Le déni du présent

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Cirta , Numidie, 134 av JC

                      Les jours s'égrènent lentement, telles des gouttes de pluie perlant sur le toit d'une demeure. Kaeso et Arris, en labeur, exécutent  les tâches assignées par Aksel, le gouverneur du palais.

Leur travail pénible constitue une source d'acquisition de pièces d'or, nécessaires à leur subsistance.

À l'aube, pendant que le monde repose dans le silence , Arris s'éveille. On lui confie le rôle de domestique, un statut supérieur à celui d'esclave, qui lui permet de partager une chambre avec Kaeso.

Pendant qu'il observe son ami endormi, il se lève, préservant ainsi son habitude de se réveiller tôt, un rythme qu'il a acquis durant ses années d'esclavage à Siga. Il se remémore avec satisfaction que ni lui ni Kaeso n'ont  jamais frappé par le nom de leurs maître sur leurs chaire,

Lentement, il se dirige vers les jardins, presque déserts, entourés uniquement de soldats. Un mois s'est écoulé depuis son arrivée ici, et il n'a jamais pris le temps d'admirer ce palais majestueux, orné de structures mariant l'élégance de l'urbanisme grec et romain. Ce qui le fascine, ce sont les détails berbères qui le ramènent à ses racines.

Les jardins s'étendent à perte de vue, avec une section réservée aux femmes de noble lignée, une autre aux hommes, tandis que les domestiques prennent en charge tous les détails.

Diverses fleurs y poussent, témoignant de la passion du roi pour l'horticulture, même si parfois leur éclat se fane sous l'ardent climat. Comme à son accoutumée, il se dirige vers les écuries sans prendre de repas, rien n'ayant de saveur pour lui. Depuis la perte de Maxima " Tihya" , il se sent perdu, ayant égaré le sens même de son existence.

Les écuries du palais sont plus spacieuses et confortables que celles du domaine de Siga. Les deux portes de chaque côté de la bâtisse laissent entrer une belle lumière chaude qui fait luire les dalles en pierre rouge.
Arris se fige en découvrant Miyasa devant un étalon d'une blancheur immaculée, sa crinière soyeuse évoque un flot d'argent liquide. Le jeune homme semble fasciné par la pureté et la noblesse de la créature.

—  Il répond au nom de Pégase, plus rapide que l'éclair, indique-t-elle, observant l'expression émerveillée d'Arris face à l'animal.

Ce dernier retrouve ses esprits et la fixe.

—  C'est le divin cheval ailé, déclare-t-il en s'approchant de la bête. Il le caresse tendrement, provoquant chez l'animal un léger hennissement.

—  Il semble que vous ayez des connaissances en culture grecque, remarque-t-elle en l'observant.

Arris a acquis la lecture et l'écriture grâce à Maxima. Elle lui contait régulièrement des récits concernant les grecs, Pégase étant le fils du dieu Poséidon et de Méduse. Une créature imaginaire, certes, mais qui perdure dans les croyances, une idée que Arris trouve étonnante.

Il élude sa question, se focalisant sur la splendeur de Pégase. Miyasa a raison de qualifier cette créature de divine ; le cheval est magnifique.

— Généralement, il n'autorise personne à l'approcher, poursuit-elle.

Arris caresse doucement la crinière de l'animal.

— Les chevaux m'ont toujours été familiers, affirme-t-il en reportant son attention sur la jeune femme.

Elle est d'une beauté stupéfiante, une vérité que Arris s'abstient d'admettre. Elle porte une tunique sur un pantalon en lin blanc, orné de motifs Berbères, et des sandales, agrémentées d'une cape. Ses cheveux sont tressés.

Numidia Tome 1 : Le Spectre Du Néant ( En Réécriture) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant