INSOMNIE

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Gabriel


Depuis la fusillade, Max ne dort plus que quelques heures par nuit. Elle passe le reste du temps à fixer le plafond, le regard vide et la mâchoire crispée. Elle ne me réveille jamais pour lui tenir compagnie ou discuter de ce qui la tracasse mais mon instinct est en alerte en ce moment. Je finis toujours par me réveiller moi aussi. Je n'aime pas savoir qu'elle attend bêtement à côté de moi pendant que je dors. Elle a besoin de repos et c'est ce qui m'inquiète et me pousse à garder les yeux ouverts avec elle.

Ces insomnies durent depuis plus d'une semaine déjà et je me demande quand elle va finir par s'écrouler. Elle ne peut pas tenir indéfiniment dans un état pareil. En plus du stress, la fatigue joue sur son mental mais aussi sur son pauvre corps qui ne peut pas en supporter d'avantage. Je crois qu'elle souffre de stress post-traumatique et j'aimerai tellement l'aider à aller mieux. Je donnerai n'importe quoi pour la soulager et faire disparaître les mauvais souvenirs qui l'empêchent de vivre en paix.

Pour l'instant, je ne peux rien faire d'autre que la soutenir en passant ma main sur son ventre et en lui montrant que je suis là avec elle. A mes caresses elle réalise que je suis éveillé moi aussi. Je voudrais qu'elle en profite pour me parler, me confier tout ce qui lui passe par la tête et la torture.

-Encore une insomnie ?

-Oui, répond-t-elle d'une voix dénuée de vie.

Il est deux heures du main et j'ignore depuis combien de temps elle est là à attendre que le temps passe.

-Tu as réussi à dormir un peu ?

-Une petite heure seulement. Ou peut-être deux, je ne sais pas trop.

-Il faut que tu arrives à dormir, bébé. Tu ne vas pas tenir le choc encore longtemps.

-Je sais. C'est juste que...

Les cauchemars.

Je sais qu'elle en fait chaque nuit depuis la fusillade. Ils maudissent et troublent son esprit à chaque fois qu'elle parvient à trouver le sommeil. Ce sont eux qui la tiennent éveillé pendant des heures, parfois même jusqu'au petit matin.

-Tu veux en parler ?

Je caresse machinalement la peau douce et chaude de son ventre en espérant qu'elle parvienne suffisamment à se détendre pour fermer l'œil.

-Il n'y a rien de nouveau à dire. C'est toujours le même cauchemar. La cabine de douche, l'attente, les pas dans le vestiaire et la porte qui s'ouvre au moment où je me réveille.

Malgré le ton monotone avec lequel elle me répond, je sais qu'au fond d'elle elle est terrifiée. La première fois qu'elle a fait ce cauchemar, elle s'est réveillée en sursaut et en sueur. Elle était dans tous ses états comme si elle revenait directement de ce vestiaire où elle m'a dit être restée cachée pendant la fusillade. Cette nuit-là, elle était si apeurée qu'elle m'a fait peur à moi aussi. J'étais terrorisé à l'idée que cette histoire ne la quitte jamais et je le suis toujours.

-Tu sais que tu ne risques plus rien, pas vrai ?

-C'est faux. Ça pourrait se reproduire. Personne ne sait quand ça pourrait nous retomber dessus. Il suffit qu'un autre malade prenne exemple sur celui-là et qu'il décide de faire son propre remake.

-Je ne veux pas que tu vives dans la peur permanente que ça pourrait recommencer. Je sais que tu es encore choquée par tout ça mais ce n'est pas non plus le genre de chose qui arrive tous les jours.

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