Chapitre 5

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Un mois. Cela fait plus d'un mois que le roi m'a annoncé mes fiançailles. Aujourd'hui, ce sera le tour du peuple entier d'Illenya. Demain, je rencontrais mon futur époux pour la première fois et « échangerais avec lui autour d'une tasse de thé ou lors d'une balade dans les jardins » comme me l'a décrit ma régente Anne. Cela me semble tellement ridicule, comme si nous pouvions apprendre à nous connaître en si peu de temps. Enfin, le jour d'après, les préparatifs pour le mariage commenceront. Je ne sais pas quand celui-ci sera célébré et est préférée ne pas le demander au roi Henri.

Pendant ce mois, je ne l'ai croisé que furtivement et lorsqu'il souhaitait me demander ou plutôt me faire part de ses exigences concernant mon comportement avec mon futur époux, il envoyait Sir Wiston qui par prudence passait par l'intermédiaire d'Anne.

En attendant que le roi face son annonce de mes fiançailles au château en présence de la noblesse et bientôt dans le pays entier, je me balade dans les jardins parcourant les allées de fleurs et de buissons qui maintenant que l'automne s'est installé, ont perdu tous leurs pétales et toutes leurs feuilles. Comme ces fiançailles ont été celer rapidement, je n'ai pas à assister à la grande annonce du roi. J'appréhende mon retour dans mes quartiers, le regard d'Eme. Sera-t-il de pitié ou de compassion ? Je ne sais pas si elle pourra me suivre, elle et mes femmes de chambre. Je l'espère, mais cette décision revient au roi Alexander III. Peut-être que si je lui en fais la demande demain, il me l'accordera. Ce serait la moindre des choses. C'est tout de même moi qui vais quitter mon pays. À vrai dire, je n'en sais rien. Je ne sais pas ce qu'il pense de ce mariage ni quels espoirs nourrit-il de cette alliance. Je suppose que notre rencontre m'éclairera demain, du moins, je l'espère.

À mon retour dans ma chambre, les discussions agitées de mes servantes cessent. Je comprends aussitôt de quoi elles parlaient, il ne faut pas être savant pour le deviner. Je feins de n'avoir rien remarqué et m'assois face au miroir de mon chevalet. Eme m'y rejoint et commence à me brosser les cheveux en silence. Petit à petit, mes domestiques s'en vont quand leur tâche est terminée avec une révérence et en veillant à ne pas briser ce silence qui devient peu à peu pesant.

- Je comprends maintenant votre fuite de la dernière fois près de la rivière. Je... je suis navrée, je me doute que c'est votre devoir, mais ça ne doit pas être facile.

- Tu es ma plus chère amie Eme. Merci.

Je ne la remercierais jamais assez de comprendre que ce mariage n'est pas voulu et de m'épargner des félicitations non souhaitées. Nous replongeons dans le silence et Eme continue de me brosser les cheveux alors qu'ils sont sûrement démêlés maintenant. Je ne m'en plains pas, c'est plutôt agréable de partager ce moment qui me semble hors du temps et de cette vie qui semble être de plus en plus bouleversée.

- Mary ?

- Mmmh ?

- Je ne vous ai pas tout dit à propos des rumeurs qui circulent sur le roi Alexander III.

- Que veux-tu dire ?

Eme pose la brosse et s'assoit sur le tabouret à ma droite. Je me tourne pour être face à elle en ignorant la vague d'angoisse qui menace de me submerger pour de bon.

- Eh bien, c'est un roi craint, on dit qu'il est sans pitié pour ses ennemis. D'ailleurs, il porte toujours du noir, entièrement, de la tête aux pieds. C'est la couleur qu'il a adoptée sur son drapeau à son accession au trône. (Eme pose ses mains sur les miennes qui se trouvaient sur mes genoux avant de continuer.) On le décrit comme un homme froid et sans cœur, incapable d'aimer, c'est sûrement ce qui le rend si cruel. On dit également que même ses plus proches conseillers ou servants le craignent. Le peuple quant à lui est opprimé par sa soif de pouvoir... ce n'est pas un homme bien, princesse Mary.

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