Peu de temps après, nous apercevons un château au loin. Un château plus qu'imposant pour un simple duc. Ce dernier, le duc de Montfort doit avoir de l'influence. Le roi confirme mes soupçons :
- Personne ne devra savoir que je suis blessé. Ils auront connaissance de notre attaque, mais penseront que le roi et la reine n'ont été aucunement blessé. (il s'arrête semblant réfléchir puis se tourne vers moi.). Votre majesté ? Les apparences ici seront plus qu'importantes. Nous devons apparaître comme un couple uni sans aucune faille.
Il finit sa phrase en me regardant dans les yeux pour être sûr que je comprenne bien l'enjeu de cette soirée. Ce n'est qu'à ce moment que je prends conscience de la tension qui habite mon époux, rien à voir avec ce qui nous est arrivé plus tôt, mais tout à voir avec ce qui nous attend. Je suis tout à coup stressée à l'idée de m'y rendre. Je m'en réjouissais, moi qui adore danser, mais quelque chose me dit que ce bal sera loin d'une soirée agréable.
- C'est compris.
Satisfait, il reporte son attention vers l'extérieur quant à moi, je ne cesse de me demander quelle menace peut bien se trouver dans ce château qui tourmente tant mon époux.
Nous arrivons dans une cours assez grande, décorée d'une fontaine et de plantes pour l'occasion. Même si l'extérieur est très beau, je préfère la cours du roi. Ici y règne une certaine arrogance de son propriétaire, soucieux de montrer sa fortune et son pouvoir. Le danger ici me parait de plus en plus clair. Le carrosse s'arrête, le roi sort et à ma plus grande surprise se retourne pour me tendre la main afin de m'aider à descendre, geste qu'il laissait auparavant au soin du valet. Je la saisis et sors en veillant à cacher les taches de sang sous mon manteau. À quelques pas de nous, un homme de noblesse s'approche au côté d'une femme d'une grande beauté et très jeune comparé à l'homme à qui son bras est accroché. Je comprends alors que ce sont le duc et la duchesse de Montfort et que notre rôle de couple amoureux commence maintenant.
- Vos majestés ! Quel plaisir de vous revoir et vous de vous rencontrer, ma reine. S'exclame le duc avec une révérence exagéré. (Il est vrai que je n'avais pas fait la rencontre de la noblesse à mon couronnement.).
- Duc Montfort. Se contente le roi d'un signe de tête.
- Nous attendions votre venue avec impatience, votre majesté. Me confie la duchesse avec un sourire qui se veut timide, mais duquel transparaît une arrogance malsaine.
- Je suis heureuse de pouvoir faire la connaissance de mes sujets.
- Nous avons eu vent de votre attaque. J'espère que vos majestés n'ont pas été blessés. Renchéris le duc.
- Aucunement mais j'ose espérer que pour notre retour, le duc se chargera de sécuriser les routes de ses terres.
Tout le corps du duc se tend, face à cette accusation à peine voilée, mais il reprend très vite contenance et répond :
- Certainement. Il va s'en dire qu'un événement comme celui-ci ne doit reproduire sous aucun prétexte.
Le roi hoche la tête et m'invite à entrer, me menant très vite à nos appartements que nous devrons partager. La duchesse me propose de mettre à mon service quelques femmes de chambre, mais le roi refuse. Surement pour éviter des espions à l'intérieur même de sa chambre. Je devrais me contenter des deux servantes qui ont survécu, ce qui est largement suffisant.
En arrivant dans nos appartements, le roi ne tarde pas à s'éclipser pour régler des affaires me laissant la liberté de me préparer pour ce soir. Quelques heures, plus tard, le roi réapparaît alors que mes deux femmes de chambre finissent de me coiffer. Il se tourne vers moi, avise ma robe bleu clair, je crois voir à travers le miroir l'ébauche d'un sourire se former au coin de ses lèvres, mais il se détourne et part derrière l'auvent pour se changer. J'aurais supposé voir de la colère ou de l'irritation dans ses yeux, mais je n'y rien de tel, à vrai dire, je ne pus déchiffrer grand-chose.
Une fois, la tache de mes femmes de chambre finit, je les congédie. Je me rapproche du lit pour saisir mes gants et les enfiler quand mon regard est attiré par le bruit d'un grognement. Je vois Alexander enlever sa veste avec difficulté alors que son bras doit le faire souffrir. La manche gauche de sa chemise blanche est imbibée de sang, ainsi qu'une partie du dos ce qui dévoile qu'il n'a pas arrêté de saigner malgré les soins d'Aurore. Le noir de ses vêtements a l'avantage de camoufler le sang, je me demande si c'est pour cette raison qu'il porte du noir tout le temps. Il commence à essayer de lever les bras pour enlever sa chemise, mais le tissu imbibé de sang se colle à sa peau et un autre grognement s'échappe.
- Vous devriez voir un médecin.
Alexander, dos à moi, jette un regard par-dessus son épaule avant de répondre :
- Pas ici.
Je comprends qu'il ne souhaite pas que sa blessure s'ébruite. Il se tourne un peu de biais, ne me laissant voir que son profil droit, peut être pour que je ne voie plus son bras gauche. Il retente d'enlever sa chemise, mais le tissu se colle une nouvelle fois sur sa peau, lui arrachant un énième grognement. Je m'approche de lui, et me place dans son dos.
- Laissez-moi vous aider. Chuchotais-je sans m'en rendre compte.
Il tourne la tête pour m'apercevoir du coin de l'œil et après un peu d'hésitation, il hoche la tête me donnant son accord. Je saisis délicatement le bord de sa chemise et commence à soulever avec la même délicatesse. Il fait de même à l'avant et nous réussissons à retirer sa chemise. Son dos face à moi est maintenant nu avec quelques traces de sang, mais ce qui me frapper le plus ce sont les nombreuses cicatrices, comme des marques de fouets. Mes doigts se rapprochent sans que je ne m'en rende compte et quand ils rentrent en contact avec sa peau, le roi sursaute. Je retire mes doigts sans attendre et vais chercher une éponge et de l'eau pour le nettoyer. Quand je reviens, ses yeux évitent les miens et je comprends qu'il aurait préféré que je ne voie jamais cela. Je dépose alors le saut et l'éponge près de lui et m'éloigne pour aller chercher de quoi faire un bandage. Aucun de nous ne dit un mot. Quand il a fini d'essuyer le sang de sa peau, je lui dépose les bandes de linges blancs. Je le vois essayer de faire le tour de son bras avec une seule main, il s'en sort et semble l'avoir déjà fait de nombreuses fois, mais le bandage n'est pas assez serré pour faire cesser le sang de couler et il en a conscience et tente de le refaire. Je décide alors de prendre place près de lui sur le coffre sur lequel il s'est assis. Je prends délicatement les bandes de ses mains qu'il me cède. Nos doigts se frôlent me provoquant une châtaigne, mais je l'ignore ne sachant pas s'il a ressenti la même chose que moi. Je m'applique à faire le bandage alors que je sens son regard sur mon visage. Un visage qui je m'en rends compte est tout près, car je me suis rapproché de son bras pour bien voir ce que je fais.
Une légère tension s'installe entre nous, mais à ma grande surprise celle-ci n'est pas désagréable. Je me dépêche de finir mon bandage ne sachant que penser de ce que je ressens et vais me laver les mains pour enfiler mes gants. Quand je me retourne Alexander, est habillé et m'attend près de la porte.
Je m'approche de lui et saisi le bras qu'il me tend malgré mes mains qui tremblent. Nous nous engageons dans le couloir, à chaque pas, je me crispe davantage, redoutant cette soirée. Notre première en public où nous devrons rester jusqu'à la fin étant donné qu'elle est en notre honneur. Devinant sans doute mon appréhension, mon époux se penche à mon oreille pour que je sois la seule à entendre :
- N'ayez crainte, je resterais à vos côtés aussi longue que soit cette soirée.
VOUS LISEZ
Respire
RomanceUn pays en guerre qui n'a qu'une seule échappatoire ? Des soldats morts ? Des familles détruites ? Quand Mary comprend que le seul moyen de mettre fin à tout ça est de perdre sa liberté en se mariant avec l'ennemi, un homme froid, calculateur, indif...