Chapitre 21

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Chapitre 21

19 décembre 2023

Negan se révélait tel le génie qu'il était, infligeant une horreur innommable à cette andouille de Rick et sa bande qui, en dehors de Daryl, ne valait pas plus qu'un clou rouillé, et, pourtant, je ne parvenais à apprécier l'apogée tant attendu... Sans cesse, mon attention fuyait vers des rivages bien moins apocalyptiques, et terriblement plus contemporains : les partiels que je ratais et qui, à la place, m'attendraient sagement à la rentrée, sitôt le Nouvel An célébré.

— Quelle violence..., commenta ma mère.

S'installant à mes côtés, elle eut le toupet d'ajouter :

— Heureusement que Léo est à l'école.

— Une chance, enchéris-je.

La désapprobation naissant de mon insolence pinça ses lèvres. Néanmoins, je m'en contrefichais et l'ignorais. Quel degré de cécité c'était que d'ignorer ce que regardait son cadet ? Non, franchement, soit c'était volontaire et, dans ce cas, sa remarque était d'une hypocrisie sans nom, soit c'était sincère et, dans celui-là, la situation devenait grave.

— Ton père t'a vraiment donné le goût des films violents...

— Ce n'est pas un film, c'est une série.

Bonnet blanc, blanc bonnet... Du moment que je lui donnais tort, cela me convenait.

— Les premières épreuves se sont bien passées ?

Devant cet intérêt déplacé, je tournai mon visage vers le sien, outrée. Elle se foutait de moi, pas vrai ? Elle qui avait si habillement manoeuvré pour que je rende les armes, elle avait déjà oublié que je passerais mes examens à la rentrée ?

En mon sein, la colère montait que, défroissant son chemisier, elle précisa :

— Les sujets ont plu à Tom ?

Devlin.

Évidemment qu'elle ne s'enquérait pas de mes partiels mais des siens ; comment n'avais-je pu faire le lien, me douter de celui dont elle se souciait ?

— Mh, mh, répondis-je, le regard rivé à ma série.

Que dire d'autre ? Depuis que j'avais quitté la chambre d'amis deux nuits auparavant, Devlin et moi n'avions pas échangé deux mots. J'étais descendu prévenir mon père qu'il faudrait le conduire à la faculté pour 7 h 30, une demi-heure avant les épreuves, comme toujours, puis j'étais remontée dans ma chambre et, bien que l'insomnie m'avait saisi, j'y étais restée jusqu'à ce que sonne l'heure de son départ. Depuis ? Aucun mail, rien. Comme si cette soirée n'avait pas existé ; comme si la question, l'incertitude que j'avais cru lire dans ses yeux noirs, n'avait pas failli se verbaliser. Nous avions repris nos habitudes : nous ignorer jusqu'à ce que le quotidien nous force à collaborer. Pourtant, j'en étais certaine, j'avais retourné cet instant toute la nuit, contrainte par l'insomnie : quelque chose l'avait troublé ; une chose suffisamment importante pour qu'il en vienne à me rappeler, et suffisamment délicate pour qu'il se résigne à se rétracter. Qu'est-ce qui l'avait agité ? De quoi avait-il voulu me parler ? La réponse me fuyait ; et cette ignorance m'obsédait.

— En tout cas, Léo s'est bien amusé, reprit-elle.

Mes cils battirent ; j'émergeai de mes réflexions et lui restituai mon attention.

— Ah ?

— Oui, sur le trajet de retour hier, et puis ce matin, il n'arrêtait pas de me parler de ce que vous aviez fait, ce que vous aviez regardé, et comment il avait battu Devlin à Mario Kart deux fois de suite.

Tel est pris...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant