Rester pour vivre encore un peu

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Alison

« Je suis à l'intérieur du salon, dans ma maison d'enfance. Mes yeux fixent le corps de mon grand frère qui est écrasé sur le sol. Son visage est couvert de sang. Mon père est au-dessus de lui, debout, sans aucune égratignure. Un grand sourire aux lèvres, satisfait de ce qu'il vient de faire vivre à son fils, est comme figé sur son visage. Il s'est soulagé de toute sa haine et le revoilà. Il réalise ce qu'il se passe.

La colère redescend pour faire place à un autre sentiment : le dégoût...

-C'est de ta faute tout ça, Alison. Me hurle-t-il, les yeux larmoyants. Regarde ce que tu fais subir à ton frère. À ta famille. Regarde !

Je ne croise pas ses yeux, si je le fais, c'est moi qu'il frappera en plus et ce n'est pas ce que mon frère voudrait. 

Ses mots sont quasiment les mêmes que la dernière fois, pourtant, ils me transpercent le corps de la même manière à chaque fois.

-Regarde ce que ton frère subit par ta faute. Me reproche mon paternel à pleins poumons, laissant sa bave atterrir par terre. C'est à cause de toi que notre vie a été détruite. Je regretterais toute ma vie ta putain de naissance.

-Ali... Cache-toi. Articule mon frère, à bout de souffle sans une note haute.

Je ne peux pas bouger, paralysée par cette peur qui me prend aux tripes. J'ai le corps emprisonné dans du ciment, je ne peux plus faire aucun mouvement. Même si toute la volonté du monde venait à m'aider, je ne bougerais pas d'ici.

Il m'est impossible de laisser mon grand frère seul avec cette brute. Alors, pris d'un élan de courage, venu de nulle part, je lève la tête et fais face aux regards verts de mon cher père.

Ce n'est pas un simple regard, c'est un défi.

D'un échange neutre, je provoque mon pire cauchemar pour la première fois depuis ma naissance. Aujourd'hui, je suis en âge d'encaisser les coups, mon frère ne mérite plus ça. Toute cette douleur, c'est de ma faute.

Tout est de ma faute finalement...

-Aller, c'est à ton tour. Sale gosse !

Il me prend d'une poigne si forte qu'il m'est impossible de m'en détacher. Je ne peux pas me défendre contre lui alors je crie. Je ne peux me confronter à mon père, ma force ne vaut même pas la moitié de la sienne, alors je hurle de toutes mes forces. Ma voie a beau se casser dans ma gorge, il continue à m'attacher les pieds et les mains, sur cette chaise.

Il m'envoie son premier coup puis un deuxième mais ma peur ne vient pas à ce moment-là. C'est lorsqu'il sort cette lame de couteau dans l'un des tiroirs de la cuisine que la peur naît enfin. Il déchire mon t-shirt avec et pointe le bout de la lame sur mon cœur sans appuyer.

-Je suis persuadé que même si je la plantais dans ton cœur, tu ne mourras pas. Une enfant comme toi ne peut pas avoir de cœur après avoir volé celui des autres.

Mes larmes coulent alors que mes yeux restent bloqués dans les siens. De l'eau salé dévalent mes joues, ma panique augmente alors qu'il dévie la trajectoire de sa lame pour me faire une entaille sur le bas de mon sein près de mes côtés.

J'ai pour seule vision, le regard satisfait de mon tortionnaire.

Il souffre et il veut me voir souffrir pour lui avoir tous pris. Pour la mort de sa bien-aimée. Pour la mort de ma propre mère. 

La Silencieuse |Tome 1|Où les histoires vivent. Découvrez maintenant