Chapitre 3

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Las Vegas

Sarah

Nous nous immobilisons sur-le-champ tous les deux. Nos yeux se croisent, incrédules. Le révérend, un homme d'un soixante d'années, ne s'aperçoit pas de notre trouble et continue :        

– Nous avons justement terminé votre album.        

Au son d'une musique religieuse, il traverse en quelques enjambées la petite chapelle au style colonial entièrement en bois du sol au plafond et crie :        

– Shirley, ferme la grande porte, M. Collins est revenu.        

L'homme d'Église revient vers nous tandis qu'une petite dame d'une cinquantaine d'années trottine vers l'entrée pour fermer à clé. Elle nous adresse un sourire timide et s'éclipse vers la salle arrière. Le révérend en a profité pour aller chercher cet album je ne sais où. Nous sommes toujours des statues de marbre devant les marches de l'autel. Sur l'estrade trônent aussi un piano antique, un micro et des candélabres sur pied. Il nous tend un livre relié, content de lui.        

– Nous avons suivi toutes vos instructions. Tenez, voici également vos négatifs.        

Je me saisis de l'album, mon voisin prend les négatifs. Il les examine minutieusement. Il est le premier à recouvrer la parole.        

– Je vous ai demandé des photos en argentique ? Et leurs négatifs ?        

Le révérend est étonné :        

– Non, c'est madame. Elle ne voulait pas que des photos puissent circuler sur le Net. Elle s'inquiétait pour vous, c'est pour ça qu'elle a demandé des photos argentiques. Elle nous a bien spécifié qu'il fallait vous remettre les négatifs... Vous, vous vouliez des tulipes blanches car ce sont ses fleurs préférées...        

Le révérend fronce ses sourcils broussailleux aussi blancs que ses cheveux ; son regard inquisiteur navigue sur nous, augmentant mon malaise.        

– Vous ne vous en souvenez pas ?        

Ne recevant pas de réponse, il poursuit :        

– Je sais que c'était tôt ce matin, mais au point d'avoir oublié cet important moment de votre vie ?        
– Quelle heure était-il ? je lui demande avec impatience.        

Le révérend nous observe alternativement. Il essaie de comprendre la situation.        

N'essayez par révérend, même nous, on n'y arrive pas...         

Il secoue sa tête, dubitatif puis nous fournit les explications que nous attendons avec impatience :        

– OK... donc... Euh, bon... Voyons... Vous êtes arrivés peu après l'ouverture, vers sept heures quinze. Nous avons organisé les préparatifs et signé tous les formulaires. Comme vous madame, vous êtes Française, il y avait un peu plus de papiers à remplir avec le bureau des licences de mariage du Clark County. Le mariage a eu lieu vers huit heures trente. Ensuite, je vous ai fourni le certificat mais vous n'aviez pas le temps d'attendre l'album, vous nous avez dit que vous repasseriez le prendre avec...        

~ Faux mariage,  Vrai désir ~Où les histoires vivent. Découvrez maintenant