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( Simon ) 

Devant la porte, prêt à sonner, j'hésite me sentant plus intimidé que lors de notre premier entretien.

— Simon ? s’étonne Gaëtan. Sophie va à l’hôpital de jour, aujourd'hui, ne l'ai-je pas précisé ?

—Aucune erreur ni de l’un ni de l’autre. Pouvez-vous m’accorder un peu de temps, j’ai un aveu à vous faire. 

Il reste immobile et silencieux, ce qui ne facilite pas la diminution de mon stress. 

—Ai-je dit ou fait quelque chose qui t’a déplu ? Je suis parfois maladroit dans mes interactions....

—Cela vient de moi, pas de vous.

—Viens dans la salle. Sophie dort encore ou joue tranquillement. Je ne la dépose qu’à dix heures.

—Merci, dis-je en le suivant. 

—J’allais prendre un café. Je t’en offre un ?

—Avec plaisir.

Il ne lui faut que très peu de temps pour revenir avec un plateau contenant des tasses et du sucre.

—Lance-toi, Simon. Le père de Sophie avait cette formule assez réaliste dans ce genre de situation. C’est préférable dehors que dedans.

—Il avait bien raison. Je vous ai sciemment caché quelque chose. Rien de malsain, rassurez-vous. Mais suffisamment pour que cela me turlupine. 

—Alors je t’écoute. 

—Hugo est mon frère aîné. 

—Je ne suis pas quelqu'un qui retient les noms de famille, Miriam, ma secrétaire, est constamment obligée de me les remémorer. En quoi est-ce un souci ? 

—La raison pour laquelle je vous ai caché cette information. Hugo est le meilleur. Non, rectification, le seul ami de Nils. 

—Tout comme toi.

—Non. Je suis un des frères de Hugo. Je serais bien incapable de vous dire depuis quand celui-ci est le protecteur de Nils. Notre maison a été très longtemps un lieu de refuge pour lui…

—Et donc, vous êtes évidemment tous au courant de ma saleté de remarque ? Ne vous a-t-il pas dit que je m'en étais excusé ? Que rien dans mon propos n’avait une sonorité homophobe ? Que de toute façon ce qu'il est ne me regarde en rien ! 

—Il nous l'a dit. Est-ce que j'aurais accepté autrement ou plus évident encore,  m'aurait-il parlé de votre offre de travail ? 

—Je ne le pense pas. Nils a la tête sur les épaules. Pour autant, je ne comprends toujours pas en quoi cela te met mal à l'aise. 

—Le manque d'honnêteté. Vous me faites confiance en me confiant Sophie et moi… 

—Ni toi ni Hugo ne m'avez caché votre nom. Quelqu'un d’autre aurait sûrement fait la relation entre vous deux ou en aurait été étonné. Aviez-vous peur que je pense à une sorte de coup monté ? 

—Non, non !  Nous aurions dû juste être honnêtes et vous le signaler. La confiance que vous m’accordez, j’ai la sensation de ne pas la mériter en vous cachant cela. 

—Le tort, s'il y en avait un, est réparé. Mais je pense qu'une nouvelle discussion avec Nils s’impose. Aucune homophobie cachée chez moi. Sans être introverti, j’estime que mes préférences sexuelles ne regardent que moi. Dans ma situation, concernant Sophie, affirmer une bisexualité aurait pu complexifier les choses. Je n’ai pas pris ce risque. 

Je suis bouche-bée face à l’information. 

—Je me doute des questions qui doivent surgir dans ton esprit.

—Je n’en ai qu'une en fait. Pourquoi ne pas avoir dit cela à Nils ? Cela aurait directement effacé toute notion d’homophobie, non ? 

—Miriam m’a dit sensiblement la même chose. Comment m’expliquer ? Je ne ressens aucune honte d’être homo. Aucun rejet familial, mes parents ne l’ont jamais su. Cela n’aurait rien changé de toute manière, nous n’avons jamais eu grand chose à nous dire. Je me vois mal discuter de cela avec Nils. 

—Surtout après l’avoir traité d’énergumène  !

—Exactement. Te sens-tu mieux, maintenant ? 

—Plus serein. Il est peut-être préférable que je m’éclipse avant que Sophie ne se réveille ? Inutile de la perturber. 

—C’est une bonne idée. 

( Hugo )

Occupé avec Angelina, j'aperçois Gaëtan poser les affaires de Sophie au portemanteau.

—Laissez- la faire toute seule, s'il vous plaît. Elle est la plus jeune mais aussi la plus dégourdie. 

—Un simple automatisme de ma part, désolé.

—Ce n’est pas très grave. 

—Votre frère Simon est passé discuter ce matin. 

—Il a été plus malin et plus réactif que moi. Simon déteste être ‘ le cul entre deux chaises”. Je ne me sentais pas réellement coupable de ne pas l’avoir précisé. Nous sommes trois professionnels qui allons oeuvrer autour de Sophie dans différents lieux. Se connaître facilitera l’échange d'informations. Toutefois, j’ai besoin de préciser les choses. Lorsque François m’a parlé de l’arrivée prochaine d'une nouvelle patiente, il n’a pas donné votre nom. Sur la même période, Nils, pour vous rendre service, a proposé les références de Simon. Parce qu'il a toute confiance en lui. Connaissant mon frère, il a dû vous préciser que Nils est mon meilleur ami. Et sûrement de l'effet désastreux de votre remarque sur lui. Cela explique sûrement que nous n’ayons pas crié sur les toits que nous nous connaissions. 

—Je…

—C’est de l’histoire ancienne, le coupé-je. Puisque vous vous êtes excusé, je sais. Pour Nils, cela a failli être la fois de trop. Il était réellement prêt à tout stopper. 

—Il aurait dû me rentrer dans le lard ! 

—Sa réplique était déjà un exploit, croyez-moi. Je vous avais réservé un traitement de faveur si vous aviez renouvelé les hostilités.

—Je n’en doute pas un instant. Mes excuses me semblaient suffisantes. Je réalise que mes mots s’additionnaient à beaucoup d’autres. Pensez-vous qu'il acceptera que nous en parlions ? 

—Je le crois. Son regard sur vous s’est modifié. 

Percuté par le soleil Où les histoires vivent. Découvrez maintenant