Chapitre 12

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Chaque jour en me réveillant, quand mes domestiques ouvrent mes rideaux et que Eme m'indique qu'elles seront mes tâches dans la journée, je me répète que ce n'est pas aujourd'hui que je me morfondrais. Bientôt, les noces seront finies et je pourrais occuper mes journées par autre chose que de la broderie et de la lecture.

Depuis que j'ai découvert que le roi était dans l'enceinte du château, je le croise plus souvent. Surement, parce que maintenant, il n'a plus rien à cacher. À chaque fois, je m'applique à lui accorder mon regard le plus noir, le plus méprisant pour qu'il sache que si lui m'accorde la plus grande indifférence quant à moi, je lui voue une simple et pure colère.

J'ai également envoyé une lettre à la reine Julietta, souhaitant prendre de ses nouvelles et ne plus rester passive. Je suis dans la bibliothèque composée d'immenses étagères qui recouvrent les murs de bas en haut, de divans et d'un grande fenêtre donnant sur les jardins, quand on vient m'interrompre. Un valet entre avec un plateau sur lequel repose une lettre. Je me lève d'un bon, heureuse d'avoir reçu une réponse mon amie. Je retourne l'enveloppe pour l'ouvrir quand je remarque qu'elle a déjà été ouverte, la cire servant à celer celle-ci étant défaite.

- Pourquoi ma lettre a-t-elle été ouverte ? Interpellais-je le valet qui s'apprêtait à sortir.

Celui-ci se retourne mal à l'aise, ne sachant que dire. Et là, je comprends, mon sang ne fait qu'un tour et je me dirige sans attendre vers son bureau. Le valet se pousse de mon chemin sans chercher à me retenir et il fait bien, car je ne sais pas comment je réagirais si on essayait de me barrer la route. Je rentre sans frapper et sans chercher à m'excuser.

- Comment avez-vous osé ?

Étrangement, il est seul. Assis derrière son bureau, il relève les yeux des papiers qui avaient toute son attention. Il fronce d'abord les sourcils devant mon intrusion, puis avisant la lettre dans ma main, il semble comprendre la raison de ma colère. Il fait signe à la personne derrière moi, un garde sûrement, de nous laisser. Ce dernier referme la porte et je ne perds pas une minute.

- Vous avez lu mon courrier. Avez-vous si peu d'estime et de respect pour moi ?

- Il ne s'agit pas de respect.

Un rire dénué d'humour m'échappe. Il se lève pour me faire face.

- Il s'agit de confiance.

- De confiance ? Qu'ai-je fait pour que vous doutiez de ma confiance ? Et cela sans me laisser le bénéfice du doute.

Il semble peiné par ma dernière remarque, à moins que ce soit de l'irritation. Le roi contourne son bureau, il se trouve face à moi, maintenant un simple et petit mètre nous sépare.

- Ce n'est pas en vous que je n'ai pas confiance, mais... en votre père.

Aïe.

- Mon père ? (un rire m'échappe.) Alors je mérite d'être jugé par les actes de mon père pour le reste de mes jours ?

Il ne répond rien alors je continue.

- Vous dites, qu'il ne s'agit pas de respect, mais c'est pourtant le cas. Et c'est devant un homme d'église que vous avez promis de me respecter... et ce, jusqu'à ce que la mort nous sépare.

Ma voix n'est plus qu'un murmure quand je finis ma phrase, face à cette réalité douloureuse, je n'arrive plus à soutenir son regard perçant et baisse les yeux vers les tapis qui recouvrent le sol.

- Vous m'avez tellement pris et... et maintenant vous me prenez ça. N'en avez-vous pas assez ?

Je relève les yeux pour croiser les siens où je crois y voir une sincère peine, mais je n'ai pas le temps de déchiffrer plus longtemps son regard qu'il le détourne. Je comprends alors qu'il n'a rien à dire, pas même des excuses. Je secoue la tête pour remettre de l'ordre dans mes idées. Rien ne sert de rester plus longtemps ici, je n'obtiendrais rien de lui alors je me détourne, je ne sais pas à quoi je m'attendais.

- Un bal.

Je me retourne et le dévisage une nouvelle fois sans comprendre. Ce changement de sujet me décontenance.

- Un bal sera organisé pour nous. Et nous irons si... vous n'en voyez aucune objection.

Je ne comprends pas ce changement de sujet soudain. Mes yeux plongent désespérément dans les siens, je cherche quelque chose : un sentiment, une émotion, n'importe quoi. Mais rien, il a retrouvé son masque impassible alors je hoche la tête en signe de consentement et sors de la pièce.

Je décide de ne pas répondre à mon amie pour ne pas lui laisser le loisir de m'espionner même si je sais que tous les domestiques de ce château sont chargés de le faire. Je ne cherche plus à le revoir, ni à avoir de ses nouvelles à vrai dire, je fais tout pour l'éviter. Je suis partagée entre chagrin et colère ne sachant comment faire un choix, je me plonge dans un cycle, me refermant aux autres. Quand la colère s'apaise, c'est la solitude et la tristesse qui prennent la place. Cela m'agace alors je ne peux pas dire que je suis de très bonne compagnie. Malgré tout Eme, ne se plains pas, elle reste présente auprès de moi, elle me soutient en silence à travers des sourires encourageant ou elle prend le temps de jouer aux cartes avec moi, pour me changer les idées.

Je passe les jours qui suivent à choisir et à l'ajuster la robe que je porterais au bal qui ne va pas tarder à arriver. Je suis d'ailleurs devant plusieurs robes de couleurs claires devant moi, à discuter avec mes femmes de chambre sur le choix le plus approprié.

- Du noir serait plus approprié.

Je me retourne pour apercevoir, Marina qui s'avance vers moi.

- La couleur du royaume est le noir et c'est celle de votre mari.

- Mais c'est la couleur du deuil, or je ne crois pas que quelqu'un soit mort.

- Porter du noir serait une marque d'union. Un fort symbole pour la population.

- Ah oui ? Et le roi sera-t-il vêtu de bleu ? Ne pus-je m'empêcher de répliquer.

Marina soupir et s'approche de moi.

- Gium est maintenant votre royaume votre majesté, ce n'est plus Illenya.

- Je dois avouer être surprise, je croyais que c'était une union... entre deux royaumes. Pour cette raison, je porterais la couleur du pays d'où je viens, du bleu clair. Affirmais-je droit dans les yeux de ma gouvernante, la défiant de protester.

Je saisis la robe bleue et me tourne vers mes femmes de chambre.

- Je souhaite faire les retouches maintenant pour être sûr de pouvoir la porter le jour du bal, pouvez-vous procéder ?

Les femmes s'activent alors que Marina quitte la piècesans rien ajouter. On me parle d'union, mais ça ne ressemble en rien à uneunion, je n'en veux pas à Marina, mais je ne peux accéder à sa demande. Lesefforts doivent aller dans les deux sens, j'accepterais de porter du noir quandil acceptera de porter du bleu, autrement dit, ce n'est pas demain la veille.

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