Existence - Tome 1 [TERMINEE]

Chapitre 54 Boston, Baby

 1:00 p.m

Un dérapage rocambolesque perce la sérénité des bois entourant la maison et provoque une envolée d'oiseaux, spectaculaire. Le bourdonnement des basses imprègne notre petite cour de sa musique country. Je reconnais de suite la voix grave et sensuelle de Josh Turner envoûtant tout mon être de sa chanson Your Man.

Je dévale le perron pour rejoindre la superbe Chevrolet Impala louée pour l'occasion. Le toit s'abaisse pour découvrir une petite tête brune habillée comme Brigitte Bardot dans ses heures de gloire. Un sourire béat se dessine sur ses lèvres et sur les miennes. La mannequin s'extirpe du véhicule en sautant par-dessus la portière, rappelant ces films des années 80, comme Footloose.

Nous nous jetons dans les bras l'une de l'autre à l'image de ces relations à distance sur le quai des gares. Pourtant, nous nous sommes vus avant-hier. Son excitation déteint sur moi, pour me transformer en une adolescente survoltée à la veille de ses premières vacances sans ses parents. Nous sautons sur place comme des gamines en chantant les paroles du country boy.

La porte d'entrée claque brutalement, nous ramenant sur terre. Nous nous retournons vers la maison de mon enfance, voyant mes parents nous rejoindre. Je dois avouer qu'une petite pointe de fierté s'imprègne dans mon esprit. Ma mère ne pensait pas que je pouvais me faire des amis, mes colocataires étant certainement une invention de ma part. Mais voilà que la mannequin se présente à eux, aussi normale qu'une personne puisse paraître.

- Bonjour, vous devez être Monsieur et Madame Pierce ! Rory, enchantée, tend-t-elle la main.

Mon père la saisit tandis que ma mère la détaille de long en large et en travers, sûrement en quête d'un quelconque défaut. Surement que mon amie en a, mais visuellement, elle ressemble à l'étudiante populaire, bien sous toutes les coutures. Ce type de femme polie, belle-fille à couper le souffle, amante incroyable, femme d'affaire accomplie et mère irréprochable. Sophie ne peut que l'aimer. Elle est tout l'opposée de moi.

- J'emmène votre fille en road trip à Boston !

- Tu n'as pas peur de te retrouver coincée avec elle dans une ville inconnue ? demande ma mère en plissant les yeux.

Rory coule un regard vers moi, ébranlée par les mots de ma génitrice. J'ai envie de lui dire qu'à la longue on finit par s'y habituer mais ça serait mentir.

- Au contraire, rigole-t-elle, votre fille est incroyablement amusante, joviale, altruiste, brillante et attachante. J'aimerai pouvoir en dire au moins un cinquième pour moi mais ce n'est pas le cas. Donc je dirais que je suis plutôt honorée de sa présence, me sourit-elle. En revanche vous, je vous trouve plutôt désagréable et ardente donc je suis ravis de l'enlever d'entre vos griffes pour lui faire aimer la vie, ce que visiblement vous n'êtes pas prête à faire pour elle, claque-t-elle sa langue.

Nous restons interdits pendant quelques minutes qui semblent être des heures. Je crois que c'est la première fois de ma vie que j'entends quelqu'un s'adresser à ma mère de la sorte. Mon père réprime un sourire mal placé qui ne m'échappe pas du tout tandis que ma mère bouillonne à côté de lui, la bouche grande ouverte.

- Bien, maintenant que les présentations sont faites je pense que nous allons partir. Nous avons pas mal de route avant d'arriver, embrasses-je mon père à travers une accolade, je t'aime papou.

Je fais un signe de main à ma mère qui n'a pas l'air de s'en être remise et monte côté passager de la décapotable après avoir mis mes bagages dans le coffre. Mon père donne une embrassade à mon ami tout en lui chuchotant quelque chose à l'oreille, chose à laquelle la mannequin répond à la positive. Rory n'ajoute pas un mot de plus à ma mère puis monte dans la voiture à son tour et démarre dans un nuage de fumée.