Chapitre 18

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Chapitre 18

17 décembre 2023

— J'aurais tellement voulu voir sa tête ! La voir se décomposer... ramer... se dépiter...

— Alex !

Hilare, mon meilleur ami énumérait les désarrois d'Angie. Il s'extasiait de mon récit comme un enfant le matin de Noël, jubilant des difficultés que la simple ombre de Devlin prodiguait dans sa parfaite existence... et en oubliait l'essentiel : le bourbier dans lequel je m'étais allègrement engluée.

— Pardon, toussa-t-il. C'est vrai, revenons-en à notre sujet : Tom Devlin. Qu'est-ce que tu vas faire ?

— Comment ça : qu'est-ce que je vais faire ? Je vais poursuivre ce stupide plan. Retirer l'argent, supporter Devlin Charmant...

— Devlin Charmant ? rit-il.

— ... et espérer qu'il acceptera l'utilisation de la clause de prolongation afin de passer mes partiels sans stress supplémentaire à la rentrée, histoire de bien profiter de mes vacances, ruminai-je.

— Comme si tu allais vraiment profiter de tes vacances de toute façon, soupira Alex.

S'étirant dans un premier temps, il plongea dans un second sa main dans la boite de chocolat que mon frère, soucieux de mon moral, m'avait ramené jeudi en sortant de l'école. Paisiblement, il ôta l'emballage et eut l'audace de commenter :

— Ce qui t'ennuie vraiment, c'est que tu n'auras pas le temps de prendre de l'avance sur le prochain semestre. Et ça... ça, ça te rend malade.

— Ridicule, persiflai-je.

Vexée de cette vérité à laquelle je refusais de me confronter, je pivotai sur mon siège de bureau et retournai à l'impression des nouvelles fiches qu'il m'avait supplié de lui céder. Avait-il conscience que même si l'examen n'était que jeudi matin, il n'aurait jamais le temps de réviser correctement avec les autres épreuves qui débutaient demain à huit heures tapantes ? Enfin, ce n'était pas mon problème.

— Allez ! admets-le, Ana ! s'exclama-t-il en s'asseyant sur mon lit sur lequel il s'était gaiement vautré trente minutes plus tôt. Tu ne sais pas ce que veut dire le mot repos.

— N'importe quoi.

— Ah oui ?

Le défi dans la voix, il se releva. Le bruit de ses pas s'élevant toujours plus, il finit par caler son fessier sur le rebord de mon bureau. Goguenard, il me demanda :

— C'est quand la dernière fois que tu as passé des vacances sans manuels ?

— Aux vacances d'octobre.

— Tu révisais pour les galops d'essais, récusa-t-il.

— En août cet été, quand on est tous partis dans les Alpes.

— Mais n'importe quoi, tu lisais Tocqueville !

— Et alors ? objectai-je. C'est un livre, pas un manuel.

— Un livre, oui, mais pas un roman !

Ce petit jeu aurait pu s'éterniser ; mais à l'instant où ma langue se préparait à répliquer, Léo, dont la faim s'éveillait, se manifesta à l'entrée de ma chambre. D'un simple regard en coin, empli d'un surprenant dédain, il répondit au salut d'Alex avant de signer :

« Il est dix-neuf heures trente... »

Brusquement, le dédain s'expliqua. À coup sûr, mes parents n'étaient pas encore rentrés de leur thé et Léo, donc l'estomac était réglé comme un coucou suisse, se lamentait de ma conversation qui s'éternisait. Et tandis que je vérifiais machinalement l'heure sur mon téléphone et notais les deux messages de ma mère, le dîner de mon frère devint ma priorité.

Tel est pris...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant