La plaine s'étalait là, en ce début d'hiver. Le froid n'était pas encore présent mais la chaleur manquait cruellement, tout comme la lumière. De grands nuages voilaient le soleil en signe du mauvais temps. L'herbe y était jaunie à cause de l'humidité grandissante. Les brins se roidissaient, trop gorgés d'eau pour pouvoir rester droits et fiers. La végétation était d'un bien triste aspect et portait parfois les marques d'une prochaine décomposition. Les brins d'herbes dansaient sous le vent et portaient sur eux les fraîches perles de la rosée du matin, de la pluie et de l'eau salée de la mer. L'air portait toutes sortes d'odeurs mais celle de la mer était la plus forte.
Car elle était toute proche. Ses vagues se calmaient après cette longue nuit de tempête. Il y avait même là quelques oiseaux qui venaient en chantant, passer au-dessus de la plaine. L'écume s'étalait sur les galets qui formaient la plage. Le calme régnait dans ce beau paysage.
La falaise surplombait la mer et soulignait la plaine. La pierre et la terre noire offraient un spectacle saisissant avec la blancheur de l'écume. Elle était d'une hauteur vertigineuse et rares étaient les animaux ne s'y frayaient un chemin, même les plantes l'avaient désertée. La falaise était souvent sujet au défoulement de la colère des eaux, c'était pour cela qu'elle n'abritait aucun oiseau. En une avancée, quoique exclue de la plaine, se dressait autrefois un château qui n'était plus que ruines en ce jour. La tourelle qui servait de donjon s'était effondrée sur la cour intérieure, les habitations semblaient avoir été balayées par le vent. Il n'y avait pas âme qui vive dans les vestiges de la forteresse.
Tout semblait l'avoir désertée.
Les couloirs du palais avaient été envahis par les gravats, le sol et le plafond se confondaient parfois dans les salles. Tous les objets qui autrefois peuplaient la vie de ses habitants avaient été emportés. L'eau avait envahi les caves et les souterrains. C'est pourtant à cet endroit que, lorsque le plafond s'était détaché de son étage, qu'il avait fait le plus de dégâts en éventrant l'un des murs et laissant l'eau pénétrer, épargnant cependant l'entrée de la pièce. De cette ouverture, l'on avait une vue dégagée sur la plage de galets et la falaise noire.
C'était dans cette salle qu'il y avait une jeune fille. Endormie à vrai dire, portée par l'eau de moitié et posée sur la roche qui formait autrefois le plafond et maintenant la seule surface hors de l'eau de la salle. Marine dormait sur l'eau, insensible à la température glaciale des flots. Curieusement elle ne portait plus les vestiges des vêtements de cuir et de la petite robe de toile que lui avaient donnés les Freyens et puis Ryan.
À présent, la jeune fille, de douze ans maintenant, portait une robe ancienne, rappelant les beaux vêtements de ces dames du Moyen-âge. Le tissu noir et argenté se mariaient parfaitement et renforçaient la pâleur de son teint et l'ombre de ses cheveux. Dans la salle on entendait que le murmure que l'eau et la respiration calme de la jeune fille. Le silence résonnait dans la forteresse.
Les roulements de quelques galets sur la plage virent rompre l'enchantement de cette paix. Un homme d'une cinquantaine d'années entra par la grande ouverture de la pièce. Il avait l'aspect d'un maraudeur dans sa chemise de lin défraîchie, son jean troué et sa cape miteuse. Il sembla étouffer une exclamation de stupeur et partit en courant en direction de la jeune fille. L'homme la tira hors de l'eau et se pencha sur elle en lui parlant.
Marine ne savait pas ce qu'il lui disait mais il lui sembla l'entendre, sa voix lui parut éloignée. La jeune fille ouvrit les yeux lentement et découvrit les yeux bleu éclatant de cet homme qui lui demandait de se réveiller.
Marine se redressa lentement en regardant autour d'elle. La forteresse était dans un sale état, il n'y avait plus de Freyen, plus de cris, plus de seigneur, plus rien, le silence l'étonna. La voix de cet homme la frappa soudainement. Elle l'observa. Il avait les cheveux châtains plutôt longs et mal entretenus, une barbe de quelques jours seulement et un teint rosé.

VOUS LISEZ
L'Avarielle - La légende
ParanormalEn un bois perdu et glacial, où la neige et le froid avaient tout recouvert, où le vent même avait cessé de souffler tant la température était basse. En ce bois, il n'y avait pas âme qui vive. Tout avait gelé et sur les sombres branches des arbres o...