Chapitre 53 Mother's daughter

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10:00 a.m

Tu te sens comment ?

- Comme quelqu'un qui revient au point de départ.

- Tu sais Lyne, il est encore possible de faire machine arrière.

- Nous sommes déjà arrivés, souffles-je.

Mon frère enclenche le frein à main et je regarde par la fenêtre. Cette maison me semble tellement différente, pourtant j'y ai passé toute ma vie. J'inspire au maximum. 1, 2, 3. J'expire. C'est trop tard pour revenir en arrière. Ma place est ici, elle l'a toujours été.

La main d'Isaac attrape la mienne et la serre de toutes ses forces. Lui aussi a fui cet endroit, il n'est là que pour me soutenir mais il repartira demain matin. Sa vie l'attend, je ne peux pas continuer de lui demander de rester à mes côtés.

J'ouvre la porte de la voiture, au même instant, la porte d'entrée s'écarte sur mon père. Il est étonné de nous voir. Nous sommes partis à cinq heures du matin, je n'ai donc pas eu le temps de le prévenir. Un sourire dévoilant toutes ses dents s'immisce sur son visage. Je sors du véhicule et attrape mon sac dans le coffre. Mon père avance d'un pas, puis deux. J'en fais de même, me concentrant pour ne pas que mes larmes coulent mais c'est trop tard.

Je lâche mon sac à mes pieds et cours dans les bras de mon père comme s'il était mon sauveur, mon héros. Il l'était quand j'étais enfant, alors pourquoi pas maintenant ? Dans ses bras je me sens comme la petite Jameelyne de quatre ans, prête à croquer la vie à pleine dent. Malheureusement pour cette petite fille, le destin l'a bien vite rattrapé, tout comme la vérité sur ce monde.

Papou !

Je me blottis tout contre lui. Sa tête et demie de plus que moi lui donne l'aspect d'une forteresse, me protégeant de toutes les guerres et de toutes les peines. Une petite larme glisse le long de ma joue. Ce n'est pas grave de faire preuve de faiblesse si ? Je sais que je me mens à moi-même, petite, c'était justement ça mon problème.

Ma faiblesse.

Qu'est-ce que tu fais là, Jiminy ?

Je souris contre sa chemise à l'entente de mon surnom. Depuis le plus loin que je puisse me souvenir, il m'a toujours appelé comme ça. Au début je trouvais ridicule d'être surnommé comme un criquet mais comme pour Pinocchio, il m'a avoué que j'étais sa chance et sa conscience. Depuis, je chéris chaque moment où il m'appelle comme ça.

Je me détache de son emprise, très vite rejoint par mon jumeau. Un peu en froid avec notre père, Isaac lui adresse une accolade polie et rapide puis se poste à côté de moi. Personne n'ouvre la bouche alors je propose qu'on rentre parce qu'il fait un peu froid au milieu des arbres.

Maman n'est pas là, elle fait des courses mais ne devrait plus tarder. Je suis soulagée de n'avoir que mon père, de suite, avec nous. Ma mère n'est pas forcément la personne qui me soutiendra alors si je préviens mon père en amont, il sera de mon côté. Il m'aidera.

Nous nous asseyons autour de la cheminée tandis que papou nous ramène des petites choses à grignoter et des chocolats chauds. Comme dans notre enfance. Instinctivement, je m'assois sur le vieux tapis de mes parents, devant le feu. Je croise mes jambes en tailleur et attends que la chaleur vienne caresser mon dos.

Alors les enfants, que faites vous ici ?

- Je ne reste pas longtemps. J'étais venu voir Lyne mais je vais devoir repartir pour les cours.

Mon père hoche la tête tandis que je joue avec mes pouces. J'aurai aimé qu'Isaac reste, qu'il m'aide à affronter la suite de ma vie, peu importe ce qu'elle sera mais ça serait égoïste. Mon pouce gauche ripe sur le droit et perd la partie. Je relève la tête, constatant deux paires d'yeux me fixer.

Existence - Tome 1 [TERMINEE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant