Dire que je me sens complètement larguée suite à cet échange avec Santiago serait un euphémisme. Pendant que mon nouveau pensionnaire, visiblement exténué, dort profondément sur le canapé du salon, je passe des heures à me retourner dans mon lit sans trouver le sommeil. Comment pourrai-je y parvenir après une telle soirée ?
Au-delà de son retour brutal, déjà suffisamment difficile à gérer, notre conversation m'a beaucoup perturbée. J'ai beau examiner sa version des faits sous toutes les coutures, je ne parviens pas à m'y retrouver.
D'un côté, j'ai bien du mal à croire qu'il ne soit pas lié à la disparition d'Ana alors que son souhait avant d'être arrêté par les forces de l'ordre était justement de la retrouver. Mais en même temps, quel intérêt aurait-il à me retrouver si c'était le cas ? Dans la même veine, son histoire d'amoureux transi, je n'y crois pas une seconde. Et pourtant, j'ai bel et bien senti qu'il était venu m'observer à plusieurs reprises et, sous ce prisme-là, son histoire prend un tout autre sens. Puis, surtout, il est en train de pioncer sur mon canapé alors que je pourrais le dénoncer à tout moment. Il accepte donc, dans une certaine mesure, d'être en posture de vulnérabilité face à moi. Quelque chose que je n'aurais jamais cru possible venant de lui.
Dans mon cerveau, les interrogations et les hypothèses fusent. Dès que de minuscules fenêtres de confiance s'entrouvrent, elles sont aussitôt rabattues par des envolées de doutes. Une méfiance presque maladive, mais amplement justifiée au vu des stratagèmes tordus que Santiago a déjà pu échafauder. Ne serais-je pas une fois de plus que le simple pion de l'une de ses manipulations malsaines ? Quelle stratégie peut-il bien avoir en tête ?
Une chose est sûre : je ne peux pas me permettre de baisser la garde. S'il m'est impossible d'en parler à qui que ce soit, la seule chose à faire est d'aller dans son sens tout en gardant les yeux grands ouverts.
Après une nuit entière de tergiversations, les premiers rayons de l'aube me tirent du lit sans effort. Contrairement à mes précédents week-ends, je me réveille pleine d'énergie. Une réalisation d'autant plus étrange que je n'ai pas fermé l'œil de la nuit. À croire que l'adrénaline est capable de beaucoup dans des cas extrêmes comme celui-ci.
Toc-toc-toc.
Alpaguée à la sortie de la douche par trois coups frappés à ma porte d'entrée, je sursaute. Qui peut bien venir me rendre visite à une telle heure, d'autant plus un samedi ? La vision de Santiago en train de dormir sur le divan du salon accélère les battements de mon cœur. Priant pour qu'il ne s'agisse pas de ma mère avec le double des clés, je m'empresse de m'enrouler dans ma serviette pour dévaler les escaliers. À mon grand soulagement, Santiago ne traîne plus dans les parages.
Je prends une grande inspiration avant d'ouvrir la porte.
Ramenée à mon objectif de départ par cette même voix, je me hisse sur la pointe des pieds et entrevois une tête blonde en contrebas. J'ai trop coiffé ces boucles pour avoir ne serait-ce que l'ombre d'un doute.
— Camila ? Qu'est-ce que tu fais ici ?
Ma question, lâchée de but en blanc, la laisse perplexe.
— Wow, quel accueil. Je te dérange ?
Réalisant que j'ai une fois de plus oublié de mettre les pincettes, je resserre ma serviette autour de mon buste en m'efforçant de cacher la vue sur mon appartement. Je doute que Santiago décide d'y faire irruption en dansant le jerk à moitié nu, mais on ne sait jamais.
— Non, pas du tout. J'étais en train de réviser mes cours de droit. J'ai arrêté de les suivre, mais j'aimerais les reprendre au plus vite.
Je m'arrête de moi-même avant d'éveiller les soupçons. Une personne n'ayant rien à se reprocher n'aurait pas eu à se justifier.
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Le parfum des ennuis
Chick-LitJe n'ai jamais été du genre à me laisser dépasser par les évènements. Même lorsque ma mère débarque chez moi en m'annonçant que mon père l'a mise dehors, que je me retrouve sans un sou et contrainte de mettre mes projets de carrière en pause pour tr...