Chapitre 39

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 PDV Nader

— Ferme les yeux. Concentre toi sur le vent qui lèche ta peau. Sur les rayons du soleil qui réchauffent ton épiderme. Sur le bruit des oiseaux qui chatouille tes oreilles.

Emna se tient debout devant une Hina concentrée, tandis que je reste deux pas en arrière. Je ne suis toujours pas pour cette idée d'apprendre à la jeune femme à se transformer. Pourtant, quand je vois son application, quand je sens cette envie en elle, qui parvient à balayer ses angoisses, je me trouve un peu moins ronchon sur la question.

— Écoute les battements de ton cœur. Rattache-toi à toutes tes émotions, celles qui t'emplissent de l'intérieur.

Je sens la puissance d'Hina grandir, et si elle n'a pas l'air de s'en rendre compte, Emna comme moi captons sa bête qui s'éveille. Au fond, elle n'a jamais été bien loin. Surtout depuis qu'elle est en contact avec moi. Je n'imaginais pas que sa première transformation serait si rapide, mais j'ai comme l'impression que nous allons y parvenir sans trop de difficultés. Comme si toutes les barrières qui l'avaient contenues ces derniers siècles avaient totalement sautées. Ce n'est pas tout à fait faux.

Avant-hier, elle est parvenue à courir à une vitesse relativement importante. Encore loin du potentiel que lui offre sa ou plutôt ses conditions, mais tout de même, elle a su suivre le rythme imposé par Jeiran. Hier, Arman a réussi à décupler sa force. Elle ne fait le poids contre aucun d'entre nous, mais contre un humain, elle saura n'en faire qu'une bouchée.

Tout va vite. Bien plus vite que ce que je n'aurai pu imaginer. Mais en même temps, je n'arrive pas à m'en retrouver surpris. Depuis qu'elle est ici, ses capacités grandissent. Fort à parier que celles-si grandissaient dans l'ombre tandis que nous ne faisions rien de particulier pour les mettre en avant.

— Imagine ta forme lupine. La couleur de ton pelage. La douceur de ta robe, la taille de tes oreilles et de ta queue. Sens ton nez s'allonger et devenir museau. Tes ongles, griffes. Tes bras, pattes. Laisse ton imagination se libérer, d'un coup. Et profite.

Un sourire sur les lèvres de la blonde, qui se répercute sur celles de ma demi-louve. Et la seconde suivante, elle est sur ses pattes, comme si toute sa vie, elle avait su devenir animal. Sa louve est aussi blanche que le mien est noir. Aussi pure qu'elle ne l'est. Ses yeux restent vairons, et elle est toute chétive, adorable.

Elle lève une patte et l'examine, passe sa langue sur cette dernière avec douceur et perplexité. Puis, j'observe la louve gratter ses griffes contre le sol, et se retourner en essayant d'apercevoir sa queue. A l'image d'un chien, elle se met à tourner sur elle-même dans cette vaine tentative, tirant un rire sonore à Emna.

Le son lui fait relever le museau, et elle semble enfin saisir tout ce que lui apporte sa nouvelle forme.

Les sons, les odeurs, les couleurs décuplés. La connexion sans limite avec la nature qui nous entoure. Cette sensation de plénitude ultime. Elle reste assisse un instant, à recevoir tout cela, à faire face à la vague de sentiments que cela amène la première fois. D'autant plus dans son cas.

Et puis elle se relève sur ses pattes, et laisse exploser sa joie, une joie immense, qui finit de me convaincre. Peut-être que finalement, ce n'était pas une si mauvaise idée. La louve se met à sautiller partout, courir dans tous les sens, passer entre nos jambes avec plus ou moins d'agilité. Un boulet de canon, qui semble prendre un plaisir immense que je ne saurai lui retirer.

Je sens mon frère arriver sans le voir, et je sais qu'il observe un moment sans bouger avant de se transformer. Son loup aussi noir que le mien vient à la rencontre de la blanche, sans que cela ne me déplaise plus que ça. La relation qu'ils nouent m'interroge, sans pour autant que je ne veuille me pencher sérieusement sur la question. Elle semble simplement lui permettre de redevenir, le temps de quelques instants, la personne qu'il était avant de perdre son cœur. Il vient lui mettre un coup de museau, et comme un louveteau, elle le prend comme un jeu, et le lui rend. Il semble qu'elle parvienne à le ramener avec elle en enfance, et les deux s'engagent dans des chamailleries qui tirent un regard attendri à ma dominante, sortant de la demeure principale.

Avec le Destin - Notre Destinée Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant