Chapitre 11

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Le jour de couronnement est arrivé plus vite que je ne l'aurais cru, je porte une robe noire pour être assortis au roi, je dois avouer qu'elle est magnifique, mais je me suis sentie forcée de la porter, ce n'était certainement pas une demande. Ma robe bustier est brodée d'un fil or et de simples petites bretelles reposent sur mes bras. Mes bijoux sont en or brut et comme je le souhaitais sont simples et discret. Je n'ai pas revu le roi depuis que nous sommes arrivés et je ne sais toujours pas quoi en penser.

Je suis angoissée, bien plus que pour mon mariage puisque je vais rencontrer mes sujets pour la première fois. Marina a eu beau me répéter le déroulement du couronnement et nous avons même fait un entraînement, cela ne m'empêche pas d'avoir les mains moites et l'estomac noué. Eme m'offre un sourire d'encouragement et se poste derrière moi où elle devra avec Yseult placer ma traîne correctement quand je m'assiérais sur le trône. Tout le monde est prêt, ne manque plus que le roi. Celui-ci finit par arrivé, vêtu tout de noir. Immédiatement, mon regard s'accroche au sien, j'en avais presque oublié l'effet, comme s'il aspirait tout et qu'il ne restait plus que ces deux billes d'obsidienne à quoi m'accrocher. Il s'approche de moi et se place à ma gauche. Les portes s'ouvrent et nous nous engageons dans le couloir en direction de la salle des trônes. Notre cortège est mené par des hommes d'église et derrière nous des chevaliers ainsi que d'autres hommes d'églises nous suivent. Le couloir est silencieux, seul le bruit de nos pas et les bruits de chuchotements dans la salle brisent le silence.

Je commence à apercevoir la salle, il y a de nombreuses personnes, et je suis prise de doute, que dois-je faire déjà ? Est-ce vraiment ma place ? Alexander doit percevoir mon trouble, car il me tend la main et chuchote : "Respirez". Je ne sais pas pourquoi ou comment cela m'apaise, mais c'est pourtant le cas, il fait voler tous mes doutes et m'invite à devenir sa reine. Je saisis sa main et nous nous engageons dans la salle ou les derniers chuchotements de la foule se taisent.

Le roi qui a déjà sa couronne est invité par l'archevêque à s'agenouiller devant lui puis il devra à monter sur son trône, mais il ne bouge pas, comme s'il attendait quelque chose. Je glisse mes yeux sur lui et prends conscience que c'est moi qu'il attend, je n'avais pas remarqué, mais mes doigts sont fermement agrippé au sien. Je sens mes joues rougir, gênée de mettre agrippée à lui de cette manière. Sa main libérée, le roi s'avance, s'agenouille et monte sur son trône. L'archevêque m'invite à mon tour à m'agenouiller. Je m'exécute, l'homme prononce une courte prière et place la couronne sur ma tête, elle est lourde comme pour que je me souvienne des responsabilités qui m'incombent. Je me lève ensuite pour m'asseoir sur mon trône, une fois installée les sujets de Gium clament :

- Longue vie au roi ! Longue vie à la reine !

Me voilà reine.

Pour le reste des festivités, le roi s'est abstenu de banquet, préférant un simple verre pour discuter avec ses sujets. Les seigneurs sont présents et discutent entre eux. Comme à l'habitude du roi, il m'a accordé son habituelle indifférence, malgré nos regards en coin répétés, il ne m'a pas adressé un mot. Je ne suis pas restée longtemps en public, malgré mon souhait de découvrir les seigneurs de la cour.

Puis après le couronnement, il a à nouveau disparu sans explication, j'en ai conclu qu'il était reparti là où il semble préféré être, c'est-à-dire loin de moi. Je dois dire que je ne comprends pas bien son comportement. Si je ne suis pas sa femme, je suis tout de même sa reine, n'a-t-il rien à dire là-dessus ? Pour moi, cela a de l'importance et je dois dire que son silence me pèse. J'ai grandi avec la colère de mon père et je ne saurais lequel entre la colère et l'indifférence, je préfère.

Je suis devenue la reine d'un pays que je ne connais pas et la femme d'un homme que je ne connais pas et je dois avouer ne pas savoir où j'en suis quand personne ne semble pouvoir me guider dans ma nouvelle vie. Il y a bien Marina, mais elle m'a indiqué que je suis en période de noces et que donc durant cette période, je n'ai aucun devoir de reine à accomplir, je me demande ce qu'il en est du roi.

Je suis une domestique dans les couloirs alors que je me suis une nouvelle fois perdu quand j'entends des voix à travers une porte sur ma gauche. Je ralentis le pas, intrigué même si je sais que des conseillers ou autres personnes habitent le château, mon instinct me pousse à m'arrêter. Voyant que je me suis arrêtée la domestique m'interroge :

- Tout va bien, votre majesté ?

Je ne bouge toujours pas alors elle continue un peu mal à l'aise.

- Nous allons bientôt arriver à un couloir qui vous est connu, suivez-moi.

Mais je ne bouge toujours pas, au lieu de la suivre, j'avance d'un pas vers la porte. La domestique reprend d'une voix que je devine un peu préoccupée voir paniquée ?

- Votre majesté ? Le couloir est juste au bout, venez...

Face à son attitude, je ne suis que plus que tout attirée par cette porte. Son insistance éveille mon instinct qui me crit de me rapprocher de la porte.

- Allons, votre majesté, Marina doit vous chercher, ne perdons pas de temps.

Mais je n'écoute pas et me dirige vers la porte. Alors que je m'apprête à saisir la poignée, celle-ci tourne et la porte s'ouvre. Un homme qui doit être un conseiller d'après son costume en sort et je recule de quelques pas pour le laisser passer. Il referme la porte.

- Votre majesté. Me salue-t-il d'une révérence.

Il part et je m'apprête à faire de même quand une voix s'élève de la pièce. Cette fois-ci j'entends plus nettement, la porte est restée entrouverte. Même si je l'ai entendue que peu de fois, je reconnaîtrais entre mille ce ton grave qui me fait vibrer malgré moi. Je ne me pose plus de question, ni de retenue.

- Votre majesté, attendez ! Non...

Trop tard, je suis entrée en trombe. Et le spectacle qui s'offre à moi me semble irréel. Devant moi, trois conseillers et le roi. Alexander est devant moi et semble aussi stupéfait que moi.

- Désolé votre majesté,... j'ai essayé de la retenir, mais...

- Laissez-nous... ordonne-t-il aux conseillers et à la domestique qui quittent la pièce sur le champ.

Mes yeux accrochent les siens, mais je ne parviens pas à les déchiffrer.

- Vous... vous étiez là depuis le début ?

Il ne répond rien. Bien sûr que pourrait-il dire ? Pour quelle raison devrait-il se justifier ? Étrangement, son silence en dit long et je quitte la pièce sans demander mon reste. Avant de sortir de la pièce, je crois entendre un soupir, mais je ne m'en préoccupe pas, j'ai juste besoin de partir loin d'ici. Son indifférence me blesse plus que je ne voudrais l'admettre. Je cours jusqu'aux jardins dans lesquels je m'enfonce sans me soucier d'où je vais, à cet instant précis, j'ai seulement besoin de partir le plus loin possible de lui et de ce château.

Je suis en colère d'avoir nourri autant d'espoir à son égard malgré les rumeurs à son sujet qui m'avaient mise en garde. Étant petite, je rêvais du grand amour, comme me le comptait ma mère, mais elle semble avoir oublié que ce n'était rien d'autre que des histoires, des rêves. Avoir vu mon père s'effondrer après sa mort aurait dû me donner une leçon, m'apprendre que malgré toute les belles histoires d'amour, il en existe tout autant de malheureuse.

Je continue de courir sans m'arrêter, jusqu'à ne plus avoir de souffle. Je regarde autour de moi, je me trouve sous une glycine qui me coupe la vue du ciel, il fait étrangement sombre, mais cela n'a pas d'importance, je passerais quoi qu'il arrive ma vie dans cette couleur. Les larmes menacent de couler, mais je refuse de ressentir de la peine à cause de cet homme. La seule qui méritait mes larmes était ma mère, je ne les accorderais plus à personne. Tout ce que je ressens n'est que colère, je suis en colère contre lui de croire que je ne suis rien d'autre qu'un objet qui lui a permis de gagner une guerre sans verser une goutte de sang, je suis en colère contre ma mère qui m'a fait nourrir tant d'espoir pour ne même plus être là aujourd'hui quand je me retrouve au pied du mur, mais je suis surtout en colère contre moi d'avoir été aussi bête. Je m'étais pourtant fait la promesse de me plus jamais me faire rabaisser par qui que ce soit. Si je l'ai oublié jusqu'ici, je tâcherai de me le rappeler chaque jour.

RespireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant