Chapitre 43 : À la croisée des chemins

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Le dos de Ren rencontra le sol, dur et gelé contre ses os. Encore sonné par le voyage depuis le Deuxième monde, ses oreilles sifflaient et ses paupières restèrent closes. Il avait le sensation que les dernières secondes avaient duré une bonne éternité. Prudemment il ouvrit les yeux. D'abord floue, sa vision s'accommoda peu à peu à son environnement et ses oreilles captèrent les bruits autour de lui. Un bruit de ventilation à peine audible lui parvint. Ses yeux se figèrent sur le plafond aux néons blafards...

Il se redressa en position assise alors que le froid du sol remontait le long de ses bras et de sa colonne vertébrale pour le faire frissonner. Sans y croire il regarda le couloir sinistre et aseptisé qui s'étendait sous ses yeux... Ce carrelage gris métallisé... Ces murs en plaques de métal, impeccables et froids...

Qu'est-ce qu'il fichait dans le Troisième monde, à la tour Saurac ?

Il ne comprenait pas... Pourquoi il n'était pas chez lui, dans le Premier monde ? Pourquoi avait-il atterri ici, l'endroit qu'il avait fuit avec Stone une douzaine de jours plus tôt ? Ce dernier ne se serait quand même pas trompé de destination ? Ren pivota pour le chercher mais son alter-ego n'était pas dans le couloir. Ils étaient séparés. Impossible de savoir si Stone l'avait bien suivi pendant le voyage ou s'il était ailleurs...

À cette pensée Ren frissonna non pas de froid mais de peur. Il était seul dans cette tour de malheur. Quelque part dans ces locaux, il devait y avoir Eileen Saurac. L'idée de se retrouver face à elle et de terminer en cobaye dans un de ses laboratoires le répugna... Il n'avait pas fait tout ce chemin pour revenir à son point de départ !

Chaque chose en son temps. Il allait voir si Stone était dans le coin. Après tout il avait bien été séparé de ses amis la toute première fois qu'il avait voyagé dans un autre monde. Stone était peut-être dans une autre pièce ou à un étage différent...

Il se redressa et épousseta son jean en regardant devant et derrière lui. Il opta pour le coin de couloir qui était éclairé plutôt que celui plongé dans la pénombre avec un néon vacillant et en fin de vie. Le silence autour de lui était glacial et sinistre. Il n'y avait pas un seul bruit. Plusieurs fois Ren se retourna en pensant être suivit. Il avait l'impression que quelqu'un était caché dans l'obscurité derrière lui, mais ce n'était que sa paranoïa et sa peur du noir qui le suivaient en réalité.

Après plusieurs dizaines de mètres à errer, Ren entendit enfin des voix. Le couloir dans lequel il était formait au bout deux coudes, se divisant ainsi en deux autres couloirs, un à droite et un à gauche. La voix provenait du couloir de gauche. Il se rapprocha prudemment de la bifurcation et se stoppa net en reconnaissant la voix du pire comité d'accueil qui puisse exister. Aussitôt il se plaqua contre le mur du couloir en espérant que les deux personnes qui discutaient n'allaient pas venir vers lui.

— Tu vas arrêter tes caprices Peter et tu vas me prendre ces médicaments que tu le veuilles ou non ! gronda la voix d'Eileen Saurac.

— J'en ai marre de devoir me piquer tous les jours et de me trimballer avec tout ça !! répliqua la voix de Peter.

C'était la directrice de la tour, en pleine dispute avec son fils, Peter, qu'elle avait apparemment ramené à la vie suite à un processus douteux. Elle en avait surtout fait un mort vivant étrange, à la peau transparente et au squelette visible et brillant. Ren ne risqua aucun coup d'œil et resta sagement caché là où il était. Il se laissa glisser en position assise jusqu'au sol.

— Ça fait quoi si j'arrête, hein ? provoqua Peter.

— Ça fait que tu vas cesser de vivre ! Tu vas me gâcher tout le protocole de réanimation que j'ai entrepris et ton expérience deviendra un échec ! Tu sais combien ça m'a couté de reconstituer un corps, d'y implanter ton squelette en miette, ton âme et tout le reste ? Très cher ! Alors tu vas me faire le plaisir de prendre tes médicaments jeune homme.

II) La mémoire des DouzeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant