Chapitre 7

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Chapitre 7

— C'était délicieux, madame Dumas.

— Catherine, enfin, gloussa-t-elle en le remerciant.

Ce supplice n'allait donc jamais prendre fin ? Deux heures que ce repas s'éternisait, que les insipides conversations de convenances s'enchaînaient et que je désespérais de le coincer. Quand mon père allait-il se lasser de cette fausse humilité ? Quand ma mère allait-elle s'ennuyer de ce petit sourire calculé ?

— Je vais aller préparer le café, lança-t-elle.

Tandis qu'elle rassemblait déjà nos couverts, Devlin, ce maudit rat dont la rouerie ne connaissait aucune limite, la devança en rassemblant les assiettes.

— Permettez que je vous aide. C'est bien la moindre des choses, après votre accueil chaleureux et ce succulent dîner.

— Quel jeune homme bien élevé, s'extasia-t-elle.

— Anastasia, tu as trouvé la perle rare, approuva mon père, fier du choix dont ce malheureux quiproquo m'avait affublé.

Cette fois, c'en était plus que je n'étais disposée à en supporter. Cette fois, il allait me le payer.

— Reste assise, maman, dis-je en me relevant.

Puis, le prénom me lacérant déjà la gorge, m'écorchant déjà la langue et les lèvres, j'annonçai en signant sommairement :

— Tom et moi allons préparer le café.

« Attends, je viens vous aider, résolut Léo. »

— Vous êtes sûrs ? s'enquit ma mère.

— Certain, ma... Catherine, osa-t-il devant la mine renfrognée.

Les mains prises par le restant de tarte meringuée, mon petit frère fila vers la cuisine. De notre côté, Tom emporta les assiettes à dessert et les couverts, et je rapportai la bouteille de champagne à moitié vide, muselant la grimace qu'engendrait le lancement martyrisant mon autre bras. La douleur se réveillait ; et lorsque je notais les vingt-trois heures tapantes sur l'horloge numérique du micro-ondes, j'en compris la raison.

— Donne, entendis-je.

Le temps que je prenne conscience de lui, sa main me débarrassait de la bouteille de champagne. Tout sourire, Léo lui tendit le bouchon. Et tandis que mon frère s'amusait à préparer le café, Devlin rangeait la bouteille au frais.

— À quoi tu joues ?

Imperméable à cette attaque, il pivota. La respiration tranquille, il accrocha ses yeux noirs dans les miens. Une main sur le comptoir en marbre, il patientait que je poursuive mon accusation, que je l'informe du crime dont je l'accablais ; et cette attitude, plus que toutes les courbettes qu'il avait sciemment faites, embrasa les poudres.

Serrant le poing pour combattre la douleur qui irradiait de mon épaule à mon coude dans l'écharpe, je m'avançai, prête à l'envoyer au pilori, que mon petit frère signa à notre intention :

« J'apporte les tasses. »

Un plateau entre les mains, fier d'endosser cette responsabilité que ma mère lui refusait depuis qu'il avait malencontreusement sursauté en prenant peur l'année passée, il fila dans la salle à manger sous l'attention acérée de Devlin. Quel plan fomentait ce rat ? Je n'avais aucune intention de le découvrir, car je n'allais pas lui laisser le temps de l'ourdir.

— Écoute-moi bien, menaçai-je de mon index gauche. Je ne sais pas à quoi tu joues, mais si tu t'avises d'impliquer mon frère de quelque manière que ce soit...

Tel est pris...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant