Numidia Tome 1 : Le Spectre Du Néant ( En Réécriture)

L'interrogatoire

Numance, Hispanie, 133 av JC

            Tihya entre dans la tente du commandant, scrutant l'environnement d'un regard avisé. Malgré la taille plus spacieuse et luxueuse par rapport à celle de Yugurten, la tente exhale une froideur énigmatique difficile à cerner. Le commandant, arborant fièrement son uniforme militaire et son casque de commandement, la salue poliment et l'invite à s'asseoir en face de son bureau.

— Bien... débute-t-il. Pourriez-vous me faire part de votre identité et expliquer votre présence ici ? Le général a été strict, il croit que vous faites partie de l'armée Numide, mais apparemment ce n'est pas le cas.

Tihya, contrainte, répète la version de son histoire soigneusement élaborée, délibérément omise quant aux détails peu flatteurs sur le comportement du commandant envers elle, qu'il connaît déjà de toute évidence.

— Le nom de votre père ? interroge-t-il.

— Massine, répond-elle simplement.

— Et votre mère ?

Tihya, qui n'avait jamais eu à inventer un prénom pour sa mère, répond rapidement après une brève hésitation :

— Théa.

Elle a le sentiment de subir le même interrogatoire qu'avec Yugurten précédemment, bien que cette fois-ci, le commandant n'exprime aucune compassion.

— Vous mentez, je le lis dans vos yeux, déclare-t-il d'un ton sec. Sachez, femme, que je ne suis pas Yugurten, je ne vais pas accepter cette histoire.

— Heureusement que vous n'êtes pas lui, souffle-t-elle, manifestement soulagée.

— En effet, répond-il avec une patience exagérée.Je ne reculerai devant aucun moyen pour atteindre des réponses.

— Quels moyens, au juste ? demande-t-elle, arborant un ton légèrement provoquant, curieuse d'en savoir plus.

Cependant, elle ne réalise pas que son ton peut être interprété comme une provocation.

Le commandant se lève, l'observe longuement, contourne ensuite le bureau pour lui tendre la main, l'invitant à se lever à son tour. Elle a à peine le temps de réagir que le commandant lui assène un puissant coup de poing en plein ventre.

Aucun bruit ne sort de la bouche de Tihya, privée d'air. Elle s'effondre au sol, pliée en deux, la bouche grande ouverte, cherchant désespérément à reprendre sa respiration. L'horreur de l'acte brutal du commandant dépasse largement la douleur physique qui commence à la submerger, accompagnée d'une nausée croissante.

— Revenons à notre sujet. Une Romaine se faisant passer pour une Numide est déjà peu courant, mais une Romaine s'amusant à défier un commandant, fils d'un noble consul, est inacceptable, déclare-t-il en saisissant violemment ses cheveux.

Tihya laisse échapper un sifflement étrange alors que les premières bouffées d'oxygène pénètrent difficilement dans sa gorge. Elle tente de se relever péniblement à quatre pattes, s'agrippant au bord du bureau, mais l'emprise de Fabius sur ses cheveux l'immobilise.

Une pénombre brumeuse semble envelopper la tente, et Tihya ferme les yeux.

— Regardez-moi, ordonne Fabius d'une voix calme et posée.

Elle rouvre les yeux et le fixe à travers le brouillard qui obscurcit sa vision. Le commandant se tient debout devant elle, les bras croisés sur son armure.

— Vous n'avez toujours rien à me dire, femme ?

— Vous paierez pour vos actes, commandant, croyez-moi, réplique-t-elle en refermant les yeux.
Il relâche enfin sa poigne sur ses cheveux. Tihya reste, pour sa part, accroupie au sol.