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Ayona Hills

24/05

Culross, écosse.

La journée promet d'être radieuse pour l'occasion. Je suis stressée mais également pressée d'être ce soir. Les tonnelles sont déjà décorées de guirlandes lumineuses, les tables sont déjà dispersées en dessous de la toile blanche et des bouquets de roses blanches trônent sur les tables. J'installe soigneusement chacune de mes créations sur les plusieurs portants.

Pourtant, un pincement douloureux stagne dans ma cage thoracique. J'aurais tellement voulu que ma mère soit avec moi pour cette journée, qu'elle voit à quel point mon entourage me soutient dans mon projet. Un soupir pénible s'échappe de mes lèvres.

Je hausse un sourcil intrigué au moment où Rebecca dépose bruyamment un plateau doré contenant des verres sur la table où se situera le buffet pour ce soir. Elle me semble de très mauvaise humeur aujourd'hui. Je me demande bien pourquoi.

- Ayona ! s'écrie joyeusement une voix féminine que je reconnais instantanément, Ellie.

Je lâche subitement mon occupation pour courir dans sa direction. Nous nous prenons affectueusement dans les bras. Elle m'a manquée, même si Lilian était présent, Ellie restera ma meilleure amie jusqu'à la fin de ma vie.

- C'est incroyable ! Tu as fais un magnifique travail ! me félicite-t-elle, admirative.

- Ta mère aurait été très fière de toi, ma chérie, comme nous le sommes. me murmure Paola, en m'enlaçant tendrement.

Je réprime un sentiment douloureux en réalisant qu'elle nous manque à toutes les deux. Même si nous habitions à Londres, Paola et ma mère étaient très proches. Nous avons toutes les deux perdues une personne que nous aimions profondément.

❀❀❀

Je dois reconnaître que notre soirée est un franc succès. Les invités ont complimentés notre travail, à Miranda et moi, une bonne centaine de fois. Mais je n'arrive pas à être heureuse. Je croyais pouvoir faire le deuil du décès de ma mère, mais je réalise à présent que le deuil n'existe pas. Nous aurons toujours mal de son absence.

Néanmoins, un sourire s'installe sur mon visage en observant Matthew et ma meilleure amie qui danse ensemble dans un merveilleux slow. Je suis très heureuse qu'elle a trouvée un homme qui l'aime à sa juste valeur. Je sors de mes pensées quand la silhouette de Miranda s'approche de moi, un sourire éclatant illuminant son visage.

- Je suis très fière de toi, ma beauté, tes créations se vendent très bien, tout le monde adore ton travail. Je te confirme donc que tu peux ouvrir une boutique sans t'occuper du nombre de clients. me lance-t-elle, joyeusement.

Pourquoi je n'arrive pas à ressentir de la joie moi aussi ? Je me dirige à l'intérieur de la maison lorsqu'elle tourne les talons pour rejoindre un couple que je ne connais pas. Je m'installe lourdement dans un des canapés du grand salon, ayant besoin d'être seule.

La déchirure dans ma poitrine s'agrandit de plus en plus, jusqu'à ce que j'éclate en sanglot. Ma mère me manque terriblement. Je n'arriverais jamais à vivre sans elle. Elle aurait dû être là ce soir pour admirer et me féliciter de mon travail. Je cache mon visage, baigné de larmes, dans mes mains.

- Ayona, qu'est-ce-qu'il se passe ?

Lilian apparaît dans la pièce avec une lueur inquiète sur son visage, il s'agenouille devant moi pour être à ma hauteur. Sans réfléchir à la conséquence, je le prends dans mes bras en laissant échapper un sanglot. J'ignore la décharge électrique qui se propage dans mon corps quand il commence à me caresser délicatement le dos pour me consoler.

- Ma mère me manque, Lilian, elle aurait dû être là ce soir. pleurais-je, douloureusement.

- Oh Ayona.. Je suis désolé qu'elle ne soit pas là, mais elle restera toujours dans ton coeur, ne t'inquiète pas, elle est très fière de toi de là-haut, désormais elle est ta bonne étoile.

Je me redresse correctement, en séchant mes joues humides, tandis qu'il capture maladroitement mon regard dans le sien. Un sentiment d'apaisement m'envahit lorsque je me noie dans les profondeurs de ses iris océans. Je tressaillis quand il rattrape doucement une larme solitaire qui roule sur ma joue.

Il semble être le remède à toutes mes douleurs, remarquais-je. Il se raidit quand je pose ma main sur la sienne qui est toujours sur ma joue. Une vague de chaleur me submerge pendant qu'une émotion inconnue traverse ses pupilles. Une bulle réconfortante nous enveloppe, nous mettant à l'écart de la réalité.

- Lilian.. soupire-je, en fermant les paupières.

- Pourquoi tu me fais ça, Ayona ? me demande-t-il, déstabilisé.

J'ai besoin de lui. J'ai besoin de sentir la chaleur de ses bras, j'ai besoin de lui dire ce que j'ai sur le coeur. J'ai besoin qu'il sache.

- J'ai besoin de toi, Lilian, nous ne pourrons jamais être amis, je suis amoureuse de toi. C'est toi que j'attends depuis des années, c'est toi que je veux à mes côtés pour l'éternité..

- Non, ne dit pas ça, s'il te plaît. me supplie-t-il du regard, douloureusement.

- Je suis amoureuse de toi, Lilian Johnson. déclare-je, les larmes aux yeux.

Ma température corporelle augmente considérablement quand les barrières de son âme se lèvent dans ses iris. Je peux ressentir son combat intérieur, il semble hésiter quelques secondes. L'atmosphère se réchauffe subitement entre nous. Je décide de l'apaiser en posant ma main tendrement sur sa joue. Il a beaucoup trop souffert, constatais-je.

Je retiens un petit cri de surprise au moment où ses lèvres fondent sur les miennes, me plongeant dans un océan de bonheur. Mes peurs, mes doutes, mes faiblesses disparaissent. Une larme perle sur ma joue, donnant un goût salé à notre baiser. Mon premier baiser.

Il n'y a plus aucun doutes, je suis éperdument amoureuse de cet homme aux boucles brunes et à l'âme abîmée. Notre baiser s'intensifie pendant que je passe mes mains autour de son cou. Je me raccroche à lui comme une bouée de sauvetage, ne voulant pas que ce moment s'arrête.

Cependant, nous nous séparons à bout de souffle. Un pincement douloureux revient dans ma cage thoracique quand le regard de Lilian reprend son impassibilité habituelle. Il s'est refermé sur lui-même. J'encadre son visage de mes mains, les paupières fermées, puis pose doucement mon front contre le sien. Nos respirations se mêlant poétiquement.

- Je ne peux pas Ayona, je ne peux pas. commence-t-il, en secouant nerveusement la tête.

- Lilian, non.. proteste-je, péniblement.

- C'était une erreur Ayona, pardonne-moi..

Il disparaît de la pièce, le visage fermé, me laissant seule dans le salon avec le cœur littéralement en miettes. Il est mon premier baiser.

SECONDE CHANCEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant