Chapitre 19

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Sarah

Le lendemain, je m'installe au bureau de ma mère afin de remplir une liasse de documents et autres paperasses pour régulariser mon retour en France. Seulement, dès la première ligne, je bute sur la case « Nom ». Je ne sais même pas comment je m'appelle !       

Je me prends la tête dans les mains, les yeux rivés sur les formulaires. Je suis obligée d'écrire « Madame Collins »... Je ne peux pas nier la réalité. Chaque lettre à inscrire est une torture, elle me ramène inévitablement vers lui. Chaque case de ce maudit papier me renvoie en pleine tête des images de nous, à l'hôtel de Las Vegas, dans sa cuisine à San Francisco ou dans son lit à Los Angeles.        

Ne traîne pas Sarah, termine ces papiers et basta !         

Je m'active toute la journée, à ranger mes affaires, à faire le ménage, à cuisiner ; je me vide l'esprit.        

Les jours suivants s'annoncent chargés avec toutes ces démarches administratives. Tant mieux. Je me triturerai ainsi l'esprit à remplir des cases inutiles de la paperasse française, c'est mieux que de penser à lui.        

Je dois arrêter : un, de me tourmenter à propos de lui, deux, de surveiller mon téléphone et mes mails toutes les cinq minutes, trois, de faire des rêves érotiques qui me réveillent en sueur toutes les nuits.        

Ma sœur se pointe dès le premier week-end. J'ai cru à un autre sermon. Pourtant, pour une fois, elle me soutient. Inutile de lui cacher ma souffrance, elle me connaît trop bien. J'essaie tout au long de ces interminables journées de garder le sourire, d'agir normalement. Mais comment tirer un trait sur lui ? Que quelqu'un me donne une solution, s'il vous plaît !        

Elle m'entraîne au café sur la place de l'église, elle ne supporte pas de me voir me morfondre dans ma chambre. Des copains d'enfance s'installent à notre table et commencent à discuter avec nous. Marie affectionne les ragots, elle pose des dizaines de questions sur les uns et les autres. Une vraie commère. J'envie sa décontraction. En moins d'une heure, je suis de retour au cœur des potins du village : je sais qui est mort, qui a accouché et qui a trompé sa femme, et tout ça à grand renfort de cris et d'éclats de rire.        

Les gens qui me connaissent – c'est-à-dire la moitié du village – viennent tous me saluer, ils me taquinent en me surnommant l'Américaine. Je ravale à chaque fois ma salive, je souris avec courtoisie, mais ce surnom me fait mal. Nous terminons l'après-midi à la plage. Avec Marie et nos copains nous nous payons un tour de saut en parachute ascensionnel. L'adrénaline monte en flèche dans mon corps en même temps que cet engin de mort !        

Nous nous accrochons comme nous pouvons, mais à la fin de de séance je suis propulsée à la mer. L'eau est encore très fraîche malgré ma combinaison de plongée, mais a l'avantage de me remettre mon cerveau un minimum à l'endroit. Une belle journée de rigolade entre potes, voilà ce qu'il me fallait !        

En partant, Marie me serre très fort dans ses bras : 

– Tout ira bien Sarah. Tu es forte, tu trouveras une solution pour t'en sortir.        
– Merci de ta confiance, mais je n'ai pas ton optimisme !        
– Je te connais. Tu m'as assez crié dessus quand j'étais petite, je sais que tu es têtue et que rien ne t'arrête.        

– Eh, c'est toi qui dis ça ! 

Ma sœur a un fichu caractère aussi. Dans ma famille, nous avons appris à décrypter son visage et à nous sauver devant son air buté.        

Le lundi soir, ma mère m'informe qu'elle a prospecté un emploi pour moi. Elle connaît beaucoup de monde et je peux aller me présenter auprès d'un groupe de guides à la recherche d'une partenaire. Dès demain, j'irai les voir. Je ne peux pas prétendre à un emploi fixe à plein temps pour l'instant tant que je n'ai pas la date du procès. Néanmoins, rien ne m'empêche d'effectuer quelques visites.        

~ Faux mariage,  Vrai désir ~Où les histoires vivent. Découvrez maintenant