, jeudi et vendredi, Simon la garde chez nous. Il y a donc plusieurs options. J'avais proposé de déposer le jeune garçon à l'IME. Sauf qu'il n'y est pas ces jours-là et cela risque de déstabiliser le planning d'autres élèves. Je crois que Simon est capable de gérer les deux en même temps. Qu'en pensez-vous ? D'après ce qu'Hugo et lui m'en ont dit, Sophie est plutôt facile à gérer. Martin comme elle sont assoiffés de savoir.

-Quand est prévue l'arrivée de Sophie à l'IME exactement ?

-Je n'ai pas encore de date mais c'est une question de jours. Son adaptation à l'hôpital de jour a été rapide. Il semble difficile de penser que ce sera différent ici.

-Surtout qu'il est fort probable que de côtoyer Martin l'aide. Le principal problème sera le nombre de places disponibles.

-Nous en discuterons avec les parents mais avant tout, l'accord de Simon est indispensable.

-Martin se fatigue vite. Un moment de pause dans le coin bibliothèque lui est nécessaire dans la matinée. Sophie a-t-elle le même besoin ?

-À l'hôpital de jour, non mais son emploi du temps est allégé. Arnaud évitait au maximum de la laisser à des inconnus. Afin de ne pas en faire une petite sauvage, il était fréquent qu'elle le suive au bureau. J'ai assisté à des réunions où elle jouait dans son coin sans que cela semble déranger grand monde.

Percuté par le soleil Où les histoires vivent. Découvrez maintenant