Artists on campus - Nate

24-Charlotte

Depuis la mise en place du programme, mes journées sont désormais bien remplies. La rage room reste pour l'instant mon activité préférée mais je sais que je n'ai pas encore tout vu ! Ce qui est prévu pour aujourd'hui c'est retour chez maman. C'est le moment de lui dire toute la vérité et de la mettre à jour des derniers potins. Bien mouvementés si vous voulez mon avis. Même si je sais que devoir tout raconter ne sera pas une partie de plaisir et me fera surement revivre certains moments que je préfèrerais oublier, j'ai hâte de lui en parler. Il n'y a rien de mieux qu'une maman qui trouve les bons mots pour nous réconforter.

Incapable d'y aller seule par peur de me dégonfler au dernier moment, j'ai demandé à Nate de m'y conduire. Sans que j'aie besoin de lui intimer, il m'a proposé de lui-même de faire un tour dans la ville pendant que je parle à ma maman pour nous laisser dans l'intimité. Il m'a dit que ça n'était pas le bon contexte pour la rencontrer. J'ai trouvé ça mignon qu'il accepte de juste faire office de taxi alors que j'ai une voiture. Bon, il servira plus de soutien émotionnel mais je n'ose pas vraiment lui présenter ça sous cet angle.

-Charlotte ! m'appelle-t-il du rez-de-chaussée. Ça te va si on démarre maintenant ? T'es prête ?

Je dévale les escaliers, et, sans plus attendre, nous sommes en route vers ma maison.

Qu'est-ce que ça fait du bien de tout déballer à quelqu'un qui nous écoute réellement. Depuis le moment où j'ai ouvert ma bouche pour commencer mon histoire, ma mère ne m'a pas coupée une seule fois, me laissant le temps d'organiser mes idées pour que mon récit soit clair. En réalité je sais qu'il était tout sauf compréhensible. Je suis peut-être douée avec les mots quand il s'agit d'écrire, mais quand il faut raconter en parlant, je deviens une calamité. Je reviens sans cesse sur le point d'avant, cale des personnes sans lui avoir expliqué qui ils étaient, et m'embrouille au point de parler en onomatopées. Pour autant, elle ne s'est pas plainte et tente de déchiffrer mon charabia, comprenant qu'au moins, c'est libérateur.

-Alors t'en pense quoi ?

Elle repose sa tasse de tisane et me répond :

-La maman en moi se focaliserait sur le fait que les couilles, en fait non, le corps intégral de ce nullos de Jonah devrait être brulé dans de l'acide. Vivant, évidement.

Et Nate qui se demandait d'où me venais cette imagination...

-Elle dirait aussi que tu as été très courageuse, et purée très badass en le confrontant chez lui !

-Maman plus personne ne dit badass, je rigole.

-Je m'en fiche. J'ai plus de quarante ans alors j'ai le droit d'utiliser des mots périmés en pensant qu'ils sont à la mode. Laisse-moi deviner, j'ai pas non plus le droit de dire que t'as été une vraie bad bitch ?

Mon Dieu, non.

-Eh bien comme tu as plus de quarante ans je crois que je n'ai pas le droit de t'en empêcher...

-La maman en moi soulignerai aussi que tu aurais pu me le dire plus tôt, ça fait quand même deux semaines que tu zappes mes appels jeune fille.

Oups...

-Mais bon, passons outre. Passons à ce que la femme en moi te dirais maintenant : quand est-ce que je rencontre ce fucking Nate ? Pardon mais tu l'ignore pendant des semaines alors qu'il avait raison sur toute la ligne et il suffit que tu sonnes à sa porte pour qu'il t'héberge, t'aide, te soutienne, dorme sur le canapé pour te laisser sa chambre...

-Pour ma défense c'est un canapé convertible...

-Ça reste un canapé Charlotte. Soit ce mec est le descendant de l'Abbé Pierre soit il en pince pour toi.

Mais bien sûr ! Vu le nombre de comédies romantiques qu'elle visionne à la journée, ça ne m'étonne même pas qu'elle arrive à me sortir cette conclusion.

-Sors toi ça de la tête maman, c'est juste un super ami, tout est purement platonique entre nous. Je te rappelle quand même que je viens de me faire larguer, alors même s'il en pinçait pour moi, c'est pas réciproque.

-C'est pour ça que j'ai précisé que c'est la femme en moi qui est de cet avis. La maman a juste envie de te faire rentrer en couvent et t'éloigner de l'espèce masculine jusqu'à la fin de ta vie. C'est tellement dommage que les ados n'écoutent plus les conseils de leur maman !

Le culte qu'elle voue à Nate alors qu'elle ne le connait qu'à travers mes paroles me fait rire. Elle ne l'a jamais vu mais pense qu'il ferait un bien meilleur copain que l'autre imbécile. Je suis d'accord sur ce point, de toute façon ça n'est pas bien compliqué... Mais pas avec moi. Il ne me viendrait même pas à l'esprit de gâcher cette belle amitié qui se créer pour une amourette futile.

-Bon s'il faut être plus sérieuses, la femme et la maman t'informent que tu dois les appeler au moindre problème ou doute, on est bien d'accord ?

-Oui cheffe !

Une fois les dernières précisions racontées et les derniers conseils donnés, nous sortons sur le palier. J'aperçois Nate m'attendant déjà, adossé contre sa voiture. Il se redresse quand il comprend que je suis accompagnée de ma mère, comme prit en flagrant délit. Mais ce qui me fait le plus rire, c'est l'air faussement sévère qu'adopte ma mère pour l'effrayer, ce qui fonctionne plutôt bien en plus !

-T'aurais pu me dire qu'il était carrément canon quand même, me chochotte-t-elle à l'oreille. Bonjour Nate, je suis Nathalie, la maman de cette charmante créature.

La honte...

-Enchanté Madame Roberts, lui répond-il poliment.

-Polis en plus, elle rajoute à mon attention.

-T'es inarrêtable maman au secours.

-Bon aller ! Je vais vous laissez profiter de votre après-midi mais j'ai juste une dernière chose à ajouter ma chérie. Rappelle-toi que quand on tombe à cheval il ne faut pas avoir peur de remonter.

-Tiens c'est dommage j'ai peur des chevaux. Flûte alors !

-Alors remonte sur un chat on s'en fiche de la métaphore, mais je t'en supplie monte sur lui.

Oh my god.

Je rêve ou ma propre mère vient de faire une allusion sexuelle m'incluant ?

-Je vais vomir.

-Moi aussi je t'aime ma chérie ! A bientôt Nate ! lui lance-t-elle comme une certitude et non un espoir.

-Ça te dit qu'on aille se manger une glace avant de rentrer ? me propose-t-il tandis que nous nous installons dans la voiture. Je connais un super bon glacier pas loin, si ça te tente.

-Carrément !

-Ta mère a l'air cool, en revanche j'arrive pas à savoir ce qu'elle a pensé de moi.

-Fais-moi confiance, si t'avais vingt de plus elle t'aurais épousé.

Il rigole en entendant ma blague, sans savoir que ce n'en est pas une. Je pense réellement ce que j'ai dit.

-D'ailleurs, c'est faisable la surprise numéro une en rentrant ?

-Vos désirs sont des ordres mademoiselle.