Chapitre 35

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 Marine s'était levée de bonne heure. Elle avait senti un flocon de neige lui effleurer la joue et le contact froid de l'eau gelée l'avait réveillée en douceur. La jeune fille avait attendu que les garçons ne se réveillent, au chaud dans ses couvertures, avant de se lever. La neige avait tout recouvert pendant qu'ils dormaient. Marine découvrit avec ravissement la forêt enneigée sous un soleil d'hiver.

Un froid sec régnait dans le bois. Il devait y avoir au moins trente centimètres de neige, dont la surface avait gelé et permettait de marcher dessus au sec, en tout cas ils pensaient que c'était le cas mais seulement par endroits. Le froid était de loin ce qu'il y avait de pire. Mais la jeune fille n'en souffrait pas contrairement aux garçons, elle mit cela sur le compte de sa robe noire, d'origine inconnue, qui devait la maintenir au chaud.

Ils avaient ensuite pris un copieux petit déjeuner tous les trois autour du foyer du feu de la veille, aujourd'hui installé sous une petite couche de gel. Ils mangèrent en silence, Maxime était frigorifié et Yan était secoué de nombreux frissons.

Ils commençaient à avoir vraiment froid. La nuit dernière, le temps avait été bien plus clément. Ils avaient tous les trois discuté jusqu'à une heure avancée de la nuit, ils n'étaient donc pas très en forme quand la réverbération de la lumière solaire sur la glace s'en vint à les réveiller.

Yan insista pour que leurs affaires soient rassemblées le plus tôt possible. Il disait qu'il fallait absolument qu'ils quittent cette forêt car il avait un mauvais pressentiment, un très mauvais pressentiment. Le représentant humain affirmait que le seul moyen d'écarter ce sentiment était de partir le plus vite possible. C'est pourquoi lui et Maxime s'affairaient dans leurs coins pendant que Marine attendait.

Ça ne la dérangeait pas, d'attendre. Elle observait la neige. La glace avait tout recouvert et le gel avait tout figé dans la forêt. La jeune fille s'avança entre les arbres en regardant les marques de givre sur l'écorce des colonnes de bois. Pour quelqu'un qui n'avait pas l'esprit ailleurs, il se serait inquiété de rester à proximité de Yan et de Maxime, mais Marine était absorbée par la beauté de la glace, à un tel point qu'elle en oubliait le froid qui la menaçait. Elle aimait tellement la vision de la neige sous le soleil. L'eau gelée formait une miroir glissant sur le sol, elle brillait comme si elle était formée de cristaux.

La neige avait envahi de sa blancheur toute cette forêt qui la veille paraissait bien plus effrayante dans l'ombre de la nuit. La jeune fille vit les branches et les troncs des arbres briller, des gouttes de rosées avaient gelé avant de pouvoir atteindre le sol. Marine effleura du bout des doigts une petite branche qui en portait une bonne dizaine. L'eau était bien figée. La branche se balança doucement. La jeune fille se mit à sourire.

Pour elle, cette forêt était un endroit magnifique, l'eau y avait tout recouvert. Marine regarda derrière elle en rendant compte qu'elle s'était éloignée des deux autres. Elle se demanda si elle était vraiment obligée d'aller les retrouver tout de suite. La jeune fille aimait se promener entre les arbres et regarder ce que le froid avait envahi, elle se sentait enfin libre. Loin de tout. Elle constata avec amusement que les traces de ses pas étaient à peine visibles sur la neige.

Elle allait se pencher sur ce phénomène quand il lui sembla entendre un bruit. Marine regarda autour d'elle, elle était certaine d'avoir entendu quelque chose. On eut dit un murmure venant du bout du monde. La jeune fille chercha du regard la cause de ce bruit. Il n'y avait que des arbres autour d'elle, des arbres et de la neige. Elle se dit que l'enfermement lui avait fait perdre un peu les pédales.

Soudain, le bruit inconnu se répéta. Cette fois, Marine était sûre de ne pas avoir rêvé. Elle allait avancer en direction de cet étrange son quand il se renouvela une troisième fois. Marine sentit son cœur se serrer dans sa poitrine. Elle se mit à marcher entre les arbres. Sa mère, elle était certaine d'avoir reconnu sa voix.

Les bruits se répétèrent, moins espacés, de plus en plus nets. Maintenant c'était une évidence, sa mère était là, quelque part, elle l'appelait.

– Marine. Marine.

C'était comme si sa mère lui murmurait son prénom. Sa voix était loin et proche à la fois, elle revenait comme un écho mais sans se répéter, elle semblait être chuchotée juste à côté d'elle et pourtant elle l'entendait distinctement.

La jeune fille marcha dans la neige sans s'y enfoncer pendant un moment. Elle marchait tout droit, comme guidée par une force inconnue vers la source de ces bruits. Sa maman.

Marine crut apercevoir une ombre avancer entre les arbres, droite et mince. Sa mère, ça ne pouvait être qu'elle. La jeune fille se dirigea vers l'ombre. Elle arriva dans un endroit un peu dégagé.

Rien. Il n'y avait aucune trace de sa mère. La jeune fille ne comprenait pas pourquoi sa mère n'était pas à cet endroit, elle avait pourtant vu quelqu'un à l'endroit où elle se tenait. Elle aurait dû au moins trouver quelqu'un, même si ce n'était pas sa mère. Comment il ou elle ou sa mère avait fait pour partir aussi rapidement ? Et même si c'était un animal, ce dont elle doutait fortement, il aurait fait un bruit monstrueux en s'enfuyant.

Un craquement douteux attira l'attention de la jeune fille. Cela venait de sous ses pieds. Marine baissa le regard et découvrit son propre reflet. Elle se trouva très pâle, ses lèvres étaient rougies par le froid et ses cheveux bruns semblaient plus sombres que d'habitude. C'était peut-être à cause de cette robe noire. Marine surprit à se trouver jolie dans cette tenue.

Mais elle fut tirée de sa contemplation quand elle découvrit ce qui lui offrait se moment de narcissisme. Elle était sur une mare gelée. Le point d'eau étant lui-même plutôt profond et la glace étant elle-même plutôt fine, cela n'inspirait pas la confiance. Mais Marine n'éprouva aucune peur. Elle regarda le reflet des branches d'arbres du ciel dans la glace.

Soudainement, une ombre passa sur la mare gelée. Marine se demanda si le temps se couvrait, mais les rayons du soleil qui faisaient toujours briller la neige étaient toujours présents.

Marine remarqua qu'un léger bruit subsistait à ses pieds, elle découvrit quelques fines fissures blanches se dessiner sur la glace. La jeune fille comprit alors avec horreur que sa situation était dangereuse. Elle étouffa un cri qui fit plus de bruit qu'elle ne l'aurait souhaité. Et brusquement, la glace céda sous Marine en provoquant un craquement affreux. 

L'Avarielle - La légendeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant