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NATE
Août 2022

– Maître Solenza, je vous présente votre client : Nathanël Delfino.

Je ne suis pas surpris en entendant le nom de mon avocat commis d'office. Le hasard fait très bien les choses. Et les services rendus aux bonnes personnes permettent des incartades favorisant mes intérêts.

C'est exactement ce que j'espérais.

Son odeur parvient à mes narines avant même que je ne la voie. Je la devine avant de la distinguer et le constat est grisant : elle n'a pas changé. Comme avant, son parfum à la vanille est acidulé d'une pointe de tabac froid. J'esquisse un maigre sourire, remarquant que les habitudes ont la vie dure.

Je n'ai toujours pas vu son visage, mais je l'imagine très nettement. Je me souviens de chaque trait, chaque tâche, je connais exactement la forme de ses lèvres et j'en imagine nettement la douceur, comme de la soie venue de Chine dont la chatoyance n'est plus à prouver.

Elle doit être estomaquée de me trouver là.

Et elle a bien des raisons.

Elle doit être furieuse, aussi.

Et là encore, elle a bien des raisons.

Je ne bouge pas, je reste de marbre, ne tournant même pas la tête vers elle au risque de me heurter à ses pupilles et d'y découvrir une émotion que je ne veux pas lire. Elle progresse lentement dans la pièce, je le sais car son odeur vanillée se rapproche et me chatouille de plus en plus les narines, mais ce phénomène ne se produit pas trop vite. Elle se laisse finalement tomber sur la chaise face à moi dans un timide et bref soupir qui s'apparente plus à un souffle coupé. Elle ne me regarde pas, mais je sens la tension s'installer immédiatement.

Je suis surpris de la connaître encore par cœur : l'anxiété l'assaille.

Là aussi, elle a bien des raisons...

Je n'ai pas prononcé un mot depuis son arrivée. Elle non plus n'a rien dit. L'atmosphère est pesante, mais elle ne me déplait pas pour autant.

Je suis à l'aise en dépit de la gêne ambiante. J'aurais très bien pu me défendre seul, j'aurais pu sortir en un rien de temps. Mais en dépit de mon inconscience permanente et ma nonchalance agaçante, je suis conscient que ce n'est que le début des problèmes et, quoi de mieux que de renouer avec son ex-copine avocate pour assurer sa défense ?

Me servir d'elle ne me réjouit pas et j'aurais pu culpabiliser si j'avais eu un autre choix. Mais je n'en ai pas. Personne ne me connait mieux qu'elle, personne ne m'a autant aimé.

En conséquence, personne ne peut me défendre mieux que Gabriella et parce que je la connais par cœur et que je sais qu'elle n'abandonnerait jamais quelqu'un qu'elle a chéri, ce choix d'avocat me semble être le plus pertinent.

Je pose mes coudes sur la table dans un geste lascif et croise mes doigts devant ma bouche. Ce rapprochement la fait frémir lorsque mon souffle finit par percuter son visage. Je ne le vois pas sur sa peau, mais je le ressens. Elle ne laisse rien transparaître, mais je la connais par cœur.

J'ose enfin lever les yeux vers sa figure. Elle ne me regarde toujours pas, alors j'en profite pour la détailler sans retenue.

Gabriella est, comme à son habitude, tirée à quatre épingles. Ses cheveux sont impeccablement coiffés en une jolie cascade de boucles disciplinées qui tombent sur ses épaules. Elle n'a pas eu le temps de boutonner sa robe d'avocate, certainement trop décontenancée par la situation, alors j'aperçois ce qu'elle porte en dessous. Elle est vêtue d'un joli costume bleu marine qui semble être d'excellente qualité compte tenu de la brillance du tissu et un haut blanc, certainement un body, car elle adore ça. Ce haut près du corps lui fait des seins d'enfer.

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