50. Capacité obtenue : crise existentielle

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Est-ce que je veux que les autres assistent à ce procès ?

La réponse s'impose à moi sans même une seconde d'hésitation. Non. Bien sûr que non. Qui voudrait que ses proches soient là le jour de la révélation de ses crimes ? Personne de sensé.

Ça me ferait l'impression de convier des proches à un banquet empoisonné. Quoique je n'ai jamais assisté à un banquet. Et que je ne sais pas si ils me considèrent encore comme l'une de leurs proches, même si j'aimerais que ce soit le cas.

Les visages de Kyoka, Mina et Eijiro s'imposent à ma vue. Toute la classe se succède dans mon esprit, et je rirai presque désormais des broutilles qui me sont arrivées tellement elles me paraissent désormais insignifiantes et plus vivables que cette audience qui se rapproche à grands pas.

Pourtant... pourtant je ne peux pas leur interdire de savoir la vérité. Je n'en ai pas le pouvoir, je n'en ai pas non plus la volonté. Je la leur dois.

— Laissez leur le choix, monsieur. Ils sont libres de venir ou non, vous l'avez dit vous même. Et si c'est ce qu'ils choisissent, je préfère qu'ils apprennent la vérité de ma bouche plutôt que celle, déformée, des médias.

Peut-être que je me surestime un peu en pensant que la presse en fera tout un plat. Sans doute suis-je en train de me croire plus importante que je ne le suis. Après tout, je ne sais même pas quelles conséquences a eu le drame d'il y a six ans.

Je n'en ai pas eu l'occasion.

Je balaie cette partie de moi dans un coin de ma tête, là où elle était rangée jusqu'à présent, et me concentre sur le mur gris devant moi. C'est tout ce dont je dois me préoccuper.

Encore une fois, les visages de mes camarades me viennent à l'esprit. Se superposent à eux deux visages plus sombres. Familiers. Trop familiers.

Je frissonne.

Durant les derniers jours, j'ai l'impression que mes cauchemars n'ont fait que s'amplifier. D'autant plus que dormir est on ne peut plus délicat dans cette position, et que je somnole la moitié du temps.

Je rêve de créatures venues des fonds marins qui m'arrachent ma famille, de pistolets aux canons luisants pointés sur ma tête, à des mains glaciales qui me tordent le cou, aux élèves qui me traitent comme un monstre, et la liste est bien longue.

Quand Aizawa finit par repartir, il me semble que c'est à la fois des heures après mes derniers mots et à peine un instant plus tard. Je passe des jours entiers dans un état léthargique, mangeant à peine ce que des gardiens me permettent de manger.

Le procès approche.

Les murs tournent autour de moi. L'horloge aussi, même si je n'en vois pas, de là où je suis. Peut-être y en a-t-il une pas loin. Mais je ne sais pas. Je ne sais plus.

Je regrette d'avoir dit à Eraserhead de leur avoir laissé le choix.

Je regrette tout.

Ils ne doivent pas assister à ça.

Ce sera un carnage, je le sens. Je le sais.

Je regrette de ne pas leur avoir dit plus tôt. Ça n'aurait pas fait autant mal.

Je regrette d'avoir été si désagréable avec eux au début. Je regrette de ne pas avoir assez profité du temps qui m'était imparti dehors. De m'être montrée ingrate avec tout le monde. D'avoir encore peur de gens sûrement morts. D'avoir été tétanisée face à l'Autre.

Plus que tout, je regrette de ne lui avoir rien dit à lui.

Katsuki Bakugo.

Étonnant comme le cœur joue avec mon cerveau. Comme il me prend par surprise pourtant lentement, m'affectant d'un mal que je n'aurais jamais cru pouvoir demander.

Lonely Wolf (Katsuki x oc)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant