Chapitre 27 - Les liens de l'amitié sont plus forts que tout

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— Tout va bien, Juli ? J'ai bien compris que tu voulais me voir, mais j'ai un tas de choses à faire à la maison...

Il ne me faut pas moins d'une heure après ma discussion avec Caterina pour réunir Sara et Maria Carolina dans les cuisines de Color Caribe. Je les aurais bien reçues chez moi, mais la présence de Santiago complique un peu les choses. Par chance, Elvira a déjà fini sa journée, nous pouvons donc discuter en toute confidentialité.

— Viens, Sara. Je me doute bien que tu as un emploi du temps bien chargé, mais c'est important qu'on parle toutes les trois.

L'afro-caribéenne adresse un salut à Maria Carolina, avant de s'avancer en traînant des pieds. Une fois plantée devant moi, elle attrape une spatule gisant sur le plan de travail et la triture machinalement. Je les regarde tour à tour, avant de commencer mon speech :

— Hier, j'ai eu une conversation qui m'a fait réaliser beaucoup de choses... Parmi elles, que je m'étais éloignée des personnes en qui je pouvais avoir confiance. C'est pour cette raison que j'ai décidé de vous réunir ici aujourd'hui. Ana est portée disparue depuis trop longtemps, il est temps qu'on fasse quelque chose.

— Attends, c'est pour ça qu'on est là ?

La frustration suscitée par l'air las de Sara alimente d'autant plus mon désir de persuasion.

— Oui. On est là, parce qu'on est amies. Et que les amies, ça se serre les coudes.

— Écoute, Juli... soupire l'afro-caribéenne en décollant les yeux de la spatule pour les lever vers moi. Je comprends que tu aies envie de bouger les choses, mais qu'est-ce que tu veux qu'on fasse ? Ana nous cachait bien trop de choses, on n'a pas toutes les cartes en main.

— Je comprends ton point de vue, mais est-ce une raison pour baisser les bras ? intervient Maria Carolina. Tu es prête à accepter sa disparition, Sara ?

L'interpellée recule d'un pas en fronçant les sourcils.

— Bien-sûr que non, mais tu crois que c'est simple ? Essaie de te mettre à ma place ! Toi, tu as su ce qui se tramait depuis le départ, pas nous. Et pourtant, depuis qu'Ana est arrivée, on a tout fait pour l'aider. En quelques mois, elle est passée d'être une simple collègue, à celle que je considère comme une sœur. Quant à Carlos, je travaille pour lui depuis quinze ans, la main qu'il m'a tendue a forgé celle que je suis aujourd'hui. Dieu sait que je n'octroie pas facilement ma confiance, mais lui l'avait toute entière... Quand j'ai appris sa mort, ça a été un choc terrible, je n'en dormais plus la nuit ! Et pourtant, j'ai toujours fait en sorte d'être là pour Ana... Alors apprendre que tout ça n'était qu'une invention, une pièce de théâtre ?

L'afro-caribéenne termine sa tirade en balançant la spatule contre le plan de travail. De toutes nos années d'amitié, je ne l'avais jamais vue céder à la colère ainsi.

— J'ai le sentiment de n'être qu'un pion dans leur stratagème, à croire que personne n'a pensé à Juli et moi, à ce qu'on pouvait ressentir !

Sa voix s'essouffle sur les dernières notes, comme si ces mots venaient briser la coquille de rage qu'elle avait érigée pour se protéger. Maria Carolina est la première à réagir en posant une main réconfortante sur son épaule.

— Je suis désolée, Sara, mes mots étaient maladroits. Je ne voulais pas décrédibiliser ta colère, elle est plus que légitime.

Je la suis en acquiesçant :

— Et moi, je te comprends. Comme toi, j'en ai voulu à Ana de n'avoir rien dit et d'avoir fait ses plans en solitaire... Puis je me suis rendue compte que j'étais en train de faire exactement la même chose. Où est-ce qu'on va si chacune commence à s'éloigner, sous prétexte que les autres en font de même ? Une vraie amitié, elle vaut la peine qu'on se batte.

Le parfum des ennuisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant