51. Tout ce que je n'ai pas voulu, finalement

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L'éblouissement m'oblige à baisser la tête et les yeux vers le sol de marbre blanc veiné de noir et d'ambre.

La salle me paraît maintenant gigantesque, et pourtant les sons sont presque inexistants. Seuls nos pas résonnent doucement à travers la pièce. Le décalage entre cette douceur et la violence qui nous a amenés ici me paraît presque irréelle.

Je relève la tête lorsqu'un pupitre haut en bois sombre entre dans mon champ de vision. La brûlure des regards de toute la salle me frappe.

Je suis au centre du tribunal. A la barre.

En face, surélevés, les jurés encadrent les juges, en tenues noires et blanches, les visages sévères, et les bras entourés d'épais dossiers. A leur droite, je capture le regard d'un magistrat plus jeune penché devant un ordinateur, qui écrit frénétiquement. Il détourne le regard aussitôt.

A ma gauche, dans une tribune, celle qui doit être le procureur. Une robe de magistrat aussi, quoique rouge, un regard sévère, des cheveux grisonnants. D'autres visages l'entourent, pour la plupart d'âges mûrs.

A droite, une espèce de cage de verre, vide, se plante à l'extrémité d'une deuxième tribune dans laquelle mon avocat, précédemment debout, se rasseoit. Autour de lui, je distingue notamment Nezu et son habituel costume et un homme de la commission que je reconnais.

Grand et maigre, les cheveux pour la plupart inexistants, il semble vouloir se trouver partout ailleurs plutôt qu'ici. Je ne sais pas ce qu'il fout là, mais à mon sens, il mérite aussi de se retrouver à ma place.

Si je devais ne le décrire qu'en un mot, ce serait le suivant.

Corrompu.

Ou idiot.

Une nouvelle enflure qui préfère me jeter au fond d'un trou plutôt que de régler directement un problème. Et deux fois, en plus.

Je me souviens sans mal de son malaise, de la façon dont il se dandinait sur ses appuis et de son tic de faire tourner sa moustache entre ses doigts.

L'un des seuls jours où je l'ai vu, il ordonnait de m'enfermer dans un appartement, et me préconisait de rester sage d'un air à la fois apathique et inquiet pour sa propre survie. La fois d'avant, il n'avait guère agi plus héroïquement. Il a même été pire. C'est un idiot qui délègue les responsabilités pour ne pas avoir à regarder les conséquences en face.

Il ne me regardait même pas dans les yeux, préférant fixer son regard sur les murs encore blancs à ce moment-là, plutôt que de découvrir l'état dans lequel j'étais. Lâche. C'est un lâche qui a enfermé une enfant avec elle-même.

Je suis autant en colère contre moi que contre ceux qui n'ont rien fait pendant des années, pour revenir ici aujourd'hui et se qualifier de sauveurs.

Il n'a levé les yeux sur moi, pendant les courtes heures durant lesquelles il avait ma charge, que pour m'annoncer brièvement et sans gants que j'étais maintenant seule, et m'a balancée dès la première occasions droit aux oubliettes.

Je reconnais aussi le jeune héros bleu à l'aileron à qui j'ai brièvement parlé avant "d'agresser" quelqu'un.

Quelques professeurs de Yuei, et des gens que je ne connais pas sont assis.

Je ne me retourne pas pour voir ce qu'il y a derrière moi. Je le devine assez bien déjà. C'est un poids qui appuie sur mes épaules secrètement, plus durement que les mains des deux flics qui ne m'ont lâchés que pour porter des flingues sur mon corps frissonnant.

J'ai froid. J'ai faim. J'ai peur.

Trio gagnant.

Les regards ne m'ont pas quittée d'un pouce depuis que je suis entrée. Ils viennent de tous les côtés, faisant de moi une bête blessée acculée au fond d'une ravine, les chasseurs dardant leurs armes sur moi.

Lonely Wolf (Katsuki x oc)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant