« Lise... c'est moi. Encore. Qu'est-ce que tu fous, putain ? Pourquoi tu ne me réponds pas ? Arrête de filtrer mes appels. Arrête de filtrer mes sms, mes mails et tout ce bordel ! Je me suis excusé un bon millier de fois, tu veux quoi de plus ? Putain mais répond qu'on puisse en parler, au moins ! ... Oh et puis merde. Si tu veux faire ta sale gamine capricieuse, fais-toi plaisir. Je suis assez grand pour ne pas avoir à me justifier sans cesse de mes faits et gestes. Je n'ai de compte à rendre à personne, et surtout pas à toi. En attendant, quand je rentre, t'inquiètes pas que tu ne vas pas t'en tirer comme ça. Tu ne pourras pas me filtrer moi. Je compte bien avoir une petite discussion avec toi, quitte à te harceler. ... Merdeuse. »
Ce message, Lise l'écoutait encore et encore depuis leur retour de New-York. Elle l'avait reçu quelques jours après qu'ils aient repris le travail. Voilà maintenant six semaines...
- Bon... tu veux la version sympa ou la vérité ? s'irrita Nolan.
- Tu as deux versions ? contre-carra Lise en se moquant de lui.
- Non. Mais je peux inventer la partie sympathique, si tu veux.
- Arff... D'un signe évasif de la main, elle devina : je suppose que tu vas m'engueuler de toute façon...
- Oui. Je t'ai déjà dit ce que j'en pensais dans l'avion, mais tu ne m'as pas écouté. Alors je vais te le redire jusqu'à ce que tu m'entendes. Cette situation est d'un ridicule épouvantable.
La jeune idole soupira. Bien sûr que si, elle l'avait écouté. Mais il se trompait tellement... Qu'osait-il traiter de « ridicule » exactement ? Le fait qu'elle soit amoureuse d'un garçon qui préférait ne pas s'en rendre compte ou que ce-même garçon lui préfère une parfaite inconnue ? La seule chose ridicule ici, c'était plutôt qu'elle se languissait d'un abruti qui privilégiait le mensonge par omission. Parce que oui, malgré toute cette épouvantable histoire, elle continuait de l'aimer, ce sombre crétin ! Y avait-il plus pathétique que cela ? Elle en doutait. Dire qu'elle révérait le souvenir de leur baiser alors que cela ne signifiait rien pour lui... Quelle cuisante humiliation. Mais après tout, n'est-ce pas sa faute à elle, pour s'être ainsi bercée d'illusions ? Ce n'était pas comme si Raphaël avait un jour manifesté le moindre intérêt amoureux pour elle.
Et pourtant, malgré tout, dès que Winnie lui avait fait cette horrible révélation, une partie de Lise s'était éteinte. La petite lumière qui faisait d'elle ce qu'elle était s'était étiolée. Elle avait toujours su que Raphaël n'était pas littéralement à elle et qu'un jour il leur présenterait une fille. Enfin, une petite amie - ces mots lui firent mal. Toujours est-il qu'elle avait pensé avoir le temps de s'y préparer, ou peut-être même d'avoir tourné la page avant que ce moment maudit n'arrive.
Non, en fait elle se mentait à elle-même. Elle avait juste espéré qu'il ne tomberait pas amoureux d'une autre. Elle savait au fond d'elle même qu'elle serait éternellement amoureuse de Raphaël Deacon. Et c'était douloureux de se rendre compte que la réciprocité n'était pas vraie... En outre, il n'y avait pas que la Lise amoureuse qui avait été heurtée. Chaque fois qu'elle repensait à tout ceci, la même question trottait dans sa tête ; pourquoi lui avait-il fait son sketch du meilleur ami désolé si c'était pour lui mentir encore ? Parce qu'il ne lui avait clairement pas tout dit. Elle ne comprenait pas non plus pourquoi il ne lui avait pas parlé de Winnie si elle comptait tant que ça pour lui. Elle l'aurait mal vécu, oui, parce qu'elle était amoureuse de lui, mais au moins elle aurait été au courant ! Là, il l'avait consciemment mise de côté. Et cette phrase qui tournait en boucle dans sa tête.
Pour embrasser, il faut des sentiments.
A bout de patience, mortifiée de honte, fatiguée de revenir encore et toujours sur les mêmes événements, elle quitta le sofa de la salle de repos de l'agence et se dirigea vers la salle de sport, un peu plus loin vers l'arrière du bâtiment. Elle avait espéré semer Nolan mais il la suivit tranquillement, bien décidé à lui ouvrir les yeux - ou du moins à le tenter.
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Ouvrir les yeux
RomanceJe n'ai rien eu besoin de plus que ton sourire pour tomber amoureuse. Tu as du charme, tu le sais ? Je me croyais immunisée contre ça, contre toi. Mais c'est ma faute : je n'aurai jamais dû avoir envie de te connaître, je n'aurai jamais dû avoir env...